Tensions sur la place Saint-Pierre
Au Vatican, des touristes prennent des selfies à côté des fidèles en pleurs

La mort du pape François émeut les gens à Rome. Sur la place Saint-Pierre, tristesse et tourisme se côtoient. Blick est sur place.
Publié: 05:26 heures
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De nombreux fidèles sont venus faire leur deuil.
Photo: AFP
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Helena Graf

Sur la place Saint-Pierre à Rome, deux mondes s'affrontent en ce lundi de Pâques. D'un côté, des touristes en débardeurs prennent la pose, sourire figé devant l’écran de leur téléphone. Un selfie avec des lunettes Gucci, un autre sans. Un jeune homme avec une casquette de baseball danse avec exubérance, en criant: «Jésus! Jésus!». Les gens filment.

A quelques pas, Paula et Maria, deux femmes âgées, se frayent un chemin pas à pas à travers la foule, bras dessus, bras dessous. Elles parviennent jusqu'à la barrière et s'arrêtent. «Hier encore, nous avons vu le pape François ici, sur la place. Et aujourd'hui, nous apprenons qu'il est mort. Je ne l'ai pas cru au début», souffle Paula.

Des croyants en deuil. Des touristes qui se mettent en scène. Des contradictions. Comme un reflet du pape disparu, François, figure des pauvres et des oubliés, mais aussi chef suprême au Vatican, où se matérialisent la richesse et le faste de l'Eglise catholique.

«Pour toujours dans nos cœurs»

« Son désir d’être parmi nous, les hommes, allait au-delà de sa santé », confie Maria. Comme son amie Paula, elle a encore assisté à la messe de Pâques sur la place dimanche. « Cette messe restera à jamais dans nos cœurs.»

Paula (à gauche) et Maria sur la place Saint-Pierre.
Photo: Helena Graf

Le pape François était originaire d’Argentine. Premier non-Européen à la tête de l’Eglise catholique depuis plus de 1000 ans, il incarnait un tournant historique. Pour le père Gregorio, moine bénédictin venu du Mexique à Rome lorsqu’il était jeune étudiant, cela avait une résonance particulière. «François était notre berger » dit-il. « Nous sommes tristes de l’avoir perdu.»

Depuis le début de l’année, la santé du pape préoccupait les fidèles. Il souffrait d’une pneumonie bilatérale. Mais ce n’est pas cette maladie qui l’a emporté. Le Vatican a annoncé lundi soir qu’il était mort des suites d’une attaque cérébrale.

Agacé par la mise en scène de soi

Cela faisait 20 ans qu’un pape en exercice n’était pas mort. En 2005, lors du décès de Jean-Paul II, le monde était encore bien différent. Pas de selfies, pas de directs sur les réseaux. L’iPhone n’existait même pas encore.

Sur la place Saint-Pierre, de nombreux touristes s'arrêtent pour prendre photos et selfies.
Photo: Getty Images

Aujourd’hui, certains s’agacent de cette mise en scène permanente. Ils passent volontairement devant les caméras ou lèvent les yeux au ciel quand une horde de touristes se met à courir derrière un guide brandissant un drapeau noir.

Pour beaucoup, François incarnait une Eglise catholique plus moderne, plus ouverte. Regina Tana, membre de la communauté LGBTQIA+, tient une photo du pape dans ses mains. «Après son élection, j’ai perdu mon emploi», raconte-t-elle.

«Tout à coup, j'avais 50 euros !»

«Je suis allée à la banque au coin de la rue pour retirer de l’argent. On m’a dit que mon compte était vide. J’étais désespérée. C’est à ce moment-là que le pape François est passé dehors. J’ai couru vers un autre distributeur, inséré ma carte… et soudain, il y avait 50 euros sur mon compte. Un miracle!», raconte Regina Tana, qui vit à Rome.

Pour Regina Tana, le pape François était comme un père.
Photo: Helena Graf

Les jours à venir seront encore animés au Vatican. Le corps du pape sera transféré cette semaine dans la basilique Saint-Pierre, où les fidèles pourront venir lui dire adieu.

Regina, elle, n’est pas là pour une cérémonie officielle. «Je ne suis pas venue commémorer le pape, lache-t-elle. Je suis ici aujourd’hui pour honorer un père.»

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