Un ex-Témoin de Jéovah après le massacre de Hambourg
«C'est vraiment horrible, ce qu'une telle secte peut faire aux gens»

L'auteur de la tuerie de Hambourg était un ancien membre des Témoins de Jéhovah. Comment a-t-il pu en arriver à de tels actes? Un ex-membre du mouvement explique à Blick ce que cela signifie de quitter le groupe, et comment certains pourraient complètement déraper.
Publié: 12.03.2023 à 08:54 heures
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Dernière mise à jour: 12.03.2023 à 10:38 heures
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Micha et Natalie Barth, de Lucerne, qui ont quitté les Témoins de Jéhovah
Photo: Celina Euchner
Luisa Ita

L'événement de jeudi soir a fait grand bruit. Lors d'un service religieux des Témoins de Jéovah à Hambourg, six personnes et le fœtus d'une femme enceinte ont été tués par balles et plusieurs ont été grièvement blessées. Le coupable: Philipp F.*, un ancien membre du mouvement à tendances sectaires** qui aurait quitté la communauté il y a un an et demi. Celui-ci s'est suicidé lorsque les forces de l'ordre sont arrivées sur place.

Micha Barth sait ce que cela signifie d'être exclu de la communauté religieuse. Il en était lui-même membre avec sa femme Natalie jusqu'en 2018. Et peut imaginer que le fait de quitter la secte a pu motiver le tireur à commettre l'irréparable.

«Si l'on veut quitter la secte, il faut le faire savoir aux anciens de l'assemblée. Ensuite, il faut réaffirmer en personne ou lors d'un appel téléphonique que l'on veut vraiment en sortir, explique l'homme. Une fois cela fait, la décision est annoncée à l'assemblée, et chaque membre sait alors ce qu'il doit faire: ne plus entretenir aucun contact avec la personne qui s'en va.»

«J'ai simplement suivi le mouvement»

Les Témoins de Jéhovah utiliseraient souvent et volontiers l'environnement social comme moyen de pression. Deux fois par semaine, des réunions auraient lieu au cours desquelles les membres seraient informés de leurs droits et devoirs.

Cela se fait par exemple par des lectures de la «Tour de Garde», le magazine de la communauté religieuse. «C'est un programme bien défini. Après l'étude de la 'Tour de Garde', il y a toujours une séance de questions-réponses et on nous explique encore une fois ce que l'organisation considère comme juste et ce qui est faux», poursuit Micha Barth.

Lui-même est né dans la secte. «Chez les Témoins de Jéhovah, il y a un Dieu, Jéhovah. L'organisation terrestre, gérée par huit personnes à New York, lui est directement subordonnée. Ils sont directement influencés par Dieu et définissent les enseignements et les principes», explique l'ancien membre. Il n'a jamais vraiment compris tout cela, mais: «Je ne voulais pas être un fardeau pour ma mère et ma grand-mère, car mon père a eu un accident – et c'est pourquoi j'ai simplement suivi le mouvement.»

L'isolement social comme moyen de pression

Aujourd'hui, Micha Barth ne peut que critiquer les règles strictes de l'organisation. «Par exemple, pas de sexe avant le mariage et pas de perfusion sanguine – même si l'on est menacé de mort ou s'il s'agit d'enfants. Il n'est pas non plus bien vu d'aller étudier: on devrait consacrer tout son temps à Dieu, et la secte considère les études comme une distraction.» De plus, les femmes n'ont pratiquement aucun droit dans la communauté, ce sont les hommes qui décident.

Les amitiés en dehors du groupe religieux ne sont pas non plus tolérées: «Et si l'on décide ensuite de quitter la secte, on est complètement exclu. Tout contact postérieur avec les gens que l'on a connus – même avec la famille – est tabou.»

Les membres appliquent cela à la lettre, raconte Micha Barth. «Ma femme n'a plus eu aucun contact avec sa famille jusqu'à aujourd'hui. Même lorsque sa mère est décédée l'année dernière.»

Un isolement social total

Le hic, c'est que «quand on est né dans la secte et qu'on n'a jamais eu d'amitiés en dehors, il est également difficile de nouer de nouveaux contacts sociaux.» On vit dans un isolement total. C'est précisément ce qui fait que de nombreuses personnes ayant quitté les Témoins de Jéovah y retournent, par solitude et désespoir.

«Je peux m'imaginer exactement la même chose avec le cas de Hambourg: lorsqu'un homme est exclu de l'organisation, qu'il n'a plus le droit de voir sa femme, ses enfants, ses amis et sa famille. De tels actes sont alors tout à fait envisageables, analyse Micha Barth. Ce qu'une telle secte peut faire aux gens est l'horreur absolue.»

*Nom d'emprunt

**Les Témoins de Jéhovah sont de manière générale décrits comme une organisation à dérives sectaires par les associations anti-sectes et par les sociologues. Mais il faut noter que ni la Confédération, ni aucun Canton suisse ne tiennent à jour une liste officielle de mouvements religieux qualifiés de sectes.

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