Trois experts répondent
Les drones kamikazes vont-ils être décisifs dans la guerre en Ukraine?

L'usage militaire de drones peut avoir un effet décisif dans les conflits. Qu'en est-il en Ukraine où les Russes y ont de plus en plus recours? Deux experts et une experte font le point.
Publié: 23.10.2022 à 12:21 heures
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Dernière mise à jour: 23.10.2022 à 13:26 heures
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Un drone kamikaze au-dessus de Kiev le 17 octobre 2022.
Photo: AFP
Robin Bäni

Contrairement aux missiles russes Iskander, six fois plus rapides que la vitesse du son, les drones kamikazes iraniens sont bruyants et volent lentement. Ils n’en sont toutefois pas moins létaux: si tout le monde peut entendre un tel drone s’approcher, impossible de savoir où il va frapper.

Cette incertitude provoquant une certaine détresse psychologique est sans doute intentionnelle pour certains. «Tous les moyens sont bons pour Poutine afin de démoraliser l’ennemi», explique Hubert Annen, maître de conférences en psychologie militaire à l’Académie militaire de l’EPF de Zurich. Comme les Russes sont à la traîne sur le champ de bataille, ils renforcent la terreur, ce qui pourrait aussi déclencher une nouvelle vague de réfugiés et mettre l’Occident sous pression.

Les drones peuvent être décisifs

Au-delà des conséquences sur les civils, les drones peuvent-ils se révéler décisifs au niveau de la stratégie militaire? Il y a deux ans, l’Arménie et l’Azerbaïdjan se sont fait la guerre pour la région caucasienne du Haut-Karabakh. L’Azerbaïdjan en est sorti vainqueur, notamment grâce à l’utilisation de drones turcs de type Bayraktar TB2. D’après Dominika Kunertova, chercheuse au Center for Security Studies, ces appareils sans pilote ont permis de contrôler l’espace aérien dans la zone de combat: les Azerbaïdjanais ont pu repérer et attaquer librement les positions arméniennes.

La situation en Ukraine est différente: personne n’y contrôle l’espace aérien. De nombreux drones sont abattus, même avec des armes de poing. La chercheuse estime à sept jours la durée de vie des drones traditionnels. Les produits iraniens de type Shahed-136, que la Russie appelle Geran 2, sont donc bienvenus.

Comparativement bon marché

Ces drones sont relativement bon marché et parcourent plus de 2000 kilomètres. Ils attaquent en essaim, certains surmontent les défenses et s’écrasent sur des civils ou des infrastructures énergétiques critiques. Mais une fois que leur objectif est fixé, il est impossible d’en changer, empêchant tout changement pour une cible mobile.

Pour ces raisons, le drone de type Shahed-136 n’est pas intéressant stratégiquement et n’a aucune espèce d’influence, avance quant à lui Frank Sauer. Ce dernier est directeur de recherche à l’université de la Bundeswehr à Munich. Lors de la guerre du Haut-Karabakh, des drones israéliens sophistiqués de type Harpy et Harop ont en outre été utilisés. Le drone iranien, moins cher, est en revanche composé de technologies disponibles dans le commerce.

Pour Frank Sauer, cette configuration «est caractéristique de notre époque. La technologie commerciale est de plus en plus utilisée à des fins militaires. Le meilleur exemple est le cyberespace».

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