Même la tentative de retour de son ancien patron Boris Johnson, un bulldozer politique, n'a pas pu l'arrêter. Cet ancien cadre de la banque Goldman Sachs et ex-ministre des Finances de 42 ans a rassemblé derrière lui une immense majorité de députés du Parti conservateur -au pouvoir- à l'issue d'une campagne éclair pendant laquelle il n'aura pas prononcé un mot en public, se contentant d'une annonce de candidature par un simple tweet.
En pleine crise économique et sociale, aggravée par la tempête financière provoquée par la politique économique de l'éphémère Liz Truss, il se retrouve propulsé à Downing Street avec une crédibilité au plus haut. Rishi Sunak avait bien prévenu les conservateurs cet été que le programme de Liz Truss relevait du «conte de fées» et que ses réductions massives d'impôts entraîneraient une hausse des taux d'intérêt. Ce petit-fils d'immigrés indiens au parcours typique de l'élite britannique avait semblé alors donneur de leçons et trop centriste pour les membres du Parti conservateur.
Ces derniers n'ont cette fois pas eu leur mot à dire et l'histoire lui a donné raison. Désormais, sa prudence budgétaire rassure. Signe de son retour en force, à l'issue de près de deux mois de silence médiatique, il a rallié la plupart des soutiens de Boris Johnson. Un comble pour celui qui souffre d'une réputation de traître : il avait claqué la porte du gouvernement début juillet, suivi ensuite par une soixantaine de collègues, acculant «BoJo» à la démission après une série de scandales.
Sur la nomination de Rishi Sunak
Parcours de l'élite
Le succès de Rishi Sunak couronne une ascension météorique au sein du Parti conservateur. Elu député du Yorkshire (nord de l'Angleterre) en 2015, il accède à peine cinq ans plus tard, à 39 ans, au poste très convoité de ministre des Finances, peu avant l'arrivée du Covid-19. Ce partisan de la première heure du Brexit gagne alors en popularité en distribuant des milliards de livres d'aides publiques pendant la pandémie.
Mais sa fortune, amassée au cours de sa carrière dans la finance et via son mariage avec Akshata Murty, fille d'un multimilliardaire indien, indispose parfois, quand les Britanniques se serrent la ceinture. Comme cette vidéo, qui ressort régulièrement, où, jeune, il admet en riant ne pas avoir d'amis issus de la classe ouvrière.
Ces dernières années, ses coûteux costumes -toujours impeccables- et gadgets ou son train de vie dans une opulente villa de sa circonscription, ont fait régulièrement grincer des dents. Face à ces critiques, ce fan de la saga Star Wars raconte volontiers son histoire familiale, une success story comme les conservateurs les aiment.
Né le 12 mai 1980 à Southampton, sur la côte sud de l'Angleterre, Rishi Sunak est l'aîné de trois enfants et le fils d'un médecin généraliste du système de santé public et d'une pharmacienne. Nés en Inde ou d'origine indienne, ses grands-parents ont émigré d'Afrique orientale vers le Royaume-Uni dans les années 1960.
«En tant que serveur au restaurant indien»
«Ma famille a émigré ici il y 60 ans. (Ma mère) tenait la pharmacie locale de Southampton. C'est là que j'ai grandi, dans la boutique, livrant les médicaments. J'ai travaillé en tant que serveur au restaurant indien au bout de la rue», a-t-il raconté pendant la dernière campagne. «Je suis ici grâce au dur labeur, au sacrifice et à l'amour de mes parents.»
Rishi Sunak a toutefois très vite accédé à l'élite en fréquentant le Winchester College, un très chic pensionnat pour garçons. Il a ensuite étudié la politique, la philosophie et l'économie dans les prestigieuses universités d'Oxford, en Angleterre, et de Stanford, aux Etats-Unis.
Avant d'entrer en politique, il a travaillé dans la finance, en particulier chez Goldman Sachs, et fondé sa propre société d'investissement. Ce père de deux filles a prêté serment sur la Bhagavad Gita, un texte sanskrit considéré comme l'un des écrits fondamentaux de l'hindouisme, quand il a été élu député. Il accède à Downing Street en plein Diwali, la fête hindoue des lumières célébrant l'arrivée de l'automne.
(AFP)