En matière de jouets pour enfants, le site chinois de vente en ligne Temu propose tout ce qui fait plaisir: du cactus dansant à la machine à bulles, tout y est. Et souvent pour un prix dérisoire. Problème: la qualité – et la sécurité – en prend un sérieux coup.
L'association européenne des jouets, Toy Industries of Europe (TIE), a en effet acheté et contrôlé 19 jouets sur Temu. Aucun d'entre eux n'était conforme aux dispositions en vigueur pour les jouets dans l'UE. Au total, 18 d'entre eux présentaient un danger pour les enfants, notamment en raison de petites pièces avec lesquelles ils pouvaient s'étouffer. D'autres avaient des bords tranchants. D'autres encore contenaient trop de semi-métaux. Dans un jouet à contenance visqueuse, la teneur en bore était onze fois supérieure à la limite légale.
«Le risque persiste»
L'entreprise a fait savoir qu'elle avait retiré les 19 produits mentionnés après avoir reçu les résultats des tests. Une enquête a également été ouverte. Temu affirme passer au crible les commerçants qui vendent leurs produits en ligne et contrôler régulièrement les produits par échantillonnage.
Mais cela n'a visiblement pas suffi. «Même si Temu ne vend plus les jouets examinés, il faut être conscient que des centaines d'autres produits dangereux continuent de figurer dans son assortiment. Ou que de nouveaux sont mis sur le marché à un rythme soutenu», explique Josianne Walpen, spécialiste dans la protection des consommateurs, au «Beobachter». Le risque de recevoir des produits défectueux existe toutefois chez tous les fournisseurs chinois à bas prix, comme Shein.
Les fabricants ne sont pas responsables
La protection des consommateurs exige des normes plus contraignantes pour ces produits. Actuellement, les consommateurs ne peuvent pas évaluer l'offre de manière autonome. «Dans le meilleur des cas, on peut reconnaître les particules susceptibles d'être avalées. En revanche, les pièces qui se détachent, les produits chimiques problématiques ou toxiques et les substances inflammables ne peuvent pas l'être», poursuit Josianne Walpen.
La TIE demande une amélioration de la directive sur la sécurité des jouets. Car pour le moment, les fournisseurs tiers dont le siège se trouve en dehors de l'UE ne peuvent pas être tenus pour responsables de la sécurité des jouets.
Plainte déposée au sein de l'UE
En Suisse, Temu a été lancé en mars 2023. L'entreprise de conseil en commerce électronique Carpathia estime que le chiffre d'affaires de la place de marché dans notre pays atteindra déjà 350 millions de francs en 2023. À titre de comparaison, Carpathia a estimé l'année dernière que la boutique en ligne la plus importante de Suisse, Zalando.ch, réalisait un chiffre d'affaires de 1,75 milliard de francs.
L'industrie du jouet n'est pas la seule à critiquer Temu. Les défenseurs des consommateurs ont régulièrement acheté sur la plateforme des produits qui étaient tous défectueux. Mi-mai, plusieurs groupes de consommateurs de l'UE ont déposé une plainte contre Temu auprès de la Commission européenne et des autorités compétentes de nombreux pays de l'UE. La plateforme enfreindrait la loi européenne sur les services numériques, qui est entrée en vigueur début 2024 et qui ne protégerait pas les consommateurs.
Des pratiques non interdites en Suisse
«La plateforme Temu est truffée de techniques de manipulation visant à inciter les consommateurs à dépenser davantage», a déclaré Monique Goyens, directrice de l'organisation européenne de protection des consommateurs. Ces pratiques sont illégales, selon la dernière réglementation européenne. Temu a fait savoir qu'elle prenait la plainte très au sérieux et qu'elle allait l'examiner attentivement.
En Suisse, il n'existe en revanche aucune directive aussi claire que celles de la loi européenne sur les services numériques. Du point de vue de Josianne Walpen de la protection des consommateurs, la jurisprudence suisse interprète très étroitement la loi fédérale contre la concurrence déloyale. C'est pourquoi les pratiques de Temu ne sont souvent pas considérés comme déloyales. «Il est nécessaire de légiférer sur cette manipulation, mais aussi sur l'indication des prix et la sécurité de la production.» La plainte des organisations européennes de consommateurs aura cependant des conséquences en Suisse. On peut s'attendre à ce que Temu adapte ses pratiques pour notre pays également.