Kim Jong Un «est parti avec son train dimanche après-midi pour se rendre dans la Fédération de Russie», à la tête d'une délégation de hauts responsables du gouvernement, des forces armées et du Parti des travailleurs au pouvoir en Corée du Nord, a écrit le média officiel.
Les experts estiment que ce voyage à Vladivostok, dans l'extrême est de la Russie, où se tient un forum économique annuel, pourrait porter sur un accord d'armement. Vladimir Poutine chercherait à obtenir des armes et des munitions nord-coréennes pour les forces russes combattant en Ukraine. La Corée du Nord, elle, chercherait à obtenir de la Russie des technologies avancées pour son programme de satellites et de sous-marins.
L'agence de presse KCNA n'a pas précisé où se trouvait le train de Kim Jong Un ce mardi, et notamment s'il avait ou non déjà franchi la frontière avec la Russie. Lundi, l'agence avait annoncé que «le respecté camarade Kim Jong Un rencontrera et aura des discussions avec le camarade Vladimir Poutine durant sa visite».
Moscou avait aussi confirmé ce projet de visite, la deuxième du dirigeant nord-coréen en Russie depuis son arrivée au pouvoir en 2012. Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a cependant assuré lundi, avant l'annonce officielle du voyage, qu'aucune rencontre Kim-Poutine n'était prévue dans le cadre du forum économique de Vladivostok.
Première sortie du dirigeant nord-coréen depuis 2020
Kim Jong Un n'avait plus quitté la Corée du Nord depuis l'irruption de la pandémie de Covid-19 en 2020. Kim Jong Il, père et prédécesseur de l'actuel numéro un du pays, avait peur de prendre l'avion. Son fils privilégie également le rail pour ses rares voyages à l'étranger.
Selon Yang Moo-jin, président de l'Université d'études nord-coréennes de Séoul, Kim Jong Un manquerait de confiance envers les avions nord-coréens et entretiendrait «des inquiétudes quant au potentiel d'attaques aériennes de Washington». La Maison Blanche avait affirmé le 5 septembre que Kim Jong Un souhaitait voir Vladimir Poutine pour discuter de ventes d'armes.
Le président russe, contraint de «traverser tout son pays pour rencontrer un paria de la scène internationale afin de lui demander de l'aide dans une guerre qu'il espérait gagner en un mois», en est ainsi réduit à «quémander» auprès du dirigeant nord-coréen, a critiqué lundi le Département d'Etat. La Russie et la Corée du Nord ont des liens historiques et Kim Jong Un a à plusieurs reprises fait part à Moscou de son soutien dans le cadre de ses opérations en Ukraine.
Une visite inscrite dans un jeu d'alliance
Pour Andreï Lankov, un expert de la Corée du Nord à l'université Kookmin de Séoul, un sommet Poutine-Kim fait partie d'un «aimable chantage diplomatique» de Moscou à l'encontre de Séoul, car la Russie ne veut pas que les Sud-Coréens fournissent des armes à l'Ukraine.
La Corée du Sud est en effet un important exportateur d'équipements militaires et a vendu des chars à la Pologne, alliée de Kiev. Mais sa politique intérieure de longue date lui interdit de fournir des armements à des parties engagées dans de véritables guerres. «La principale préoccupation du gouvernement russe à l'heure actuelle est une éventuelle livraison de munitions sud-coréennes à l'Ukraine, pas seulement une livraison mais de nombreuses livraisons», a expliqué à l'AFP M. Lankov.
Cheong Seong-chang, chercheur à l'Institut Sejong, a quant à lui dit à l'AFP que si la Corée du Nord intensifiait sa coopération militaire avec la Russie, «il y aurait une probabilité accrue de conflit prolongé en Ukraine». Tandis qu'en récompense de son aide à Moscou, «le développement des sous-marins nucléaires et des satellites de reconnaissance de la Corée du Nord pourrait progresser à un rythme plus rapide».
(ATS)