La problématique croissante des coûts de la santé semble persistante, avec des traitements toujours plus nombreux, des médicaments plus chers et des primes d'assurance maladie en constante augmentation. Malheureusement, le Parlement adopte souvent une politique d'évitement face à cette situation. La semaine dernière, par exemple, le Conseil des États a contrecarré l'initiative du Parti socialiste visant à alléger les primes en proposant une solution alternative. Il en a été de même pour l'initiative du parti centriste sur le frein aux coûts. Le moyen de résoudre cette énigme complexe reste l'un des plus grands défis pour les décideurs de la Berne fédérale.
Un réseau de soins coordonnés: le Réseau de l'Arc
Cependant, dans le Jura bernois, l'hôpital de Moutier a récemment franchi une étape importante. L'année prochaine, le groupe Swiss Medical Network a l'intention de démontrer qu'il est possible d'avoir un système de santé efficace, de haute qualité et moins coûteux. Pour y parvenir, les prestataires de soins de santé de la région de l'Arc jurassien se sont regroupés en un réseau appelé le Réseau de l'Arc. À partir du 1er janvier 2024, un seul organisme, coordonné par une seule organisation, fournira les soins médicaux de base, les prestations hospitalières et les soins aux personnes âgées. Selon Alexandre Omont, directeur du Réseau de l'Arc, cela va tout changer.
Selon lui, le système actuel souffre de mauvaises incitations. Par exemple, des examens sont parfois répétés à l'hôpital pour des raisons financières, alors qu'un médecin de famille les a déjà effectués auparavant. De plus, le flux d'informations entre les prestataires de soins est souvent bloqué en raison de l'utilisation de différents systèmes, et dans certains cas, des faxes sont même encore utilisés pour transmettre les données. Dans ce système, ce n'est pas toujours le patient qui est au centre des préoccupations, mais plutôt le profit.
La prévention joue un rôle essentiel dans le nouveau système du Réseau de l'Arc. Alexandre Omont déclare: «Celui qui est en bonne santé ne coûte rien.» Une récente enquête menée dans l'Arc jurassien a révélé que seulement 40% des femmes pour lesquelles un dépistage du cancer du sein était recommandé avaient effectivement réalisé cet examen. Dans le Réseau de l'Arc, des professionnels formés accompagneront étroitement les membres et les informeront par téléphone des examens importants à venir, offrant ainsi une approche proactive.
Inspiré par le modèle de Kaiser Permanente
Le canton de Berne et l'assureur-maladie Visana se sont également associés au Réseau de l'Arc. Leur nouvelle assurance, «Viva», est actuellement examinée par l'Office fédéral de la santé publique (OFSP). Ce produit fonctionnera selon un modèle alternatif d'assurance de base. Cela signifie que les personnes qui choisissent les soins intégrés le feront pour une durée d'un an. Si elles ne sont pas satisfaites du service, elles peuvent simplement changer de prestataire comme avant. En termes de prix, cette assurance vise à rivaliser avec les cinq offres les moins chères sur le marché.
Alain Kenfak, médecin à l'hôpital de Moutier et directeur médical du réseau, est déjà convaincu par cette nouvelle approche. Il explique: «Aujourd'hui, nous ne connaissons pas véritablement nos patients. Si une personne est en bonne santé, nous n'avons pas de contact avec elle.» Selon lui, cela rend la prévention plus difficile. Dans le Réseau de l'Arc, les membres ne se voient pas simplement offrir des réductions sur les abonnements aux centres de fitness. Grâce à une meilleure connaissance des individus, des programmes de prévention personnalisés peuvent être recommandés. Par exemple, les personnes ayant de mauvaises habitudes alimentaires pourraient être encouragées à suivre un programme de coaching à la clinique, et des experts seraient disponibles sur place pour aider ceux qui souhaitent arrêter de fumer.
En confiant les tâches de planification, de coordination et d'accompagnement à une organisation centralisée, les médecins disposeront de plus de temps pour se consacrer à leurs traitements. Actuellement, ils consacrent jusqu'à 40% de leur temps de travail aux tâches administratives. Alain Kenfak souligne qu'il serait beaucoup plus logique de déléguer ces tâches à des experts spécialisés.
Antoine Hubert, membre du conseil d'administration de Swiss Medical Network, s'est inspiré du modèle de Kaiser Permanente aux États-Unis pour créer le Réseau de l'Arc. Bien que le système de santé américain ne soit pas réputé pour sa performance, Kaiser Permanente démontre depuis des décennies que les soins intégrés sont rentables pour les patients et les prestataires de soins. Cette organisation compte 12,6 millions de membres et offre l'accès à 39 hôpitaux. En comparaison, les 8,7 millions de personnes en Suisse ont accès à 276 hôpitaux et près de 1,4 million d'hospitalisations sont enregistrées chaque année, soit près de dix fois plus. Des études ont montré que les personnes assurées auprès de Kaiser Permanente vivent en moyenne six ans de plus que le reste de la population. Antoine Hubert affirme: «Il est de notre responsabilité, en tant que prestataires de soins et assureurs, de trouver une alternative au système actuel, qui est voué à l'échec.»
Reconnaissance de l'importance des soins intégrés
Même la Confédération a reconnu que les soins intégrés peuvent offrir des solutions pour lutter contre la hausse des coûts de la santé. Dans le cadre de son paquet de mesures de maîtrise des coûts 2, actuellement examiné par les commissions parlementaires de la santé, la mise en place d'un réseau de soins coordonnés est explicitement prévue comme un nouveau fournisseur de soins. Dans son message de septembre 2022, le Conseil fédéral écrit: «Dans un réseau de soins coordonnés, des professionnels de la santé de différentes spécialités se regroupent sous la direction d'un médecin afin de fournir des soins médicaux adaptés aux besoins des patients, provenant d'une seule source.»
Cependant, une large alliance de professionnels de la santé s'oppose à ces plans. Dans un éditorial publié dans le «Bulletin des médecins suisses», la présidente de la FMH (Fédération des médecins suisses), Yvonne Gilli, déclare: «Cette approche ne fonctionnera pas. Il est inutile de monter sur un cheval mort.» Selon elle, il n'est pas clair pourquoi les assurés qui évitent les modèles d'assurance alternatifs devraient ensuite se rendre chez ce nouveau fournisseur de soins qui n'offre même pas de réduction sur les primes. Toutefois, la critique ne s'adresse pas aux initiatives telles que le Réseau de l'Arc, confirme Yvonne Gilli. Elle déclare: «Nous sommes au contraire ouverts à de tels modèles.» Cependant, la FMH s'oppose à une «micro-réglementation» de la Confédération. L'exemple du Jura montre que des modèles de soins intégrés se développent même sans de nouvelles lois. «Si le gouvernement impose des structures trop rigides, il n'y aura plus d'innovation possible.»
Adapter le modèle américain à la réalité suisse
En ce qui concerne le Réseau de l'Arc, Yvonne Gilli souligne qu'il est illusoire de penser que l'on peut simplement appliquer un système américain aux conditions locales, qui sont façonnées par l'histoire et la culture. Notre pays est petit et les différentes régions ont besoin de systèmes qui tiennent compte de leurs particularités, affirme-t-elle, en tant que médecin et ancienne députée nationale des Verts.
La politicienne de la santé Martina Bircher ne voit pas non plus la nécessité d'une plus grande réglementation gouvernementale. La conseillère nationale de l'UDC (Union démocratique du centre) déclare: «La réalité a rattrapé le ministre de la santé Alain Berset.» Des modèles tels que le Réseau de l'Arc en sont une illustration exemplaire. De nouvelles réglementations étoufferaient le système et entraveraient son développement. «Les intentions de la Confédération peuvent être louables, mais à la fin, elles font plus de mal que de bien.»
Dans le Jura, on est convaincu que ce travail pionnier en vaut la peine et qu'il finira par s'étendre à l'ensemble de la Suisse. Antoine Hubert affirme: «Les systèmes entièrement intégrés offrent une meilleure qualité de soins et une plus grande efficacité, et donc des coûts moindres.»