A quelques heures d'intervalle, les insurgés ont pris le contrôle de Kunduz, à 300 km au nord de Kaboul, qu'ils encerclaient depuis quelques semaines, et de Sar-e-Pul, 400 km plus à l'ouest. «Kunduz est tombée. Les talibans ont pris le contrôle de tous les bâtiments clés de la ville», a affirmé un correspondant de l'AFP sur place.
La ville, déjà tombée deux fois ces dernières années aux mains des insurgés, en 2015 et 2016, est un carrefour stratégique du nord de l'Afghanistan, entre Kaboul et le Tadjikistan.
La prise de Kunduz constitue le principal succès militaire des talibans depuis le début de leur offensive en mai, lancée à la faveur du retrait des forces internationales, qui doit être complètement achevé d'ici le 31 août. Après s'être emparés de vastes territoires ruraux sans rencontrer beaucoup de résistance, ils concentrent leurs efforts depuis le début août sur les grandes villes, encerclant plusieurs capitales provinciales.
«Les talibans ont atteint la place centrale de Kunduz, ils sont bombardés par l'aviation», a affirmé Abdul Aziz, un résident du centre de Kunduz. «C'est le chaos total», a-t-il ajouté, joint par téléphone par l'AFP.
Axe névralgique
Fin juin, les talibans avaient pris le contrôle des districts enserrant Kunduz et de l'important poste-frontière de Shir Khan Bandar, frontalier du Tadjikistan, un axe névralgique pour les relations économiques avec l'Asie centrale.
Parwina Azimi, une activiste des droits humains, a affirmé à l'AFP par téléphone que les responsables administratifs et le reste des forces armées s'étaient retirés vers des baraquements à environ trois kilomètres de Kunduz.
Le ministère de la Défense a affirmé que les troupes gouvernementales tentaient de reprendre des zones clés de la ville. «Les forces commandos ont lancé une opération de nettoyage. Certains endroits, dont la radio nationale et les bâtiments la télévision, ont été dégagés», a-t-il affirmé.
Place forte anti-talibans
Après Kunduz, Sar-e-Pul, à 600 km à l'ouest de Kaboul, est aussi tombée aux mains des talibans. Ceux-ci s'étaient déjà emparés samedi de Sheberghan, à 50 km plus au nord, fief du célèbre chef de guerre Abdul Rashid Dostom. «Les talibans ont encerclé un bataillon de l'armée en périphérie de la ville. Toutes les autres parties de la ville sous le contrôle des talibans», a déclaré Mohammad Hussein Mujahidzada, un membre du Conseil de la province de Sar-e-Pul.
L'incapacité de Kaboul à tenir le Nord du pays pourrait s'avérer cruciale pour les chances de survie du gouvernement. Le nord de l'Afghanistan a toujours été considéré comme une place forte anti-talibans, où la résistance à leur encontre avait été plus forte lors de leur accession au pouvoir dans les années 1990.
Les talibans ont dirigé le pays entre 1996 et 2001, en imposant leur version ultra-rigoriste de la loi islamique, avant d'être chassés par une coalition internationale menée par les États-Unis, pour leur refus de livrer Oussama ben Laden, dans la foulée des attentats du 11 septembre.
Rapidité de l'avancée
Vendredi, les insurgés avaient aussi saisi, sans rencontrer la moindre résistance, la ville de Zaranj, capitale de la lointaine province de Nimroz (sud-ouest), à la frontière avec l'Iran. Kandahar (sud) et Hérat (ouest), deuxième et troisième villes du pays, sont aussi soumises à leur assaut depuis plusieurs jours, tout comme Lashkar Gah (sud), capitale de la province du Helmand, un des bastions des insurgés.
La rapidité de l'avancée talibane a pris par surprise les observateurs mais aussi les forces de sécurité afghanes, malgré l'aide reçue de l'armée de l'air américaine, qui a notamment bombardé les positions talibanes samedi à Sheberghan.
Les États-Unis ont intensifié leurs frappes aériennes, a reconnu le commandant Nicole Ferrara, porte-parole du Commandement central de l'armée américaine, qui a déclaré samedi à l'AFP : «Les forces américaines ont procédé ces derniers jours à plusieurs frappes aériennes pour défendre nos partenaires afghans».
Le gouvernement afghan n'a pas réagi à la perte de ces capitales provinciales, sinon pour s'engager à les reprendre rapidement. Mais il avait fait la même promesse pour les nombreux districts ruraux et postes-frontières tombés depuis mai, sans résultat tangible.