L'Otan ne veut pas se laisser faire. En mer Baltique, des tensions sont apparues ces dernières semaines, après que plusieurs câbles sous-marins ont été dégradés. L'organisation souhaite ainsi s'y déployer massivement.
«Je ne vais pas entrer dans les détails concernant le nombre exact de navires, car cela peut varier d'une semaine à l'autre, et nous ne voulons pas rendre l'ennemi plus avisé qu'il ou elle ne l'est déjà», a dit Mark Rutte en conférence de presse. «Ce qui importe, c'est d'utiliser les moyens militaires appropriés aux endroits appropriés et au bon moment pour dissuader de futurs actes déstabilisants», a-t-il ajouté.
Plusieurs câbles sous-marins de télécommunications et d'alimentation électrique ont été endommagés ces derniers mois dans la mer Baltique. Dirigeants européens et experts soupçonnent des actes de «guerre hybride» orchestrés par la Russie.
«Améliorer la surveillance»
Les dirigeants des pays de l'Otan riverains de ce vaste espace maritime se sont réunis mardi en Finlande pour discuter des moyens d'y accroître la sécurité.
«Cette activité militaire s'inscrit dans nos efforts continus pour renforcer notre présence maritime et la surveillance des zones clés pour notre alliance» au moyen de frégates et d'avions de patrouille maritime, a ajouté Mark Rutte. Une petite flotte de drones de surface navals sera également déployée «afin d'améliorer la surveillance et la dissuasion». Cette opération se poursuivra pour une durée indéterminée, a indiqué l'Otan dans un communiqué.
L'Alliance a déjà fourni deux navires pour surveiller les infrastructures sous-marines et la «flotte fantôme» de la Russie - des navires souvent vieillissants, mal assurés et exploités sous pavillon étranger, que Moscou est accusé d'utiliser pour transporter son pétrole en contournant les sanctions occidentales.
Outre Mark Rutte, la réunion d'Helsinki co-présidée par la Finlande et l'Estonie rassemblait les dirigeants du Danemark, d'Allemagne, de Lettonie, de Lituanie, de Pologne, de Suède et la vice-présidente exécutive de la Commission européenne, Henna Virkkunen.
Les tankers de la «flotte fantôme» sont «une manne qui permet à la Russie de mener ce type de guerre hybride contre l'Europe, et sont également des bombes environnementales (potentielles) qui menacent nos mers», a noté le Premier ministre estonien, Kristen Michal.
Diversification nécessaire
Face aux risques, le président finlandais Alexander Stubb a insisté sur la nécessité de diversifier les sources d'énergie et les moyens de communication. «On ne peut pas empêcher toutes les actions de sabotage», a-t-il constaté. «Plus de 95% du trafic Internet est assuré par des câbles sous-marins et 1,3 million de kilomètres de câbles garantissent chaque jour des transactions financières d'une valeur estimée à 10'000 milliards de dollars», a fait valoir Mark Rutte.
Les incidents des derniers mois en mer Baltique ont poussé l'Alliance a augmenter sa connaissance de cette zone maritime, selon Iro Särkkä, chercheuse à l'Institut finlandais des affaires internationales. La nouvelle opération maritime sert, d'après elle, de «dissuasion et de signal stratégique»: l'Otan se tient prête à réagir.
La Joint Expeditionary Force (JEF), dirigée par le Royaume-Uni et composée d'unités d'Etats nordiques et baltes, ainsi que des Pays-Bas, a fait savoir de son côté qu'elle musclerait aussi sa surveillance des infrastructures sous-marines en mer Baltique.
«Carnage»
Le câble électrique EstLink 2, reliant la Finlande à l'Estonie, et quatre autres câbles de télécommunications ont été endommagés le 25 décembre, quelques semaines seulement après des dommages similaires sur deux câbles de télécommunications dans les eaux suédoises.
L'Eagle S, un pétrolier battant pavillon des îles Cook qui ferait partie de la «flotte fantôme» russe, est soupçonné du «sabotage» de ces câbles par la police finlandaise, qui a investi le navire puis l'a saisi pour les besoins de l'enquête. «S'il avait continué (ndlr: sa route, ndlr) 12 minutes de plus, ce carnage aurait été bien pire que les quatre câbles» endommagés, a souligné Alexander Stubb, salué pour la manière vigoureuse dont les autorités finlandaises ont réagi à l'incident.
L'Eagle S est actuellement toujours ancré à Porvoo, à l'est d'Helsinki. Les autorités ont interdit à huit membres de son équipage de quitter la Finlande pendant que la police mène ses investigations.