Le PLR a accusé ses concurrents de «refuser de travailler», le Parti socialiste (PS) a qualifié le débat de «comédie». Tout le monde n'était d'accord que sur un point: ce qui s'est passé à Berne durant la dernière semaine de la session d'été n'était pas vraiment une heure de gloire du Parlement.
Session spéciale terminée après une heure
Mais reprenons les choses dans l'ordre: après que le Conseil national a donné à sa commission sociale – à une très faible majorité – le mandat d'élaborer un contre-projet à l'initiative des jeunes PLR sur les retraites, qui demande un relèvement progressif de l'âge de la retraite, on s'est retrouvé lundi dernier pour une séance spéciale convoquée à la hâte.
Bien que 90 minutes aient été prévues, la réunion n'a même pas duré une heure. Et avant même que toutes les propositions aient pu être présentées, les membres centristes de la commission ont quitté la salle. Ils devaient encore s'occuper des nominations de leur parti pour la commission d'enquête parlementaire (CEP) sur Credit Suisse.
Jusqu'alors, aucune variante de contre-projet n'avait trouvé de majorité au sein de la commission. Le Centre a refusé un modèle dans lequel l'âge de la retraite aurait été lié aux années d'activité – bien que l'ancienne conseillère nationale du Centre Ruth Humbel ait justement demandé cela dans un postulat. L'UDC ne voulait soudainement plus rien savoir d'un frein à l'endettement. Bref, la réunion n'a rien donné.
Dès le lendemain, Andri Silberschmidt (PLR) a tenté de sauver ce qui ne pouvait plus l'être à la Chambre basse. Ne rien faire n'est pas une solution, a lancé le plus jeune parlementaire dans la salle du Conseil national. Il a une nouvelle fois mis en garde contre le fait que, sans action rapide, l'AVS serait à long terme au bord du gouffre financier.
Auparavant, la collègue de parti d'Andri Silberschmidt, Regine Sauter, avait déjà émis de vives critiques. Le conseil national semble ne surtout pas vouloir se brûler les ailes avant les élections de l'automne. Cette dernière a mis en garde: «L'AVS est trop importante pour de tels jeux!» Mais ses propos sont restés lettre morte sous la coupole fédérale – le Conseil national a décidé par 140 voix contre 42 de soumettre l'initiative sur les rentes aux urnes en mars prochain, sans contre-projet indirect.
Un relèvement modéré de l'âge de la retraite garantira les rentes
Pour le PLR, le pire des scénarios s'est donc réalisé. C'est justement en année électorale que le parti devra aller à la pêche aux voix avec une demande qui se heurte au rejet d'une grande partie de la population.
S'il y avait eu un contre-projet, les libéraux-radicaux auraient sans doute retiré leur initiative sur les retraites, mise en chantier en 2019 – avec l'argument que la réforme de l'AVS, acceptée par le peuple l'année dernière, avait pour l'instant désamorcé la situation. Les récents événements au Parlement ont réduit à néant cette stratégie de sortie.
Bien sûr, les libéraux-radicaux voient les choses différemment. Le président Thierry Burkart, lui-même membre du comité d'initiative, déclare: «Le PLR continue de soutenir pleinement l'initiative sur les retraites.»
Une augmentation modérée de l'âge de la retraite permettrait de garantir les rentes de la génération du baby-boom. Il s'agit d'une véritable solution contre la pénurie de main-d'œuvre, qui réduirait aussi fortement l'immigration, selon le chef du PLR. «Le fait qu'une partie des Vert'libéraux et de l'UDC aient froid aux yeux en cette année électorale nous conforte encore plus dans notre position.»
Le PLR divisé en interne
Ce sont les jeunes libéraux-radicaux qui mènent la danse sur l'initiative sur les retraites. Mais le parti-mère est également derrière eux. Lors de l'assemblée des délégués de janvier 2020, le PLR avait décidé à l'unanimité d'aider son jeune parti à récolter des signatures pour l'initiative populaire.
Outre Thierry Burkart, le comité d'initiative compte aussi des personnalités du parti comme le vice-président du PLR Philippe Nantermod, le conseiller aux Etats Andrea Caroni, Christa Markwalder, ou Christian Wasserfallen.
Toutefois, les rangs ne sont plus tout à fait unis. Un éminent conseiller national PLR a déclaré à Blick que l'initiative était formulée de manière «trop extrême». «En l'état, cette revendication n'est guère susceptible de réunir une majorité – elle est à mon avis morte».
L'initiative sur les retraites va-t-elle maintenant devenir un boulet pour le PLR pendant l'automne électoral? Andri Silberschmidt le contredit avec véhémence: «Contrairement aux autres partis, nous ne racontons pas autre chose avant les élections qu'après les élections». Selon lui, ce thème aidera à la mobilisation: «Ce sera un booster électoral pour le PLR!»
Le PLR doit agir avec prudence
Le politologue Michael Hermann ne partage que partiellement cette appréciation. «C'est la bonne cause pour le bon parti.» Mais si le PLR veut compter parmi les vainqueurs des élections d'octobre, il doit aussi marquer des points au-delà de sa zone de confort.
C'est justement pour les électeurs et électrices qu'il souhaite détourner de l'UDC que cette initiative a un effet plutôt dissuasif. Il n'est donc pas très utile que le président du parti, Thierry Burkart, veuille pêcher dans cet étang avec sa ligne plus dure en matière d'asile.
Sa prédécesseure a fait naufrage lorsqu'elle a tenté de faire de même de l'autre côté. Avant les élections de 2019, Petra Gössi s'était montrée très respectueuse de l'environnement – les voix progressistes sont toutefois allées aux Vert'libéraux. «Il ne faut pas occuper des thèmes que d'autres maîtrisent mieux», explique Michael Hermann.
Un no-go pour les Vert-e-s
Pour la gauche, l'initiative sur les retraites est un cadeau qu'elle accepte volontiers. Le président des Vert-e-s Balthasar Glättli le dit plus élégamment: «Bien sûr, nous n'allons pas passer sous silence ce sujet par égard pour nos adversaires politiques», mais nous n'allons pas non plus ménager l'UDC et les Vert'libéraux. Ceux-ci ont montré leur vrai visage en soutenant initialement un contre-projet au Parlement.
Pour les Vert-e-s, un relèvement automatique de l'âge de la retraite ne sera jamais envisageable. «Nous acceptons ce cadeau, déclare Balthasar Glättli. Les bourgeois ne se sortiront pas de cette affaire de sitôt.»
L'AVS est malmenée par le PLR
Mattea Meyer, coprésidente du PS, préférerait, elle aussi, ne pas être à la place des libéraux-radicaux dans les mois à venir. «Ils savent que leur demande n'a aucune chance dans les urnes», explique la conseillère nationale zurichoise. Le Conseil fédéral élaborera de toute façon une nouvelle réforme d'ici 2026.
Le PLR ne parle mal de l'AVS que pour faire peur aux gens et les convaincre d'investir dans des produits de prévoyance privés. «C'est là que les assurances gagnent de l'argent», critique Mattea Meyer. La ligne dure adoptée par ledit parti en matière de prévoyance ou d'asile est une tentative de copier l'UDC selon la socialiste. Il est pourtant clair que «faire de l'imitation aide toujours l'original».
Vendredi, les jeunes libéraux-radicaux ont symboliquement enterré l'AVS sur la Place fédérale. On a eu l'impression que les initiateurs eux-mêmes ne croyaient plus à leur mesure de résurrection.