La tentative d'assassinat de Donald Trump samedi, lors d'un meeting en plein air, vient comme un révélateur des tensions politiques constantes qui traversent une société américaine à cran. Très peu de détails ont jusqu'ici filtré sur l'identité ou le mobile du tireur, qui a visé le candidat républicain lors d'une réunion de campagne en Pennsylvanie, le blessant à l'oreille droite.
Mais ses lieutenants ont immédiatement imputé la responsabilité de cette attaque au camp démocrate. «Depuis des années, et aujourd'hui encore, des militants de gauche, des donateurs démocrates, et même Joe Biden ont fait des remarques et des descriptions répugnantes sur le fait de tirer sur Donald Trump», a dénoncé Chris LaCivita, membre haut placé de l'équipe de campagne du candidat républicain, sur X. L'élu républicain Steve Scalise, victime en 2017 d'une fusillade qui a failli lui coûter la vie, a lui accusé les démocrates d'alimenter une «rhétorique incendiaire».
Trump contre les Mexicains «violeurs»
Depuis des années, le camp démocrate accuse pourtant bien Donald Trump d'avoir été l'instigateur d'un climat politique parfois irrespirable. Le président Joe Biden a lui-même maintes fois alerté contre le risque de «chaos». L'ancien président républicain a toujours fait de ses sorties incendiaires, volontiers provocatrices, une marque de fabrique.
Durant sa première campagne pour la Maison Blanche, il avait multiplié les diatribes contre les Mexicains «violeurs», et avait été accusé d'avoir attisé une haine violente contre les migrants. Le septuagénaire avait aussi été vivement critiqué après un fameux rassemblement d'extrême droite à Charlottesville, en 2017, lors duquel un sympathisant néonazi avait foncé en voiture dans une foule de contre-manifestants.
Trop complaisant avec l'extrême droite?
Le président républicain Donald Trump avait alors dénoncé des violences «des deux côtés», ce qui lui avait valu d'être accusé de complaisance envers l'extrême droite. Plus tard, le mouvement George Floyd a profondément divisé le pays, entre soutien aux policiers («Blue Lives Matter») ou aux Afro-Américains («Black Lives Matter»).
Et les images de ses sympathisant déchaînés dans le temple de la démocratie américaine le 6 janvier 2021, brandissant drapeaux Trump et confédérés, laissant sur les murs des graffitis appelant à tuer les journalistes, ont aussi laissé une trace indélébile sur son mandat.
Plusieurs personnes prises à partie par le républicain – du sénateur Mitt Romney à l'ancien conseiller de la Maison Blanche sur la pandémie de Covid-19 Anthony Fauci – ont toutes indiqué avoir dû renforcer leur sécurité rapprochée après des menaces de la part de partisans du milliardaire.
Aucune surprise
«Je ne serais pas surprise si un sénateur ou un élu se faisait tuer», avait même alerté la parlementaire républicaine Susan Collins en 2022. Ce, quelques semaines avant une attaque contre le mari de l'élue démocrate Nancy Pelosi, par un homme muni d'un marteau et qui cherchait en réalité la dirigeante américaine.
«En tant que personne dont la famille a été victime de violence politique, je sais mieux que personne qu'elle n'a aucune place dans notre société», a écrit cette dernière sur X samedi, disant «remercier Dieu que l'ancien président Trump soit sain et sauf». Les actes de violence contre les élus américains ne datent pas d'hier. En janvier 2011, la démocrate Gabby Giffords avait frôlé la mort après avoir reçu une balle dans la tête à bout portant lors d'une rencontre avec des administrés à Tucson.
Faire preuve d'empathie
Mais nombre d'experts s'accordent à dire qu'ils ont flambé avec l'arrivée de Donald Trump au pouvoir, en janvier 2017 – qu'il soit, ou non, responsable de ces actes. Selon la police du Capitole, chargée de protéger les élus du Congrès, les menaces contre ces derniers ont plus que doublé depuis l'investiture du milliardaire républicain.
Lors de la dernière présidentielle, certains agents électoraux avaient dit avoir constaté une hausse des menaces et intimidations. Pour Jill Stein, candidate du Parti vert à la présidentielle, «ce n'est pas le moment de faire porter le chapeau à une personne, elle-même victime de violence». «Mais cette affaire est en quelque sorte emblématique du problème que nous rencontrons en tant que société», confie-t-elle à l'AFP. Nous sommes dans des camps retranchés en ce moment, et nous devons faire preuve d'empathie en tant qu'êtres humains».