Une France sans perspective claire
Emmanuel Macron écoute tout le monde mais ne lâche rien

Les grandes consultations politiques promises ont-elles permis d'avancer? La France restait vendredi sans perspective claire d'un gouvernement, après une journée d'entretiens entre Emmanuel Macron et les principales forces politiques du pays.
Publié: 23.08.2024 à 20:33 heures
La France restait vendredi sans perspective claire d'un gouvernement, après une journée d'entretiens entre Emmanuel Macron et les principales forces politiques du pays.
Photo: keystone-sda.ch
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ATS Agence télégraphique suisse

Le président français a reçu tour à tour le Nouveau front populaire (NFP, alliance des gauches), son propre camp, puis la droite traditionnelle afin de sortir le pays de l'impasse politique dans laquelle il est englué. Et les déclarations des uns et des autres laissaient sous-entendre un dialogue de sourds entre la gauche et le centre. Le troisième bloc (l'extrême-droite) ne sera reçu que lundi mais a déjà exclu sa participation à une coalition, à laquelle de fait personne ne l'invite.

Une «solution institutionnellement stable»

Les législatives anticipées – que le chef de l'Etat avait convoqué après l'échec cuisant du parti présidentiel aux européennes de début juin – ont envoyé un «message d'alternance» au camp présidentiel, sans pour autant constituer un «désaveu complet», a ainsi estimé Macron devant ses soutiens, selon des participants.

A la recherche d'une «solution institutionnellement stable», il s'est enquis des intentions de ses invités en cas de gouvernement comprenant des ministres de La France insoumise (LFI, gauche radicale), l'épouvantail au sein du NFP.

Or tous ont fait valoir qu'ils censureraient un tel gouvernement. «On fera le constat que la solution proposée (par la gauche) ne répond pas à l'idée d'un gouvernement stable et sûr», a expliqué une source du camp présidentiel, qui relève que le Rassemblement national (RN, extrême-droite) est dans le même état d'esprit. Peu après, la droite traditionnelle enfonçait le clou. Ses députés voteraient «immédiatement une motion de censure» contre un gouvernement comprenant des ministres LFI, a assuré une de ses figures.

«Assez perdu de temps»

Vendredi matin, Lucie Castets, candidate du NFP pour être cheffe du gouvernement, et ses partenaires (gauche radicale, socialistes, écologistes et communistes), sortis des législatives anticipées avec le plus grand nombre de députés, avaient été les premiers à être reçus par le président. Le chef de l'Etat est «lucide» sur le «souhait d'un changement d'orientation politique», a salué Lucie Castets, une haute-fonctionnaire de 37 ans inconnue du grand public il y a encore quelques semaines.

«Assez perdu de temps», a-t-elle pour autant martelé, soulignant «l'importance de respecter le résultat des élections et de sortir le pays de la paralysie», et jugeant ses alliés «prêts» à «chercher des compromis en l'absence de majorité absolue». «La tentation semble encore présente pour le président de composer son gouvernement», a-t-elle regretté.

Démissionnaire, le gouvernement sortant du Premier ministre Gabriel Attal gère les affaires courantes du pays depuis maintenant 38 jours, un record depuis l'après-guerre, alors qu'approchent de cruciales échéances budgétaires. Et les forces politiques du pays pressent le président de désigner enfin un Premier ministre issu du dernier scrutin, ironisant sur le «procrastinateur» ou le «Gaulois réfractaire» et son «comportement d'autocrate».

«Que de la communication»

Difficile, vendredi soir, de voir où les lignes ont bougé au terme de ces entretiens. L'Assemblée nationale demeure une synthèse impossible des contraires entre la gauche (193 députés), les macronistes et la droite républicaine (166) et l'extrême-droite (142), pour une majorité de 289 sièges plus que jamais introuvable.

Le président semble toujours vouloir composer un gouvernement au centre qui permettrait à ses troupes de rester aux responsabilités. Des noms d'anciens ministres ont même circulé, de la droite traditionnelle modérée jusqu'au centre-gauche. Ces joutes politiques, entamées avant les JO, ont repris de plus belle alors que la France doit accoucher, au 1er octobre, d'un budget pour 2025.

«Il a déjà un nom, c'est que de la communication»

Reste à décider avec quel projet. La gauche promet une politique de rupture, avec notamment l'augmentation du salaire minimum et l'abrogation de la très impopulaire réforme des retraites. Mais Gabriel Attal, resté en poste depuis six semaines pour expédier les affaires courantes, a déjà envoyé les lettres plafonds octroyant leurs crédits aux ministères. «Pur scandale», «coup de force», a vociféré le NFP.

Simultanément, les forces de gauche organisaient – séparément – leurs séminaires de rentrée. Avec un certain pessimisme. «Je ne pense pas qu'Emmanuel Macron nommera quelqu'un de notre bord. (...) Il a déjà un nom (...) c'est que de la communication», jugeait Fabienne Meurice, militante écologiste de 48 ans. S'il nomme Lucie Castets, «ça sera pour essayer de montrer qu'elle est incompétente», estime de son côté Maud, libraire de 31 ans, aux journées d'été de la gauche radicale.

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