Un spectacle peu commun ce vendredi en fin d'après-midi au Grand Conseil genevois. Juste avant la prestation de serment de la procureure Caroline Babel Casutt, qui scelle son transfert à un poste de juge au Tribunal civil, les membres du Mouvement citoyens genevois (MCG) se sont tout simplement levés… Pour quitter la salle.
Contexte: Caroline Babel Casutt est actuellement visée par une procédure de récusation pour soupçon de mise sur écoute de conversations téléphoniques entre les avocats de la défense et leurs clients, dans le cadre du procès des promoteurs immobiliers.
Pourquoi ce coup de théâtre? Cette élection a été annoncée en amont début novembre, comme le relayait Léman Bleu. Le MCG avait alors adressé une lettre au bureau du Grand Conseil, lue en début de séance jeudi soir. Le parti estime que l’élection de la procureure au Tribunal civil doit être reportée tant que l’enquête sur les écoutes téléphoniques, dans laquelle elle est mise en cause, n’est pas achevée.
Le Mouvement a donc explicitement demandé à ce que l’élection à ce poste se fasse via un vote par bulletins secrets. Mesure que le Parlement a refusé jeudi par 42 «non».
Watergate made in Genève
«Ce soir, nous avons pu mesurer les limites d’une élection des juges par les partis politiques…», s’indigne Patrick Dimier, député MCG invité par Blick à s'exprimer.
L’élu admet que la culpabilité de la procureure dans l’histoire des écoutes téléphoniques reste cependant encore à prouver: «Nous ne savons pas encore qui est véritablement fautif, elle-même ou la police», nuance le député.
Tout en appelant à plus d’égalité de traitement entre le pouvoir judiciaire et la police, par exemple: «L’on ne peut pas permettre à cette procureure d’être nommée juge dans une juridiction civile alors qu’elle est sous enquête. C’est violer l’esprit de la loi! S’il s’agissait d’un policier ou d'une policière, dans la même situation, la personne aurait été immédiatement suspendue», poursuit Patrick Dimier.
A rappeler que le parti est à l’origine d’une loi qui veut instaurer l’élection de procureurs extérieurs au canton pour les affaires qui touchent au Ministère public – comme c’est le cas de l’enquête visant la procureure Caroline Babel Casutt. Une procédure que des cantons comme Vaud et Fribourg, par exemple, pratiquent déjà.
Quand le MCG fait du théâtre
Le MCG renoue-t-il avec son amour du spectacle, des années après le retrait de son animateur en chef Eric Stauffer de la vie politique? Pour rappel, la cheville ouvrière du parti avait par exemple jeté un verre d’eau sur un député lors d’une séance en 2012.
«C’est un geste politique fort, qui n’implique que les personnes qui sont sorties», ajoute le député MCG Francisco Valentin. Le parti n’a-t-il pas peur de verser dans le clownesque? «Non! On reste droit dans nos bottes, droit dans nos convictions», ajoute l’élu.
Le ministre élu sous la bannière du MCG Mauro Poggia n'a pas voulu commenter la scène. Et qu'en pensent les autres partis? Un député socialiste dit par exemple approuver complètement la manœuvre. Le PLR Yvan Zweifel n’est quant à lui pas de cet avis. Et de commenter: «Pour un parti qui représente la police, la présomption d’innocence, c’est quand même important, non?»