Première riposte cette semaine
Affronter Trump? Les cinq casse-tête commerciaux européens

Ce mercredi 9 avril, les 27 pays membres de l'Union européenne doivent confirmer leur première riposte commerciale aux tarifs douaniers de Donald Trump. Sauf que les problèmes s'accumulent.
Publié: 06.04.2025 à 09:14 heures
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Dernière mise à jour: 06.04.2025 à 11:40 heures
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Donald Trump est plus défiant que jamais après son annonce sur les tarifs douaniers avec le monde entier.
Photo: AFP
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Richard WerlyJournaliste Blick

On l’a compris le jour même des annonces douanières fracassantes de Donald Trump: les Européens ne vont pas s’empresser de riposter. A Bruxelles, pour l’Union européenne, comme dans les pays non-membres de l’UE touchés par l’assaut commercial américain (dont la Suisse, au premier rang), l’heure est au calcul de la réponse la plus effective. Logique, car le casse-tête est réel. Et il peut s’aggraver.

Casse-tête n° 1: l’escalade

Riposter à Donald Trump par une forte augmentation des tarifs douaniers de ce côté-ci de l’Atlantique est une possibilité. La Chine vient de montrer l’exemple en décidant de taxer à 34% toutes les importations en provenance des Etats-Unis. Le problème, pour les Européens comme pour les Chinois, est que le président américain a le goût de l’escalade. Le Commissaire européen au commerce Maros Sefcovic (bien connu en Suisse comme négociateur des futurs accords bilatéraux) était à Washington à la fin mars et il en est revenu persuadé que l’actuelle administration ne changera pas de cap. La meilleure riposte, dans ces conditions, est donc hybride: il faut à la fois surtaxer de façon réciproque les produits américains, et démontrer à Trump que son intérêt est de commercer avec l’Europe. Le bâton, oui, mais avec une carotte.

Casse-tête n° 2: la tech intouchable

C’est la cible idéale pour les Européens, dont le marché de 450 millions d’habitants est indispensable à la prospérité des géants américains de la technologie, les fameux GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft). Pourquoi ne pas imposer une taxe à l’entrée pour tous les fournisseurs de données et toutes les plates-formes, sur la base de leur chiffre d’affaires réalisé dans l’Union, ou pays par pays? Certains experts suggèrent même de brandir la menace de les bannir des futurs marchés publics. Soit. Mais attention: Trump est prêt à bondir pour défendre ces multinationales qui, aujourd’hui, assurent un excédent commercial aux Etats-Unis dans le secteur des services. Faut-il ouvrir un second front?

Casse-tête n° 3: le dollar, cette menace

On se souvient de la phrase de Mario Draghi, qui avait sauvé le 26 juillet 2012 l’Union européenne et sa monnaie unique de la débâcle engendrée par la crise grecque. «Whatever it takes» (quoi qu’il en coûte) avait lâché celui qui présidait alors la Banque centrale européenne, confirmant qu’il défendrait l’euro par tous les moyens possibles. Le problème, treize ans plus tard, est que Donald Trump veut aussi mener une guerre monétaire. Il veut baisser le cours du dollar. Il a déjà entamé une guérilla avec la Réserve fédérale, hostile à une baisse des taux d’intérêt. Dollar-Euro: c’est l’autre versant de cette guerre commerciale. Or l’on sait que sur les transactions en dollar, les Etats-Unis peuvent toujours appliquer des sanctions extraterritoriales.

Casse-tête n° 4: la cohésion européenne

La première réponse à ce sujet viendra le mercredi 9 avril, jour de l’entrée en vigueur des premières hausses des tarifs douaniers américains. Ce jour-là, quelques heures plus tôt, les 27 pays membres de l’UE doivent discuter des contre-mesures aux tarifs de Trump sur l’acier et l’aluminium. Seront-ils unis? Ce secteur concerne 26 milliards d’euros d’exportations de l’UE et entraînera 6,5 milliards d’euros de nouveaux droits de douane. Les contre-mesures seront mises en œuvre entre le 15 avril et le 15 mai. L’enjeu du calendrier est décisif: tous les regards se tournent vers les deux dirigeants européens les plus proches de Trump, Giorgia Meloni (Italie) et Viktor Orban (Hongrie).

Casse-tête n° 5: la coercition, du jamais vu

Jamais utilisé, ou presque: adopté définitivement en octobre 2023, l’instrument de coercition constitue la bombe atomique de l’arsenal commercial européen. Une fois activé, il permet des contre-mesures contre un pays tiers, notamment un large éventail de restrictions liées au commerce, aux investissements et au financement. La Lituanie a été le premier pays de l’UE à y recourir, pour riposter aux mesures de rétorsion chinoises prises à partir de 2021 pour s’opposer à de nouveaux accords signés entre Vilnius et Taïwan. Problème: l’impact de cette arme commerciale «nucléaire» sur les économies européennes reste flou. Ce qui est le problème de la dissuasion en matière de défense: une arme entretenue pour ne jamais être utilisée.

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