L'amitié s'arrête à l'argent, surtout lorsqu'il s'agit de 96 milliards de dollars américains. Dans la politique américaine, ce méga-montant pourrait même conduire au chaos et au blocage. Car en refusant de verser cette somme à l'Ukraine, à Israël, aux Palestiniens et à Taïwan, les partisans de Trump au Parlement veulent créer un maximum de chaos.
Le calcul est le suivant: plus le président américain Joe Biden semble incompétent, plus il sera facile pour le candidat Donald Trump de se présenter à la présidentielle. Seulement, en jouant avec le feu, le républicain pourrait bien se brûler.
Les républicains bloquent tout ce qui peut l'être
Mais reprenons les choses dans l'ordre: après des semaines de guerre verbale, le Sénat américain a réussi à faire passer le gigantesque paquet d'aide par 70 voix contre 29. Combat remporté par Biden? Non.
Car le prochain obstacle que doit franchir ce paquet très controversé est encore plus haut que le Sénat: la Chambre des représentants américaine. Les fidèles partisans de l'ex-président Donald Trump sont majoritaires. Et ces républicains ne veulent en aucun cas que l'Ukraine – ou tout autre pays, à l'exception des Etats-Unis – soit aidée financièrement.
Du moins jusqu'à ce que le gouvernement du président américain Joe Biden renforce la frontière avec le Mexique. C'est ce qu'a déclaré lundi Mike Johnson, le président républicain de la chambre basse: «Les républicains de la Chambre des représentants ont été clairs dès le début des discussions sur le fait qu'il faut reconnaître que la sécurité nationale commence à notre propre frontière.»
Le «speaker» menacé par son propre camp
Le gouvernement américain a pourtant élaboré un nouveau projet de loi comprenant également des fonds pour le renforcement de la frontière dans le sud des États-Unis. Mais rien n'y fait pour les républicains purs et durs de la Chambre des représentants.
Mike Johnson – toujours lui – a rejeté la proposition. Le président de la Chambre des représentants est même allé plus loin et a annoncé qu'il ne comptait même pas soumettre le paquet d'aide au vote. Les partisans de la ligne la plus dure ont laissé entendre qu'en cas d'adoption d'un paquet d'aide à l'Ukraine, ils déposeraient une motion de censure contre le président de la Chambre et qu'ils le chasseraient de son perchoir – comme ils l'ont fait avec son prédécesseur Kevin McCarthy.
Le responsable de l'obstination des républicains les plus durs est – sans surprise – Donald Trump lui-même. Il exerce une pression immense sur son équipe à Washington. Et ce, avec un objectif clair en tête: créer un chaos tel, que le problème retombe sur Joe Biden. Le gouvernement actuel doit apparaître aussi chaotique et incompétent que possible. Trump pourra alors se mettre en scène pendant la campagne électorale comme un héros arrivant sur son cheval blanc pour sauver la nation d'un gouvernement perturbé.
Et si Donald Trump avait fait d'énormes erreurs de calcul?
Et l'ironie dans tout ça? Alors que l'ancien– et peut-être futur – président américain tente de préparer la scène pour un retour glorieux, il laisse derrière lui un parti en ruines. Le fait que 22 des 49 sénateurs républicains se soient opposés à ses idées et se soient alliés aux démocrates en est la meilleure preuve. Et l'on peut se demander si un parti avec des clivages aussi profonds est apte à gouverner.
On peut également se demander si, avec cette action, les républicains ne se mettent pas eux-mêmes des bâtons dans les roues en vue des élections de novembre. Cela pourrait perturber les électeurs indécis qui changent de camp d'une élection à l'autre. Et de nombreux républicains traditionnels soutiennent l'OTAN et l'aide à l'Ukraine – un nouveau blocage pourrait dissuader ces électeurs.
À quel point ce chaos deviendra-t-il trop important? C'est la question que Trump et consorts doivent désormais se poser.