La situation à la frontière entre la Serbie et le Kosovo est tendue. La Serbie a déployé un convoi militaire, et des extrémistes serbes tentent de prendre d’assaut la frontière kosovare près de Jarinje. La force de maintien de la paix dirigée par l’OTAN, à laquelle participe également la Suisse, a bloqué le passage avec du fil de fer barbelé.
Le Premier ministre kosovar Albin Kurti et le président serbe Aleksandar Vučić s’affrontent aussi verbalement. Le premier qualifie ainsi le second de «chef de bandes criminelles» et «d’homme de Poutine dans les Balkans».
La Force pour le Kosovo de l’OTAN (KFOR) est en état d’alerte. Le colonel Egon Frank, à la tête du contingent allemand, déclare au quotidien «die Welt» qu’il existe un «risque permanent de détérioration de la situation sécuritaire». Une nouvelle déclaration d'Albin Kurti ou de Aleksandar Vučić pourrait suffire à faire pencher la balance.
Des tensions plus fortes que précédemment
Malgré la tension, les experts des Balkans estiment qu’une guerre ouverte est plutôt improbable, «car la Serbie devrait faire face à la KFOR», explique Konrad Clewing de l’Institut Leibniz de recherche sur l’Europe de l’Est et du Sud-Est à Blick.
Pour Daniel Bochsler, politologue à la Central European University et à l’université de Belgrade, «il est alarmiste d’évoquer une guerre au sens classique du terme». Ces dernières années, il y a toujours eu plusieurs épisodes d’escalades suivant un schéma similaire, précise-t-il. Toutefois, les tensions actuelles semblent plus vives que d’habitude.
«Actuellement, ce n’est pas seulement le défilé de bandes nationalistes à la frontière qui irrite, mais aussi la détention probablement abusive de la politicienne Rada Trajković par les forces de sécurité serbes. Les décisions de Belgrade sont moins constructives que précédemment», détaille l’expert.
De l’autre côté, le Premier ministre kosovar Albin Kurti insiste sur une solution conforme à l’Etat de droit, et sur l’application de l’ordre juridique kosovar dans le nord du Kosovo. «Il réduit ainsi la marge de manœuvre de la formule de compromis en vigueur jusqu’à présent, selon laquelle les deux parties ont accepté une situation en partie pas clarifiée», indique Daniel Bochsler.
Moyen de pression de la communauté internationale?
Selon l’expert, des calculs politiques des deux Etats se cachent derrière ces tensions. «La communauté internationale, et notamment les Etats-Unis, fait pression pour une solution négociée rapide. Et plus la situation est tendue, plus les deux gouvernements peuvent s’attendre à des concessions.»
Les deux gouvernements n’espéraient pas seulement des concessions concernant le statut du Kosovo et du nord du Kosovo, peuplé en majorité de Serbes. «Le gouvernement serbe espère aussi que l’Occident détournera un peu plus généreusement le regard sur des questions de politique intérieure comme la corruption, les liens avec la mafia, la répression des médias, la démocratie et les relations avec la Russie», conclut Daniel Bochsler.