Plus grande hausse depuis 1994
La Fed joue le tout pour le tout afin de freiner l'inflation

La banque centrale américaine (Fed), «fortement déterminée à ramener l'inflation à son objectif de 2%», a relevé mercredi ses taux directeurs de trois quarts de points de pourcentage, soit la plus forte hausse depuis 1994, pour tenter de contrôler l'inflation.
Publié: 16.06.2022 à 06:36 heures
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Dernière mise à jour: 16.06.2022 à 07:56 heures
La banque centrale américaine, la puissante Réserve fédérale (Fed), a annoncé mercredi la plus forte hausse de ses taux directeurs depuis 1994. (archives)
Photo: Patrick Semansky

Les chiffres de l’inflation en mai, publiés vendredi, avaient fait l’effet d’une douche froide: la hausse des prix n’a pas ralenti, comme cela avait été le cas en avril. Elle a même atteint un nouveau record en 40 ans, à 8,6% sur un an. Et même si la Fed privilégie une autre mesure, l’indice PCE, dont les données pour mai seront publiées à la fin du mois, l'inquiétude n'en est pas moins grande.

Face à la hausse des prix, la Fed n'a pas d'autre choix que d'augmenter les taux directeurs dans l'espoir de juguler l'inflation. Pour ce faire, elle a décidé d'augmenter les taux directeurs, qui influencent directement les taux d'intérêts pour les prêts bancaires. Et face à l'ampleur de l'inflation, cette hausse «est inhabituellement importante», a souligné le président de la Fed, Jerome Powell, lors d’une conférence de presse.

Comprendre l'inflation:

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Il s’agit de la troisième hausse d’affilée de ces taux, qui se situent désormais dans une fourchette comprise entre 1,50 à 1,75%, et donnent le ton pour les crédits accordés aux particuliers et entreprises. Ce ne sera sans doute pas le dernier relèvement dans les mois à venir: «Dans la perspective d’aujourd’hui, une augmentation de 50 points de base ou de 75 points de base semble très probable lors de notre prochaine réunion», a ajouté Jerome Powell.

Car faire ramener l’inflation autour de 2% est la priorité. Et la plupart des responsables de la Fed voient les taux grimper, d’ici à la fin de l’année, jusqu’à la fourchette de 3,25 à 3,50%.

Déséquilibres entre offre et la demande

Les responsables de la Réserve fédérale ont également révisé mercredi à la hausse leurs projections d’inflation, tablant désormais sur 5,2% en 2022 et 2,6% en 2023, quand ils prévoyaient, en mars, respectivement 4,3% et 2,7%.

L’inflation demeure «élevée, reflétant les déséquilibres entre l’offre et la demande liés à la pandémie, les prix de l’énergie plus élevés et plus largement les pressions sur les prix», a souligné la Fed.

L’institution rappelle que l’invasion russe en Ukraine et les sanctions contre la Russie ont créé «des pressions supplémentaires à la hausse sur l’inflation et pèsent sur l’activité économique mondiale». De plus, les confinements anti-Covid-19 en Chine ont exacerbé les problèmes sur les chaînes d’approvisionnement.

L'économie américaine au ralenti

Tout ceci ralentit l’économie américaine. Aussi, la Fed anticipe-t-elle une croissance économique moins forte que prévu cette année aux États-Unis, à 1,7%, contre 2,8% précédemment. Elle s’attend par ailleurs à ce que le taux de chômage s’élève à 3,7% fin 2022 et 3,9% en 2023, quand elle le voyait auparavant à 3,5%, son niveau de février 2020, juste avant la crise sanitaire, qui était le plus bas depuis 50 ans.

Contrôler l’inflation sans faire plonger la première économie du monde en récession s’avère particulièrement délicat. Et les craintes de voir l’économie se contracter sont croissantes. «Que ce soit clair, nous ne sommes pas en train d’essayer d’induire une récession», a rétorqué Jerome Powell. «Nous essayons de ramener l’inflation à 2%, (et conserver) un marché du travail solide».

«La pire erreur serait d'échouer à contrôler l'inflation»

Il avait estimé lors de la précédente réunion en mai, que contrôler l’inflation sans récession restait atteignable, quoique difficile. Il a plus récemment souligné que cela pourrait s’accompagner d’une hausse du chômage. Le pays fait face à une importante pénurie de main-d’oeuvre qui pousse les entreprises à relever les salaires, phénomène qui contribue aussi à alimenter l’inflation.

«Jay» Powell a reconnu qu’il y avait «toujours un risque d’aller trop loin ou pas assez loin», mais que «la pire erreur que nous puissions commettre serait d’échouer (à contrôler l’inflation), ce qui n’est pas une option». La Fed se démène d’autant plus pour juguler l’inflation que sa crédibilité est en jeu. Ses responsables ont affirmé pendant des mois que cette hausse des prix ne serait que temporaire, et ont par conséquent commencé seulement en mars à resserrer la vis.

Que fait la Banque centrale européenne?

La ministre de l’Économie et des Finances de Joe Biden, Janet Yellen, avait elle aussi reconnu ne pas avoir anticipé une telle hausse des prix. La Fed est indépendante du gouvernement fédéral, mais Jerome Powell a récemment été reçu par Joe Biden à la Maison-Blanche, avec Janet Yellen, pour une rare entrevue dédiée à l’inflation.

La forte inflation partout dans le monde, et ses effets sur les marchés, inquiètent au point que la Banque centrale européenne (BCE) a tenu mercredi une réunion extraordinaire, à l’issue de laquelle elle a promis d’agir pour calmer les tensions sur la dette souveraine. La semaine passée, elle avait annoncé qu’elle commencerait en juillet à relever ses taux.

(ATS)

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