Procès des viols de Mazan
Un réquisitoire pour «l'avenir» et les victimes de violences sexuelles

Le procès des viols de Mazan entre dans sa phase finale à Avignon. L'accusation demande jusqu'à 20 ans de prison pour Dominique Pelicot, le principal accusé, et entre 4 et 18 ans pour ses 50 coaccusés. La défense tente de faire émerger l'humanité de Pelicot.
Publié: 27.11.2024 à 20:35 heures
Photo: AFP
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AFP Agence France-Presse

Dans un réquisitoire «tourné vers l'avenir», l'accusation a souhaité mercredi que le futur verdict du procès des viols de Mazan constitue «un message d'espoir» pour les victimes de violences sexuelles, l'avocate de Dominique Pelicot tentant elle de faire émerger son «humanité».

«Par votre verdict, vous signifierez que le viol ordinaire n'existe pas, que le viol accidentel ou involontaire n'existe pas. Vous délivrerez un message d'espoir aux victimes de violences sexuelles», a insisté Laure Chabaud, l'une des deux représentantes du ministère public, en s'adressant à la cour criminelle de Vaucluse.

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Par votre verdict, vous signifierez que le viol ordinaire n'existe pas, que le viol accidentel ou involontaire n'existe pas
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«Vous rendrez une part de son humanité volée à Gisèle Pelicot», a-t-elle ajouté, face à la septuagénaire, devenue une icône de la cause féministe depuis sa décision de refuser le huis clos lors de ce procès, qui a débuté le 2 septembre, à Avignon.

Pendant dix ans, de juillet 2011 à octobre 2020, elle avait été droguée à son insu par son désormais ex-mari, Dominique Pelicot, qui la violait et la livrait à des dizaines d'hommes recrutés sur internet.

«Par votre verdict, vous signifierez aux femmes de ce pays qu'il n'y a pas de fatalité à subir, et aux hommes de ce pays pas de fatalité à agir. Vous nous guiderez dans l'éducation de nos fils, car c'est par l'éducation que s'impulsera le changement», a-t-elle ajouté, appelant à «une prise de conscience collective, sociétale».

«Il y aura un avant et un après»

«Il y aura un avant et un après» procès des viols de Mazan, a en tout cas espéré la magistrate, souhaitant que les peines qui seront prononcées lors du verdict, prévu au plus tard le 20 décembre, conduisent les accusés à «une prise de conscience réelle et profonde» de leurs actes, «notamment sur la notion de consentement».

Mme Chabaud a en revanche regretté «la communion dérangeante» qui s'est «parfois dégagée» entre les accusés, durant ces 12 semaines de débats, «menant à une décontraction inappropriée».

De même elle a fustigé la «formule magique» de plusieurs accusés, qui ont répété «n'avoir pas eu l'intention» de violer Gisèle Pelicot, «pour faire disparaître leur responsabilité»: «Sachez messieurs que les formules magiques ne fonctionnent pas dans les enceintes judiciaires», a-t-elle asséné.

Trois jours de réquisitions contre 50 coaccusés

Cette prise de parole est venue conclure trois journées de réquisitions menées au pas de course à l'encontre des 50 coaccusés de Dominique Pelicot, contre lesquels l'accusation a réclamé entre 4 et 18 ans de prison. Pour Dominique Pelicot, qui a eu 72 ans ce mercredi, la peine maximale de 20 années de réclusion avait été requise lundi.

«Dix-sept ans de réclusion criminelle, on n'est qu'à trois ans de Dominique Pelicot, alors qu'en réalité, il n'est concerné que pour quelques minutes dans la vie de Dominique Pelicot. C'est une disproportion totale», s'est insurgé devant la presse Me Roland Marmillot, l'avocat de Mohamed R., un des 50 coaccusés, âgés de 26 à 74 ans. «La justice, ce n'est pas la vengeance», a-t-il accusé.

«L'avocat du diable»

L'avocate de Dominique Pelicot, Béatrice Zavarro, a ensuite pris la parole en début d'après-midi, inaugurant un peu plus de deux semaines consacrées aux plaidoiries de la défense.

«Bien malgré moi, je suis devenue l'avocat du diable (...) Comme je vous l'ai souvent dit, c'est vous et moi contre le monde entier», a dit en guise d'introduction Me Zavarro, se tournant d'abord vers son client, dans le box des accusés, puis vers Gisèle Pelicot, sur le banc des parties civiles, pour lui exprimer son «profond respect».

Pendant une heure, l'avocate s'est attachée à rappeler la face A du principal accusé, celle du «bon mari, bon père, bon grand-père» décrit par tous, puis elle a tenté de chercher dans une histoire familiale au «climat délétère» les raisons de sa «perversité».

Sous-entendant que l'arrestation de Dominique Pelicot, le 12 septembre 2020, alors qu'il filmait sous les jupes des clientes d'un centre commercial, à Carpentras (Vaucluse), serait en fait un acte manqué qui lui aurait permis de mettre fin à «l'engrenage» pervers dans lequel il était pris, Me Zavarro a également rappelé que jamais il n'a menacé ses complices, ou été violent à leur encontre.

«Dominique Pelicot a accepté, a reconnu la prévention qui lui est reprochée», a rappelé l'avocate, réfutant fermement ce rôle de «chef d'orchestre» que lui attribuent nombre de ses coaccusés, affirmant avoir été sous son «emprise», voire drogués par ses soins.

Sur la peine réclamée par l'accusation, 20 ans de réclusion criminelle, soit le maximum possible pour viols aggravés, l'avocate a seulement demandé à la cour de s'en «éloigner quelque peu, peut-être», sans insister.

Et c'est face à Gisèle Pelicot qu'elle a fini son plaidoyer: «Il a tenté 1000 fois de demander pardon, je ne sais si vous l'entendrez, Madame, mais il le répète à nouveau.»

Puis, évoquant les trois enfants du couple, présents lors du réquisitoire contre leur père lundi mais absents pour sa défense, Me Zavarro leur a demandé de «garder en tête le premier Dominique, celui qui vous a choyés, câlinés, profondément aimés».

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