Une démocratie qui vacille
L'Amérique s'enfonce toujours un peu plus dans le chaos

Joe Biden peut trembler: l'ex-président Donald Trump espère le soutien de la Cour suprême pour les élections de 2024. Les Etats-Unis se dirigent vers une phase qui sera certainement chaotique.
Publié: 07.07.2022 à 06:06 heures
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Dernière mise à jour: 07.07.2022 à 09:14 heures
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Six des neuf juges de la Cour suprême votent actuellement de manière strictement conservatrice.
Photo: AFP
Samuel Schumacher

Des centaines de personnes fêtaient l’indépendance des Etats-Unis à Highland Park, dans la banlieue de Chicago, lorsque des coups de feu ont retenti. Six personnes ont perdu la vie et 36 autres ont été blessées, dont plusieurs enfants, ce 4 juillet.

Le président américain Joe Biden a immédiatement appelé la nation à l’unité. Dans un discours prononcé à l’occasion de la fête nationale américaine, il a déclaré que le pays était en «lutte permanente pour l’âme de l’Amérique». La lutte, c’est bien le mot. Car le pays se dirige de plus en plus vers des situations chaotiques face auxquelles le président reste presque impuissant. Entre interdiction de l’avortement, fusillades et crises sociales, les problèmes s’aggravent. Tout cela sans compter que l’ancien président Donald Trump caresse l’idée de revenir à la Maison Blanche.

L’aide de la Cour suprême

Sans détour, la présentatrice de télévision russe Olga Skabeeva a déclaré en début de semaine lors d’une émission en direct: «Nous devons nous demander si nous voulons vraiment réinstaller Trump à la présidence des Etats-Unis.»

Selon les services secrets américains, il est clair depuis longtemps que Donald Trump a bénéficié de l’aide des hackers et des studios de propagande du Kremlin pour décrocher son élection en 2016.

S’il se présente effectivement une nouvelle fois en 2024, il peut espérer une autre aide que celle de la Russie: celle de la Cour suprême des Etats-Unis. Elle pourrait éventuellement lui ouvrir la voie vers un retour à la Maison Blanche.

Les juges se penchent sur la loi électorale

En automne, les neuf juges nommés à vie se prononceront en effet sur «l’affaire Moore vs. Harper», ce qui pourrait faire définitivement vaciller l’Etat américain. Car si cette affaire passe devant la Cour suprême, la démocratie la plus puissante du monde serait de fait chamboulée.

Remettant en question le principe de «gerrymandering», le dossier risque de forcer les tribunaux des différents Etats à ne plus pouvoir s’immiscer dans les affaires électorales. Par exemple lorsque le parlement local veut, pour des raisons politiques, redécouper des circonscriptions électorales, modifier les lois électorales ou restreindre le droit de vote de certains groupes sociaux.

L’importance du contrôle judiciaire sur ces questions électorales pour la survie de la démocratie américaine est apparue au lendemain des dernières élections américaines. Pas moins de 62 procédures judiciaires ont été lancées par Trump, candidat déchu, afin de mettre au jour des cas de fraude électorale présumée de la part des démocrates. 61 de ces affaires ont été rejetées. Sans l’intervention des tribunaux, la fable de Trump sur les «élections volées» aurait sans doute fait mouche dans l’un ou l’autre parlement local, avec des conséquences potentiellement désastreuses pour la démocratie américaine.

Avortement, lois sur les armes à feu et pollution

La majorité conservatrice de la Cour suprême, composée de neuf membres, semble actuellement d’humeur à bouleverser le paysage démocratique de l’Oncle Sam. Rien qu’au cours des deux derniers mois, la Cour a renversé une décision vieille de près de 50 ans sur le droit à l’avortement, ce qui a déjà conduit à l’interdiction de l’avortement dans treize Etats. De plus, les hauts magistrats ont assoupli les lois déjà laxistes sur les armes, rendu plus difficile la lutte contre les pollueurs dans le secteur de l’énergie et égratigné la séparation des pouvoirs en décidant que les prières publiques seraient à nouveau autorisées dans toutes les écoles.

Ces décisions vont dans le sens de Donald Trump. La solide majorité de 6 contre 3 des conservateurs à la Cour suprême remodèle le pays, un an et demi après son départ de la Maison Blanche. Trois des six juges conservateurs de la Cour suprême doivent leur nomination à l’ancien président républicain. Joe Biden a de facto les mains liées.

Les shows politiques en cours, organisés par la commission spéciale à dominante démocrate chargée d’enquêter sur les événements du 6 janvier 2021, ne changent rien à l’influence continue de Trump sur l’évolution politique des Etats-Unis. D’anciens collaborateurs du Républicain ont certes révélé des détails retentissants sur son rôle lors de l’assaut du Capitole: Trump aurait tenté de prendre lui-même le volant de sa limousine présidentielle pour se diriger avec les manifestants vers le Capitole. Plus tard, il aurait jeté son déjeuner contre les murs de la Maison Blanche, enragé.

La majorité veut le départ de Joe Biden

Mais l’ex-président n’en a pas vraiment souffert politiquement. 80% des républicains continuent de le soutenir. La plupart des sondages le donnent en tête d’une course théorique contre Joe Biden.

Parallèlement, les discussions sur l’âge de Joe Biden reprennent. En novembre, le président fêtera ses 80 ans. Récemment, il est tombé à vélo devant les caméras. Et il se fait régulièrement remarquer par ses déclarations confuses. Ainsi, lors d’une récente table ronde, il a souligné que prendre le volant en étant ivre n’était pas un délit.

Selon un sondage de l’institut Harvard Caps, 71% des Américains souhaitent que Joe Biden ne se représente pas en 2024. Du côté démocrate, on ne voit toutefois encore aucune alternative valable.

(Adaptation par Thibault Gilgen)

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