Le National a refusé jeudi, par 121 voix contre 64, la mise en oeuvre de l'initiative sur l'interdiction de la publicité sur le tabac. Il avait au préalable allégé l'interdiction pour la presse écrite. Le résultat n'a convaincu ni l'UDC, ni la gauche. Cela correspond à un refus d'entrer en matière, a précisé le président du National Eric Nussbaumer (PS/BL). Le dossier retourne au Conseil des Etats.
En 2022, le peuple a accepté par 56,6% l'initiative «Enfants et jeunes sans publicité pour le tabac», qui demande que «toute forme de publicité pour le tabac accessible aux enfants soit interdite». La révision de loi concrétise ce texte. Elle vise la presse écrite, les manifestations ouvertes aux jeunes et le parrainage.
En Suisse, un quart de la population fume, dont la moitié a commencé avant 18 ans. Près de 1000 personnes meurent des conséquences du tabac chaque année. La ministre de la santé Elisabeth Baume-Schneider a rappelé que cela coûte environ 3 milliards de francs par an à l'assurance maladie et 900 millions en allocations pour perte de gain. Les restrictions de la publicité sont efficaces pour réduire la consommation de tabac et de nicotine dans la population, a indiqué Cyril Aellen (PLR/GE) au nom de la commission. Aujourd'hui, la Suisse est à l'avant-dernière place du classement des mesures de prévention, a précisé Mme Baume-Schneider.
Passe d'armes
Le débat a donné lieu à une passe d'armes entre la gauche et la droite. La gauche a soutenu la version du Conseil des Etats et donc le texte de l'initiative. Léonore Porchet (Vert-e-s/VD) a rappelé que «l'industrie du tabac, qui finance les partis de droite, a un grand intérêt» à réduire la portée de l'initiative et la volonté populaire.
«Aucun parent ne veut que son enfant fume. Mais il a comme adversaire l'industrie du tabac qui tue ses clients et qui doit toujours trouver d’autres clients, si possible jeunes». Cette industrie déploie d'importants moyens pour les toucher, notamment sur les paquets de cigarettes, dans les événements où sont les jeunes.
L'UDC est montée au créneau. «À la crèche, les enfants peuvent voir des vidéos avec des drag-queens et des LGBT+, mais ils ne devraient pas voir de publicité sur la cigarette», s'est étonné Andreas Glarner (UDC/AG). Et de critiquer la gauche qui veut autoriser la consommation de cannabis pour les jeunes, mais interdire toute vision de cigarettes.
Presse écrite
Pour le PLR aussi, le projet du Conseil fédéral va trop loin. Au centre, on a prôné la mesure. «Ce qui est interdit a un certain attrait», a lancé Thomas Rechsteiner (C/AI). Seuls ces partis, avec le PVL, ont soutenu le projet au vote sur l'ensemble.
Avant de refuser le projet, le National l'avait affaibli. Par 99 voix contre 91, il avait notamment introduit une exception pour la presse écrite. Les publicités doivent être autorisées à l'intérieur des publications vendues en majorité via des abonnements et dont le lectorat est composé d'au moins 95% d'adultes.
«On ne change presque rien à la situation actuelle», a critiqué Mme Baume-Schneider. «Cela n'interdirait la publicité que dans une douzaine de publications, mais pas dans le Matin Dimanche par exemple, lu par des milliers de jeunes chaque semaine.»
Parrainage et promotion
Le National avait également élargi les autorisations pour les lieux accessibles au public pouvant être fréquentés par des mineurs. La publicité doit pouvoir être autorisée à condition qu'elle ne soit ni visible, ni accessible aux mineurs.
La gauche s'est alliée au Centre pour maintenir l'interdiction des indications de parrainage et de promotion. La décision a été prise grâce à la voix du président du Conseil.
Contrairement aux sénateurs, les députés avaient aussi décidé que la promotion directe et personnelle des cigares et cigarillos ne soit autorisée que dans des lieux auxquels les mineurs n'ont pas accès.
(ATS)