Boris Johnson a salué un «résultat convaincant» qui permet de «passer à autre chose». Deux ans et demi après sa victoire triomphante dans les urnes, le dirigeant de 57 ans, de plus en plus contesté, a encore démontré sa capacité à se sortir des situations les plus périlleuses.
Mais il reste enlisé dans l'affaire du «partygate», les fêtes très arrosées organisées à Downing Street pendant les confinements, et le vote de lundi a montré les divisions profondes au sein du parti conservateur. Il devrait laisser des traces.
Sur les 359 députés conservateurs ayant voté, 211 se sont prononcés en faveur de l'ancien maire de Londres, contre 148 qui souhaitaient l'évincer, un groupe considérable de frondeurs susceptibles de paralyser l'action du gouvernement.
Fin 2018, Theresa May avait survécu à une motion de défiance avec une marge plus large que son successeur, avant de démissionner quelques mois plus tard, trop fragilisée pour diriger. Boris Johnson a jusqu'à présent totalement refusé de démissionner.
Vote déclenché lundi matin
Après des semaines de spéculations, les événements se sont précipités lundi matin, à peine refermée la parenthèse festive des célébrations des 70 ans de règne d'Elizabeth II. Le président du comité 1922 du Parti conservateur, Graham Brady, a annoncé que le seuil fatidique de 54 lettres de députés, soit 15% du groupe parlementaire, demandant le départ de Boris Johnson, avait été atteint, déclenchant le vote.
En cas de défaite, une élection interne aurait été convoquée pour désigner un nouveau leader du parti, qui serait devenu chef du gouvernement, dans un contexte délicat de guerre en Ukraine et d'inflation au plus haut depuis 40 ans. Victorieux, il ne peut pas être visé par une autre motion de défiance pendant un an, selon les règles actuelles.
Plaidant sa cause devant ses troupes avant le vote, Boris Johnson les avait exhortés à mettre fin à une saga n'intéressant selon lui que les médias pour «parler exclusivement de ce que nous faisons pour les gens de ce pays», selon un responsable du Parti conservateur.
S'adressant à leur fibre thatchérienne, il avait fait miroiter baisses d'impôts et coupes dans l'administration, tranchant avec les interventions publiques massives de ces dernières années à la faveur de la pandémie, ou plus récemment de la crise du coût de la vie. «Le moment est venu de reconnaître que parfois le gouvernement ne peut pas tout», a-t-il martelé.
Colère du public
Ces explications, et les efforts déployés toute la journée par ses ministres les plus loyaux à la télévision, sont loin d'avoir convaincu tout le monde. Après l'ancien ministre Jeremy Hunt, considéré comme un possible successeur, le chef des conservateurs en Ecosse Douglas Ross avait annoncé qu'il voterait contre Boris Johnson, invoquant la «colère» du public concernant les violations des règles sur le Covid.
Malgré l'accumulation des scandales et la colère du public et de sa majorité, Boris Johnson s'est maintenu ces derniers mois en mettant notamment en avant son rôle moteur dans la réponse occidentale à l'invasion russe de l'Ukraine.
Il a aussi été favorisé par l'absence de successeur évident dans les rangs des conservateurs, au pouvoir depuis 12 ans au Royaume-Uni, surtout depuis que l'étoile du ministre des Finances Rishi Sunak, longtemps le chouchou du parti, s'est brusquement ternie en raison de sa fortune et des arrangements fiscaux de sa femme, en période de hausse du coût de la vie.
Le «partygate» n'est pas fini
L'effondrement de la popularité de Boris Johnson a déjà infligé de lourds revers aux conservateurs à des élections locales début mai. La majorité doute de plus en plus de la capacité de «BoJo», hué par la foule pendant les célébrations du jubilé de la reine, à remporter les législatives de 2024.
Longtemps un atout, sa personnalité fantasque, souvent désinvolte, agace désormais bien des Britanniques. Selon un sondage publié lundi par YouGov, 60% des Britanniques voulaient que les conservateurs évincent leur leader - mais seulement 32% des électeurs de la majorité.
Les répercussions du «partygate» ne sont en outre pas finies. Après la police et la haute-fonctionnaire Sue Gray, une autre enquête est prévue, celle-ci parlementaire. Si cette dernière conclut, a priori à l'automne, que Boris Johnson a trompé la Chambre des Communes en affirmant ne pas avoir enfreint les règles, il est censé démissionner.
(ATS)