Commentaire de Michel Jeanneret
Chers candidat-e-s au Parlement, regardez plus loin que le bout de votre nez!

Notre système de milice n'est plus qu'un mirage, estime Michel Jeanneret. Fait rassurant (ou pas), un élu a compris que notre Parlement ne représente plus les intérêts du peuple. Sa recette devrait être obligatoire.
Publié: 23.09.2023 à 12:01 heures
|
Dernière mise à jour: 25.09.2023 à 08:57 heures
Photo: keystone-sda.ch
Blick_Michel_Jeanneret.png
Michel JeanneretRédacteur en chef

La Suisse possède la démocratie directe la plus formidable au monde. L’une de ses grandes vertus, c’est notre parlement de milice. Les 246 élues et élus sous la Coupole fédérale sont bien plus que l’émanation du peuple. Ces personnes ont un travail. Un vrai. Comme vous et moi. Elles connaissent la vie et ses contraintes, à la différence des politiciens professionnels qui tournent dans un bocal rempli d’eau viciée. Loin des réalités.

En politique, l’idée de milice est merveilleuse, car elle est synonyme d’engagement passionné. Elle agrège la somme des volontés individuelles dans des lois qui portent au final les dénominateurs communs de notre société. Qui défendent l’intérêt collectif. Seulement voilà: tout ce qui précède est malheureusement le fruit d’une vision largement fantasmée de nos institutions.

Des bancs de l’uni aux fauteuils du Parlement

La réalité, c’est que de plus en plus d’élues et d’élus sautent sur un siège de député après s’être étalés sur les bancs de l’uni — ce qui explique que les Vert-e-s sont devenus l’annexe de la Fac’de Sciences humaines, option «Études genre». La réalité, c’est que la représentativité du peuple suisse s’étiole au fur et à mesure que notre parlement s’académise, un fait attesté par les statistiques.

Le phénomène n’est pas nouveau. En mai 2010, selon une étude publiée par l’EPFZ, les fameux miliciens avaient déjà complètement disparu de la Chambre haute et ne représentaient qu’à peine 13,4% des élus du Conseil national. En clair: une large majorité des parlementaires se contentent de leur cachet, plutôt généreux d’ailleurs. Leur job: siéger.

Le Parlement, ce miroir déformant

À ce problème, il faut ajouter une très mauvaise représentation des professions au sein du parlement. D’après le dernier recensement de l’Office fédéral de la statistique — qui date de 2015, les élus de la précédente législature étaient déjà un miroir drôlement déformé de notre société.

Difficile de justifier que 20.4% des parlementaires soient agriculteurs, alors que seuls 1,3% des Suisses exercent cette profession. Idem pour les avocats et juristes (18,1% versus 0,7%) ou les employés de partis politiques et d’associations (9,9% versus 0,1%).

Ce phénomène, qui n’est d’ailleurs pas propre à notre pays, c’est la déconnexion entre la population et les élites politiques. Et il est grave, car c’est de là que vient l’effondrement de la confiance que nous plaçons dans celles et ceux qui doivent porter nos préoccupations auprès des institutions.

Ne pas défendre que ses petits intérêts

Manifestement, il existe un politicien de Payerne, avocat, qui semble préoccupé par la question. Candidat socialiste au Conseil national, Sébastien Pedroli s’est immergé dans de nombreuses réalités. Celle d’un carreleur, d’une salariée d’une garderie, d’un employé de La Poste, des CFF et… d’une cartomancienne!

Une magnifique initiative qui vient pallier le manque de représentativité dénoncé ci-dessus. C’est le rappel, très concret, qu’un élu se doit de défendre des idées qui dépassent son pré-carré et qu’on est toujours plus crédible lorsqu’on parle en connaissance de cause.

Il faudrait imposer des JOM à toute la classe politique. Ou alors tirer au sort ces messieurs dames, comme le préconisait Rousseau durant le siècle des Lumières. La vraie démocratie directe.

Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la