Le Gulf stream, ce courant marin chaud partant de la pointe sud de la Floride et qui traverse l'Atlantique pour atteindre la Norvège, pourrait bien être de l'histoire ancienne — en tout cas dans sa forme actuelle.
C'est du moins la crainte d'un scientifique climatique cité par le Guardian, qui estime que les changements de température et de salinité des fonds marins induits par le réchauffement climatique pourraient bien «déstabiliser complètement» le courant dans un avenir proche.
La Circulation méridienne de retournement Atlantique (AMOC), comme la nomment les scientifiques — le Gulf Stream en étant une partie qui se limite en fait aux côtes américaines —, s'est affaiblie.
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Inversion du fonctionnement des couches
Le courant est à son niveau le plus faible depuis 1600 ans, estiment plusieurs scientifiques. L'AMOC est composée de deux couches distinctes, l'une de surface et l'autre profonde. La première, plus forte et rapide et l'autre, plus faible et lente.
Le réchauffement des températures et la modification de la salinité des eaux, due notamment à la fonte des glaces du Groenland, sont en cause. Si ces éléments sont connus depuis plusieurs années, il semble pourtant que leur impact sur l'AMOC soit en train de s'accélérer.
L'augmentation de la température des eaux pourrait intervertir ces deux courants, ce qui serait catastrophique, car le courant de surface deviendrait plus lent et faible. Pire: si l'AMOC arrête de fonctionner correctement, les conséquences seraient désastreuses, indique Niklas Boers dans son étude, publiée dans la revue Nature Climate Change.
Des signes de déstabilisation inattendus
Selon lui, si la fonte des glaces continue à ce rythme, une inversion des couches pourrait arriver «d'ici une à cinq décennies». Soit demain, au niveau environnemental. Quant à l'arrêt total de l'AMOC, il est beaucoup plus incertain et il est impossible à prédire. «Cela peut arriver dans vingt ans comme dans plusieurs centaines d'années.»
En conséquence, on pourrait assister à une forte baisse des températures en Europe et une augmentation des risques d'orages, voire un changement de la météo et des retombées de pluie dans le monde entier.
«Je ne m'attendais pas à des signes visibles de déstabilisation pareils. Je trouve cela effrayant», explique Niklas Boers. Le chercheur travaille au sein de l'Institut pour la recherche des conséquences climatiques de Potsdam, en Allemagne. «C'est quelque chose qu'on ne peut juste pas laisser arriver», dit-il.
Un autre chercheur tempère
Avec la fonte des glaces du Groenland et le fait que la forêt amazonienne produit désormais plus de CO2 qu'elle n'en absorbe, il s'agit d'un des points de bascule environnementaux les plus décisifs, explique le chercheur.
David Thornalley, un chercheur de l'University College de Londres, également l'auteur de plusieurs études sur l'AMOC, tempère quelque peu: «Les signes d'une stabilité basse sont en effet inquiétants. Mais nous ne savons pas si ce changement aura lieu, et si c'est le cas, quand.»