La gauche s'effiloche au Conseil des États, souligne une analyse parue lundi dans plusieurs journaux romands après l'élection d'Esther Friedli, poids lourds de l'UDC et compagne de l'ancien président du part Toni Brunner, au Conseil des États pour le canton de Saint-Gall.
Depuis, le texte fait beaucoup de bruit sur les réseaux sociaux de l'UDC. Pourquoi? À cause d'une phrase de Roger Nordmann: «Il y a un vrai risque que le Conseil des États devienne très réactionnaire, avec l'alliance du fric et du fumier», estime le conseiller national socialiste.
Cachée dans la dernière colonne, la formule choc choque à l'UDC. Le socialiste avait beau faire référence à la récente alliance entre l'Union suisse des paysans et les associations faîtières de l'économie, le parti agrarien y voit une insulte à l'agriculture suisse. Les Jeunes UDC vaudois ont invité leurs militants à «afficher leur soutien au monde paysan», avec un hashtag dédié #Rogerexcusetoi.
Si l'impact de l'opération reste pour l'heure très limité, la relève du parti agrarien peut compter sur un soutien à Berne: celui de Jacques Nicolet. Au téléphone, le conseiller national et agriculteur de Lignerolle (VD) est pour le moins outré par une phrase qui, selon lui, «salit toutes les familles paysannes du pays».
Jacques Nicolet, dire qu’il y a une alliance des milieux économiques et agricoles, c’est si terrible que ça?
Vous avez lu la formule utilisée? Esther Friedli est élue haut la main comme parlementaire du canton de Saint-Gall et on la traite de «fumier»? C’est un scandale, rien de moins! Cette phrase salit toutes les familles paysannes.
Avez-vous contacté Roger Nordmann?
Non, j’envisage plutôt de réagir sous la forme d’une lettre ouverte dans la presse, pour le mettre face à ses responsabilités. On peut ne pas être d’accord en politique, on peut parfois être un peu rudes les uns avec les autres. Mais qualifier la corporation paysanne de «fumier», ça va beaucoup trop loin.
La formule est peut-être malheureuse, mais sur le fond: les paysans forment un lobby déjà très puissant à Berne. Difficile de le contester, non?
Mais heureusement que nous sommes bien représentés à Berne! Nous produisons 50% de la nourriture consommée dans ce pays, il faut bien que les conditions cadre suivent, déjà qu’elles ne sont pas faciles. Et on parle de gens qui sont élus, que cela plaise ou non aux socialistes.
La gauche n’est pas forcément opposée au monde agricole: la conseillère fédérale Elisabeth Baume-Schneider, par exemple, est fille de paysan.
Tout à fait, nous avons des rapports cordiaux avec beaucoup d’élus socialistes. Il s’agit ici avant tout d’un problème de personne. Cette déclaration de Roger Nordmann appelle absolument une réaction, mais elle ne doit pas avoir lieu sous le coup de l’émotion. Je vais laisser passer ma colère et être le plus constructif possible.