La crainte d'une escalade militaire aux portes de l'Union européenne est à son paroxysme depuis que le président russe a reconnu lundi l'indépendance de deux territoires séparatistes prorusses dans l'est de l'Ukraine, les «républiques» autoproclamées de Donetsk et Lougansk.
Pour le président américain Joe Biden, le feu vert mardi du Parlement russe à une opération militaire en Ukraine est «le début d'une invasion» du pays. Londres juge pour sa part «hautement probable que (M. Poutine) mène à bien son projet d'une invasion totale de l'Ukraine» et qu'il prenne la capitale Kiev.
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Pour le président russe, «les intérêts et la sécurité de nos citoyens sont pour nous non négociables». Dans un bref discours télévisé aux militaires à l'occasion de la Journée du défenseur de la Patrie, il a promis mercredi de continuer à renforcer l'armée russe.
«Ouvert à un dialogue directe et honnête»
Affirmant être «ouvert à un dialogue directe et honnête» avec les Occidentaux pour «trouver des solutions diplomatiques aux problèmes les plus complexes», le président russe a jugé qu'ils se montraient inflexibles en laissant ses demandes «sans réponse».
La Russie, accusée d'avoir massé 150'000 soldats aux frontières ukrainiennes en vue d'une invasion de son voisin pro-occidental, réclame la promesse que l'Ukraine n'intègrera jamais l'Otan et, depuis mardi soir, une «démilitarisation» du pays ainsi que des concessions territoriales aux séparatistes.
Se réservant le droit d'envoyer des troupes dans l'est de l'Ukraine, après l'accord formel des parlementaires, Vladimir Poutine a revendiqué l'ensemble des régions de Lougansk et de Donetsk, alors que les rebelles n'en contrôlent actuellement qu'un tiers. Il a évoqué d'hypothétiques «négociations» entre Kiev et forces prorusses.
Si Vladimir Poutine a laissé planer le doute sur le calendrier de l'envoi de troupes dans l'Est, l'intervention russe y serait justifiée légalement par la ratification mardi d'accords d'entraide avec les sécessionnistes, notamment au plan militaire.
Malgré les intentions affichées de Moscou, Joe Biden a estimé qu'il «est encore temps d'éviter le pire» en Ukraine, tout en dénonçant «le début d'une invasion». Le secrétaire général de l'Otan, Jens Stoltenberg, a dit s'attendre à une «attaque massive» russe en Ukraine.
Les Occidentaux ont pris de premières sanctions en réaction à la reconnaissance des séparatistes que Kiev combat depuis huit ans, un conflit qui a fait plus de 14'000 morts. L'Union européenne a notamment décidé des mesures ciblées, notamment contre les députés russes qui ont voté la reconnaissance, et des mesures financières contre des banques russes.
Ce premier paquet de sanctions va entrer en vigueur «dès ce soir probablement ou demain au maximum», a indiqué mercredi le secrétaire d'Etat français aux affaires européennes Clément Beaune sur France Inter.
L'Allemagne a de son côté gelé le gigantesque projet de gazoduc Nord Stream II, qui devait acheminer encore davantage de gaz russe en Allemagne. Et Joe Biden a annoncé une «première tranche» de sanctions visant à empêcher Moscou de lever des fonds occidentaux pour rembourser sa dette souveraine.
Mesures modestes
Des sanctions ont également été annoncées par le Japon, l'Australie, le Canada et la Grande-Bretagne. Ces mesures restent pour l'instant modestes par rapport à celles promises en cas d'invasion d'ampleur.
Le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken a annoncé qu'il ne rencontrerait pas comme prévu son homologue russe Sergueï Lavrov, tout comme son homologue français, Jean-Yves Le Drian qui a annulé son entretien prévu à Paris.
L'Ukraine, qui a réclamé mardi des «armes» et des garanties sur son adhésion à l'UE, a appelé mercredi ses ressortissants à quitter «immédiatement» la Russie.
Sur le front dans l'Est de l'Ukraine, les séparatistes de Lougansk ont annoncé mercredi la mort d'un combattant, abattu selon eux par un sniper ukrainien. Un civil a aussi été tué dans des bombardements pendant la nuit, selon les rebelles.
(ATS)