Tout s’est passé très vite: les troupes ukrainiennes ont réussi à remporter d’importants succès contre les Russes, qui ont dû battre en retraite. Peu après, Vladimir Poutine a annoncé une mobilisation partielle de quelque 300’000 réservistes et a proféré une nouvelle menace nucléaire.
Pour le colonel Markus Reisner, commandant de la Garde autrichienne, la troisième phase de la guerre – un point critique pour l’Occident – est désormais atteinte, comme il l’explique à «Der Spiegel». Les Ukrainiens ont certes réussi à reconquérir d’importants territoires dans la région de Kharkiv, mais «il reste à voir s’ils pourront conserver les zones qu’ils ont reprises».
L’Occident joue un rôle important dans ce contexte, comme l’explique l’expert: «L’Occident doit soutenir massivement Kiev, et cela doit conduire à des succès militaires mesurables pour les Ukrainiens, comme la reprise de territoires dans la région de Kharkiv.» C’est la seule façon d’assurer le soutien de la population occidentale à l’aide militaire à l’Ukraine: «L’issue de la guerre ne se décidera pas en Ukraine, mais dans les capitales occidentales.»
Poutine exploite les peurs européennes
Qu’est-ce l’expert entend par là? «Chaque partie du conflit a ce que l’on appelle un centre de gravité. Celui-ci doit absolument être protégé. Dans le cas de l’Ukraine, ce centre de gravité est le soutien de l’Occident. Pour Vladimir Poutine, c’est la principale cible d’attaque – plus importante que l’armée ukrainienne elle-même.» Il est clair depuis longtemps que le chef du Kremlin a la solidarité de l’Occident dans le collimateur. La nouvelle menace d’utiliser des armes nucléaires rend son objectif encore plus clair.
«Vladimir Poutine essaie d’utiliser les peurs primaires des Européens à son profit. C’est ainsi qu’il a attisé la peur d’une catastrophe nucléaire avec le probable bombardement de la centrale nucléaire de Zaporijjia», explique Markus Reisner. Les référendums fictifs jouent également un rôle ici. Car dès que le président russe aura annexé ces territoires, il pourra riposter aux attaques sur ce «territoire russe» par l’utilisation d’armes nucléaires.
L’Occident doit prendre des décisions rapides
Un hiver sans énergie ou l’arrêt de l’approvisionnement des céréales – ces idées alimentent aussi les craintes occidentales. Et la Russie pourrait y trouver son compte et faire basculer l’ambiance à l'Ouest. «Plus la guerre dure, plus la Russie persiste, plus cela devient probable. La stratégie de Vladimir Poutine est conçue pour que l’Occident finisse par manquer de souffle dans la lutte pour l’Ukraine.»
Pour le colonel autrichien, il est clair que l’Occident doit prendre des décisions rapides. «Il devrait maintenant chercher à trancher rapidement – en aidant l’Ukraine, par des livraisons d’armes massives, à remporter le plus grand succès militaire possible en un minimum de temps.» Une hésitation de l’Occident donnerait directement l’avantage à Moscou: «Les Russes nous considèrent comme faibles, comme une société dégénérée et décadente qui ne parvient pas à se battre pour ses valeurs.»