La justice groenlandaise se prononce mercredi sur le maintien en détention du militant écologiste Paul Watson, dans l'attente de la décision du gouvernement danois sur la demande d'extradition du Japon pour une affaire liée à son combat contre la chasse à la baleine.L'audience, la quatrième depuis son arrestation en juillet, débutera à 09h00 (midi heure suisse) à Nuuk, capitale du territoire autonome danois, et durera environ une heure.
«Evidemment, nous allons demander sa libération immédiate, mais malheureusement, il est réaliste de penser que cela ne se produira pas», a dit à l'AFP son avocate Julie Stage. «Nous considérons que les critères pour le priver de liberté ne sont pas remplis», a-t-elle souligné.
Extradition réclamée par le Japon
Parallèlement, l'avocate va aussi faire appel devant la Cour suprême du Danemark de la précédente décision de la justice groenlandaise concernant le maintien en détention de l'Américano-canadien de 73 ans. Fondateur de Sea Shepherd et de la fondation en faveur des océans qui porte son nom, Paul Watson a été arrêté le 21 juillet alors qu'il était en route avec son navire, le John Paul DeJoria, pour intercepter un navire-usine baleinier nippon.
Le Japon réclame depuis 2012 son extradition, l'accusant, selon ses soutiens, d'«obstruction à une activité commerciale» mais aussi d'être co-responsable de dommages et blessures lors de heurts avec un baleinier nippon dans l'océan Antarctique en 2010. Cette demande relève de «l'application de la loi» plutôt que de la pêche à la baleine, a déclaré début octobre le ministre nippon des Affaires étrangères Takeshi Iwaya.
Poursuivi pour des blessures
Dans le détail, Paul Watson est poursuivi pour des blessures qui, selon l'accusation, auraient été infligées le 11 février 2010 à un marin du Shonan Maru 2 par une puissante boule puante contenant de l'acide butyrique, et pour l'abordage du même navire quatre jours plus tard.
L'audience de mercredi ne portera que sur la question de la détention provisoire du militant. La décision d'extradition revient au ministère danois de la Justice, qui examine toujours le dossier.
En attente de la décision danoise
«La police du Groenland a récemment envoyé, à la suite de son enquête, une évaluation de l'affaire au procureur général, qui émettra aussi un avis», a indiqué dans un message à l'AFP le ministère. Une fois ces deux évaluations transmises au ministère danois de la Justice, une décision sera prise, a-t-il ajouté, sans donner de calendrier.
Mi-septembre, les avocats du septuagénaire ont saisi le Rapporteur spécial des Nations unies sur les défenseurs de l'environnement, dénonçant notamment le risque qu'il encourt de «subir (d)es traitements inhumains (...) dans les geôles japonaises». Paul Watson a demandé mercredi 16 octobre l'asile politique à la France dans une lettre manuscrite envoyée au président Emmanuel Macron.
Macron suit «la situation de près»
La position de la France à ce sujet n'est «pas tranchée», a déclaré le lendemain la porte-parole du gouvernement, Maud Bregeon. Cette demande soulève des problèmes de droit et elle est donc largement symbolique. «En principe, une demande d'asile ne peut être faite que sur le sol du pays dans lequel cette demande est faite», a observé sur une radio publique le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot.
Dès le 23 juillet, la présidence française avait indiqué qu'Emmanuel Macron suivait «la situation de près» et intervenait «auprès des autorités danoises» pour éviter son extradition vers le Japon. Les déboires judiciaires de Paul Watson ont suscité le soutien d'une partie de l'opinion publique et d'autres militants.
«Sauvez les baleines n'est pas un crime»
Mercredi, au moment où la justice groenlandaise se prononce sur le maintien en détention du militant, quelques dizaines de manifestants s'étaient rassemblés devant l'Hôtel de ville de Paris, scandant «Libérez Paul Watson», munis de pancartes «un héros n'a pas sa place en prison», ou «saving whales is not a crime» ("sauver les baleines n'est pas un crime"). «C'est le moins qu'on puisse faire, se bouger pour Paul», a déclaré à l'AFP Vanessa Vukicevic. Cette styliste de 49 ans a fait le voyage depuis le sud de la France (Castillon du Gard), mais «sans grande conviction» quant à sa libération, «je pense pas que ce soit pour aujourd'hui».
Engagée pour la protection de tous les animaux, Jane Goodall a par exemple appelé le président français à agir en faveur de l'Américano-canadien. «J'espère sincèrement que le président Macron accordera l'asile à Paul Watson», a-t-elle déclaré à l'AFP. Le Japon est, avec la Norvège et l'Islande, l'un des trois derniers pays au monde à pratiquer la chasse commerciale à la baleine.