L’objet honni des opposants à la 13e rente AVS, c’est l’arrosoir. Pourtant, c’est un bel outil. Il permet de répartir équitablement l’eau dans le jardin. Chaque plante reçoit sa part. Elle grandit et contribue à l’alimentation familiale.
A Berne, on préfère le camion-citerne. Quand une grande banque fait faillite, c’est en colonnes qu’ils apportent les milliards. Les actionnaires UBS du monde entier ont pris bonne note. Ils n’ont plus à se soucier du risque. Le pompier, c’est le contribuable suisse. Et il est gratuit. Les actionnaires gardent tout le salaire du risque, les milliards de dividendes.
Pour l’armée aussi, on y va franchement. Elle coûte cinq milliards par an, on passera désormais à dix, deux fois cinq! Pour quoi faire? On verra. Supprimer le droit de timbre pour les banques, baisser les droits de douane pour les industriels, baisser l’impôt anticipé pour les riches? Pour ces secteurs privilégiés, on travaille au camion-citerne. Mais quand on parle d’AVS, tout à coup, les cyniques font semblant d’avoir peur qu’on donne une rente «aux riches».
Pour l’AVS, rien!
Pour compenser les pertes de pouvoir d’achat, il n’y a rien. Malgré l’explosion des primes-maladie, des loyers, du chauffage, des prix alimentaires, ni camion-citerne, ni arrosoir. Même le dé à coudre, c’est encore trop. Quand il s’est agi d’améliorer les rentes AVS de 7 à 14 francs par mois pour compenser un peu le déficit d’indexation par rapport à l’inflation, la droite majoritaire n’est même pas entrée en matière…
Les opposants sont avares, sauf de cynisme. En Suisse, la rente AVS est de 2000 francs en moyenne par personne, celle du deuxième pilier est tombée à 1700 francs par mois, mais les rentiers possèdent parfois une maison ou un appartement qu’ils ont payé en trimant des décennies. Ils seraient donc «fortunés», même si cette maison les prive justement d’une prestation complémentaire dont ils auraient pourtant besoin.
Finances de l’AVS: bénéfices en hausse, prestations en baisse
Le Conseil fédéral prévoit des bénéfices de plus de trois milliards pour l’AVS ces prochaines années. On fait peur pourtant, une fois de plus, avec la prétendue «ruine de l’AVS». On les entend prétendre soutenir les prestations complémentaires «pour ceux qui ont besoin d’aide». Pourtant, des dizaines de milliers de Suisses perdent, en ce début 2024, des centaines de francs par mois à cause des économies décidées dans les PC.
Ni le Conseil fédéral ni la majorité du Parlement n’ont l’intention d’améliorer les PC, ni les rentes pour couples, ni l’indexation des rentes. Au contraire, ce qui viendra en cas de refus de la 13e rente AVS est déjà annoncé: supprimer les rentes de veuves, baisser les rentes du deuxième pilier et augmenter sans limites l’âge de la retraite.
Divorce, expatriation, Exit
Monsieur Blocher avait dit de son air pataud: «Moi aussi, je prendrais bien une 13e rente AVS, une 14e ou une 15e, mais on ne peut pas…». Puis les délégués de l’UDC suisse ont voté pour augmenter l’âge de la retraite à 66 ans tout de suite et ensuite sans limite. Alors on a compris. Il aimerait bien que les Suisses ne renoncent pas seulement à la 13e rente, mais aussi à la 12e, la 11e et à toutes les autres.
Cela fait 75 ans que cette élite n’a pas digéré l’AVS. Ils veulent transformer toute la prévoyance vieillesse en «business». Les banques et les assurances paient la campagne du non, parce qu’elles savent que l’érosion de l’AVS leur fera gagner des milliards avec la vente de produits d’épargne coûteux.
Au fond, ces opposants à la 13e rente AVS n’ont qu’une chose à dire aux anciens menacés par le retour de la misère: débrouillez-vous. Et comment on se débrouille? Eh bien, voyons voir… il y a le divorce pour avoir deux rentes ou l’expatriation pour profiter du taux de change. Certains plaisantent à peine: il nous reste encore Exit… On aimerait que la Suisse ait autre chose à proposer à ses aînés.
Monter les jeunes contre les vieux
Mais le comble du cynisme, c'est la stratégie de monter les jeunes contre les anciens. Pourtant, tous les jeunes vieillissent. C’est comme ça. Donc les droits donnés aux retraités sont aussi pour les jeunes. Cette fausse opposition veut cacher quelque chose: 90% des jeunes font un bon calcul en améliorant la rente AVS. Pour un franc de cotisation salariale, ils reçoivent en moyenne six francs de rente. Car l’employeur paie sa part et les riches paient sans limites sur leur salaire. Dans l’AVS, ce sont les riches qui paient plus qu’ils ne reçoivent, pas les jeunes.
Les jeunes familles savent ce qu’elles doivent à leurs parents, qui ont payé les études et qui gardent les petits gratuitement quand les garderies font défaut. Si c’est oui le 3 mars, on fêtera ensemble, entre générations solidaires. Et la Suisse sera belle, comme un jardin bien arrosé.