Une aubaine pour l'AfD?
La nouvelle coalition noire-rouge présente enfin son contrat de coalition

Après une longue lutte, la nouvelle coalition noire-rouge, entre la CDU/CSU et le SPD, a enfin émergé après les dernières élections en Allemagne. Derrière des promesses de sécurité et de renouveau économique se cache la pression politique de la droite.
Publié: 12.04.2025 à 14:07 heures
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Dernière mise à jour: 14.04.2025 à 13:05 heures
Nouveau gouvernement, vieux visages – avec un traité qui veut tout régler.
Photo: IMAGO/NurPhoto
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Chiara Schlenz

Ils se sont disputés, ont dû lutter, mais sont finalement parvenus à se mettre d'accord. La CDU/CSU (droite conservatrice) et le SPD (centre-gauche) forment un nouveau gouvernement, le contrat de coalition est prêt! Après d'âpres négociations qui ont duré six semaines, un document de 146 pages sobrement intitulé «Responsabilité pour l'Allemagne» a été rédigé.

En fait, l'intention était de présenter un document allégé, qui ne ferait que tracer les grandes lignes. Mais tout s'est avéré plus compliqué que prévu. Le plan directeur pour l'Allemagne vaut-il quelque chose – ou la nouvelle coalition noire-rouge n'est-elle qu'un nouveau cadeau à l'AfD ?

Qui gouverne vraiment?

Malgré la longueur du document, les participants se sont montrés très optimistes lors de sa présentation. Le chancelier Friedrich Merz parle d'un signal de renouveau, d'un programme de modernisation, d'une coalition qui fera à nouveau avancer le pays.

Mais malgré tous ces slogans, beaucoup de choses semblent encore relever de la technocratie: baisses d'impôts, incitations à l'investissement, nouvelle sécurité de base – tout cela semble familier, presque nostalgique. Comme si l'on voulait préparer l'Allemagne aux années 2030 en appliquant les recettes du début des années 2000.

Le SPD garde sept ministères

La répartition des départements est également frappante. Bien que le SPD ait obtenu son plus mauvais résultat aux élections fédérales avec 16,4%, il obtient tout de même sept ministères sur les 17 existants – dont le puissant ministère des Finances.

De son côté, la CDU s'assure la chancellerie, le Ministère des Affaires étrangères ainsi que l'Economie, la Santé et les Transports. La CSU ne repart pas non plus les mains vides: elle obtient le Ministère de l'Intérieur, le Département de l'Éducation et de la Recherche ainsi que le Ministère de l'Agriculture.

Un compromis bâclé

Le contenu de l'accord porte indéniablement les marques d'un compromis tricoté à la va-vite. Sur le thème de l'immigration par exemple, Friedrich Merz annonce une «offensive de rapatriement» et une suspension du regroupement familial – des propos qui proviennent clairement du camp conservateur.

Dans le même temps, il est souligné que l'on veut faire de l'Allemagne un «pays courageux et porteur d'avenir», dans lequel «les gens ont plaisir à travailler». Le chef du SPD, Lars Klingbeil, s'est visiblement efforcé de donner un sens général à l'alliance. On a réussi à transformer les «lignes rouges» en un «fil rouge». On a construit des ponts là où il y avait des fossés.

Pour le reste, il y a eu peu de surprises sur le contenu. Le frein à l'endettement sera «remodelé» et les réglementations seront réduites. Des investissements massifs seront réalisés dans le réarmement. Les retraites doivent être maintenues au même niveau.

Renforcer le centre ou ouvrir le flanc droit?

Malgré ce rapprochement symbolique, beaucoup de choses restent ouvertes. Le traité ne fournit aucune vision claire de l'avenir numérique, aucune réponse à la crise de l'éducation, et en matière de politique climatique, beaucoup de choses restent diffuses.

C'est justement là que réside le danger: si l'on réduit la modernisation à des questions fiscales sans proposer d'autres solutions, on laisse le terrain de jeu à ceux qui donnent des réponses simples – et c'est le modèle d'affaires de l'AfD.

Friedrich Merz souligne certes qu'il faut renforcer le centre de la société pour faire reculer les populistes de droite. Mais il n'est pas certain que ce contrat de coalition suffise pour cela. Le risque existe qu'il devienne un tremplin pour l'adversaire politique – surtout si la coalition s'embourbe dans des escarmouches internes au cours des prochains mois.

Au final, on se retrouve avec un accord qui semble solide, bien pensé, mais peu inspiré. Pas un mariage d'amour, plutôt une alliance froide avec un sens commun du devoir. La prochaine pierre de touche sera le vote des membres du SPD, qui débutera le 15 avril. On verra ensuite si le projet de gouvernement devient réalité ou s'il n'est rien de plus qu'une alliance de circonstance.

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