Kamala Harris peut battre Donald Trump le 5 novembre 2024. Cette seule phrase, il y a encore quelques heures, aurait semblé hypothétique, voire impossible. Elle est pourtant, ce 22 juillet, le slogan que vont entonner des dizaines de millions de partisans démocrates, tant sa nomination paraît probable après le passage de témoin de Joe Biden.
«Kamala Harris for the people»: tout est sans doute prêt pour transformer la vice-présidente des États-Unis en candidate, à commencer par les inévitables clips vidéo, inspirés de ceux diffusés pour la précédente campagne présidentielle, voici quatre ans. Avec une faille en ligne de mire: celle que constitue le comportement passé de Donald Trump, sur le plan personnel comme sur le plan des affaires.
Le duel à venir
Il faut avoir arpenté, comme je l’avais fait en 2020, les rues de Berkeley, la ville où Kamala Harris a grandi dans la communauté indienne dont sa mère Shyama Gopalan est originaire, pour comprendre le fil rouge de cette juriste réputée pour son intransigeance.
Kamala Harris a l’inconvénient, dans un pays fracturé dont le sort électoral va se jouer dans les États centraux et industriels de la «Rust belt» (la ceinture de rouille), de venir de Californie, où elle acheva sa carrière judiciaire comme procureure générale de cet État, sixième puissance économique mondiale. Mais elle a l’avantage d’avoir incarné la loi et la justice, ces deux valeurs constitutives de l’Amérique et malmenées par les puissances d’argent prêtes à tout, dont Donald Trump, ancien magnat de l’immobilier new-yorkais, est l’incarnation.
Berkeley contre Maga
Pourquoi parler de Berkeley à l’heure où tout le monde s’interroge sur le duel à venir entre un Trump proclamé «martyr» par sa tribu «Make America Great Again» (MAGA) depuis la tentative d’assassinat survenue en Pennsylvanie et Kamala Harris, handicapée par sa relative discrétion durant le mandat de Joe Biden? Parce que dans ce pays à la fois si fort et si déboussolé, la juriste californienne dont la peau est noire, mais les origines métissées (jamaïquaines et indiennes), peut à la fois incarner le refus de l’intolérance, le combat des femmes pour leurs libertés, les revendications des minorités et la nécessité de respecter la loi pour éviter le chaos. Et parce que Kamala Harris, contrairement à son adversaire, aura la force de la cohérence.
Peut-on croire un Trump qui a passé sa vie à spéculer et à faire le lit des plus grosses fortunes du pays lorsqu’il promet de défendre les humbles et les travailleurs? Peut-on croire Donald Trump lorsqu’il promet, sitôt élu, de régler en quelques coups de fils les principaux conflits de la planète?
Kamala Harris aura évidemment de la peine dans les quelques «swing states», ces États clés dont dépendra le scrutin du 4 novembre, parce qu’ils ne lui ressemblent pas. Mais penser que le candidat républicain l’emportera toujours à force d’exagérations, de poing levé, de promesses mirifiques et d’attaques contre l’État de droit serait une erreur.
Très loin d’avoir gagné
Kamala Harris est loin, très loin d’avoir gagné cette élection si cruciale pour l’Europe et pour le monde. Il lui faut d’abord s’assurer, avant d’engager le combat contre Trump, du soutien unanime du parti démocrate d’ici à la convention de Chicago, du 19 au 22 août. Elle dispose en revanche d’un «narratif» performant, enraciné dans les faits plus que dans les «fake news» chers à son adversaire. Et d’une chance: être capable de parler aux femmes, soit la moitié du corps électoral américain.
La vérité contre les mensonges: voilà, pour faire simple, le meilleur argument d’une vice-présidente qui, désormais, doit convaincre qu’elle peut être demain, une «Commander in chief» de la première puissance mondiale.