Cette inculpation vient après des mois d'efforts du pouvoir russe pour liquider le mouvement d'Alexeï Navalny, dont les organisations ont été déclarées «extrémistes» par la justice et interdites, et dont plusieurs collaborateurs et proches sont visés dans diverses affaires judiciaires.
Militant anti corruption et bête noire du Kremlin, Alexeï Navalny, 45 ans, est désormais inculpé pour «atteinte à l'identité et aux droits de citoyens» car son Fonds de lutte contre la corruption (FBK) a «incité les citoyens à commettre des actes illicites», notamment en les «appelant à participer à des rassemblements non autorisés».
Selon le Comité d'enquête russe, l'opposant et ses collaborateurs ont «organisé la diffusion sur leurs pages personnelles sur Internet et sur les pages du FBK (...) de publications appelant les citoyens russes à participer à des rassemblements non autorisés en janvier», lorsque plusieurs manifestations de soutien à M. Navalny avaient eu lieu pour protester contre son arrestation.
«Navalny était au courant à l'avance de la nature illégale» de ces rassemblements, ont estimé les enquêteurs.
L'équipe de l'opposant a pour sa part dénoncé sur Telegram une accusation «stupide», appelant une nouvelle fois les Russes à «voter intelligent» en septembre en donnant leur voix au candidat le mieux placé pour battre celui du pouvoir en l'absence de candidats de la formation de l'adversaire numéro 1 du Kremlin.
«Personne ne porte atteinte à l'identité et aux droits des citoyens comme (le président Vladimir) Poutine lui-même et tous ses hommes de main», a ironisé l'équipe de l'opposant.
«Les seuls droits que nous voulons violer sont ceux (...) que ces voleurs ont inventés pour eux-mêmes: le pouvoir infini, la possibilité de voler notre argent du budget et de ne pas prendre en compte l'opinion des citoyens», a-t-elle ajouté.
Le mouvement d'Alexeï Navalny fait face à des pressions sans précédent depuis le retour de l'opposant en Russie en janvier, après plusieurs mois de convalescence en Allemagne pour un empoisonnement dont il accuse le Kremlin.
Ses organisations ont été liquidées début août après avoir été désignées «extrémistes», des sites internet qui lui sont liés ont été bloqués sur ordre des autorités et plusieurs de ses collaborateurs sont visés par diverses procédures judiciaires allant d'infraction «aux normes sanitaires» au financement d'organisations «extrémistes».
Pour l'Occident et les ONG de défense des droits humains, ces détracteurs du système russe sont victimes de poursuites politiques. Européens et Américains ont d'ailleurs infligé des sanctions à des responsables russes.
Connu pour ses enquêtes anticorruption visant les élites, Alexeï Navalny purge actuellement une peine de deux ans et demi de colonie pénitentiaire pour une affaire de fraude remontant à 2014, qu'il juge politique.
Ses alliés dénoncent toutes ces mesures comme étant destinées à entraver les activités de l'opposition, particulièrement à l'approche des élections législatives de septembre.
Du fait du risque d'emprisonnement, plusieurs proches d'Alexeï Navalny ont quitté le pays ces derniers mois tandis que la répression a aussi touché d'autres opposants désireux de se présenter aux élections et des médias indépendants.
Ce scrutin se déroule en outre sur fond d'impopularité du parti au pouvoir, Russie Unie, de stagnation économique, de lassitude des électeurs et de scandales de corruption à répétition. (ATS)