Le Bitcoin a vu son prix chuter jeudi à 25'424 dollars, soit 60% plus bas que son plus haut niveau historique en novembre dernier et un plus bas depuis fin 2020. «Les craintes sur l'inflation incessante et la fin soudaine de l'argent facile» en raison du resserrement monétaire de la banque centrale américaine (Réserve fédérale, Fed) «ont poussé les cryptomonnaies du haut de la falaise», commente Susannah Streeter, analyste chez Hargreaves Lansdown. Le bitcoin a commencé à dévisser avec la baisse des valeurs technologiques en Bourse, mais, comme souvent, les mouvements de ce marché non régulé et très volatil ont été encore plus marqués.
La cryptomonnaie rebondissait d'ailleurs au-dessus de 30'000 dollars vendredi, sans s'éloigner pour l'instant de son niveau de début 2021. Si une multitude de cryptomonnaies ont été créées depuis le lancement du bitcoin en 2009, ce dernier représente encore plus de 40% du marché total - qui a vu sa taille passer de 3000 milliards de dollars en novembre dernier à un peu moins de 1200 milliards de dollars ces jours-ci.
La chute continue?
Les autres grandes cryptomonnaies n'ont pas résisté au désintérêt des marchés. L'ethereum, deuxième plus importante cryptomonnaie en taille de marché, dont le réseau soutient toute une partie de l'économie des cryptoactifs, a vu son cours baisser de 33,5% sur les sept derniers jours, frôlant le seuil symbolique de 1700 dollars pour un ether. Le dogecoin, créé pour parodier les cryptomonnaies mais qui a notamment été dopé par l'intérêt du milliardaire Elon Musk, a perdu 41,9% de sa valeur sur les sept dernières séances.
Signe de l'ampleur du choc sur le marché des cryptomonnaies, des stablecoins, ces actifs dont les émetteurs garantissent une parité inviolable avec le dollar, ont vu leur cours évoluer. Les créateurs du stablecoin Terra (UST) affirmaient pouvoir fixer son cours au dollar, pas à l'aide de réserves mais en utilisant un algorithme complexe qui effectuerait continuellement des transactions avec une autre cryptomonnaie.
Mais la fonte du marché des cryptos a eu raison de l'expérience, et l'UST a vu son cours flancher à un plus bas de 43 cents. «L'effondrement potentiel» de ce stablecoin a «coupé l'appétit des investisseurs en crypto, avec des flux de liquidités qui deviennent négatifs», notaient les analystes de JP Morgan mercredi.
Selon la Fed, le marché des stablecoins représentait 180 milliards de dollars en mars 2022, dont 80% sur les trois principales: le Tether, l'USD Coin et le Binance USD, considérés comme les piliers du marché des cryptomonnaies. Les émetteurs de ces trois stablecoins garantissent posséder des réserves d'actifs ou de liquidités qui correspondent aux montants émis. Mais le choc des marchés a également affecté le Tether, quoique dans une moindre mesure que pour l'UST, son cours passant temporairement à 96 cents.
Pour certains, ce n'est pas anormal
L'envol du prix des cryptomonnaies fin 2020 avait été amorcé par l'adoption du bitcoin par le service de paiements en ligne Paypal. Depuis, le secteur, dopé par l'intérêt des grands noms de Wall Street et par un désir de s'intégrer aux grandes institutions financières, a semblé s'assagir.
L'une des plus grandes plateformes d'échanges, Coinbase, s'était ainsi introduite en Bourse à New York en avril 2021. La chute des prix a aussi entraîné son action à un plus bas historique mercredi (50,15 dollars, -65% sur un mois).
L'éditeur de logiciel MicroStrategy avait pour sa part décidé, sous la houlette de son patron Michael Saylor, d'investir sa trésorerie en bitcoin et d'emprunter pour en acheter encore plus. L'action du groupe a perdu 63% sur un mois à 165 dollars.
Certains professionnels du secteur cherchent cependant à relativiser la chute: par le passé, le bitcoin a en effet vu son cours redécoller, y compris après plusieurs années de vaches maigres. «Il n'y a rien d'anormal à voir des chutes brutales, il suffit de regarder les données historiques», affirme sur Twitter Nicolas Louvet, patron de Coinhouse, entreprise française qui ambitionne de devenir «la future cryptobanque européenne».
(AFP)