«Nous avons dû l'abandonner»
Ils voulaient suivre les traces des Vikings, mais l'expédition vire au drame

Une expédition en mer du Nord à bord d'une réplique d'un navire viking s'est terminée tragiquement. Le capitaine suisse, Andy Fitze, raconte le voyage fatal au cours duquel une jeune exploratrice a perdu la vie. Malgré le drame, l'équipage veut continuer son voyage.
Publié: 13.12.2024 à 15:42 heures
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En août, un bateau viking a chaviré au large de la Norvège et une personne a perdu la vie. L'équipage était en expédition.
Photo: Sandra Blaser
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Christina Benz

L'équipage du Naddoddur, un bateau viking reconstruit, a pris la mer le 24 août passé, depuis les îles Féroé. Son objectif: naviguer sur la route historique des Vikings de la mer du Nord, jusqu'en Norvège, dans un bateau ouvert et sans moteur. Ce voyage s'est finalement transformé en tragédie: l'une des six membres de l'équipage, Karla Dana, une exploratrice mexicaine de 29 ans, a perdu la vie.

Pour Andy Fitze, chef de l'expédition et capitaine du navire, la mission était bien plus qu'une simple croisière. «Je suis fasciné par la découverte de choses que d'autres ne veulent peut-être pas voir. Pour moi, tout est une histoire de coeur. C'est exactement ce qui s'est passé ici», explique-t-il à Blick. Il voulait ramener l'histoire des Vikings, vieille de 1300 ans, dans le présent, pour inspirer les jeunes générations.

Être prêt aux situations extrêmes

Le projet est un peu le fruit du hasard: Andy Fitze, un passionné de voile, fêtait son anniversaire en avril 2023 sur les îles Féroé lorsqu'un constructeur de bateaux lui a montré la réplique d'un bateau viking – le Naddoddur. Le bateau a été construit dans les années 90. «Je ne souhaite rien de plus que de voir cet héritage passer à la génération suivante», lui a confié le constructeur de bateaux. Des mots qu'Andy Fitze a pris au pied de la lettre: peu après, il est revenu vers lui avec un équipage composé de six personnes.

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«Nous avons été projetés vers l'avant comme si nous faisions un saut périlleux. C'était totalement imprévisible»
Andy Fitze, chef de l'expédition et capitaine du navire
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Trois de ses membres avaient déjà voyagé avec lui à plusieurs reprises, deux participaient pour la première fois à l'une de ses expéditions. Ils doivent tous être capables de réagir dans des situations extrêmes. Et chacun a des tâches bien définies: «L'équipage ne doit pas seulement naviguer. Il doit aussi être doté d'autres compétences: médecine, navigation, connaissances sur l'Histoire.»

Un enchaînement de circonstances malheureuses

L'équipage s'est méticuleusement préparé à l'expédition durant plus d'un an. Le groupe a également effectué des tests. «Le bateau était parfaitement adapté», souligne le chef d'expédition. «Le bateau a été construit pour la mer et a déjà navigué sur la mer du Nord, avec un canot.»

Mais la mer du Nord recèle des dangers imprévisibles. Le quatrième jour de leur voyage, tout ne s'est pas passé comme prévu. Un enchaînement de circonstances malheureuses, selon Andy Fitze. «Les prévisions météorologiques étaient complètement fausses. Au lieu de 75 kilomètres par heure, nous avons eu un vent rapide de 140.» 

C'est alors qu'ils ont été frappés par derrière par ce qu'on appelle une «freak wave», une vague scélérate. «Nous avons été projetés vers l'avant comme si nous faisions un saut périlleux. C'était totalement imprévisible.» Quelques secondes plus tard, l'équipage s'est retrouvé dans l'eau, au milieu de la tempête. «Nous avions sept balises de détresse et en avons déclenché cinq immédiatement. Les garde-côtes norvégiens ont été alertés», explique le chef d'équipage.

«Nous avons dû l'abandonner»

Alors que cinq membres de l'équipage ont survécu, le voyage s'est terminé de manière fatale pour la plus jeune membre de l'équipage. Andy Fitze a tenté de réanimer la jeune femme, mais il n'y est pas parvenu. «Nous avons dû l'abandonner et partir sur le bateau de sauvetage», se souvient le capitaine. «Ce n'est qu'à ce moment-là que les deux derniers ont compris que nous avions perdu Karla.» Tous portaient des combinaisons de survie qui réduisaient considérablement la visibilité.

Trois hélicoptères de sauvetage, quatre canots de sauvetage et plusieurs bateaux commerciaux et civils se sont mis à la recherche de l'équipage. Fitze, trois autres Suisses et un Norvégien ont été sauvés. Karla Dana a été retrouvée morte le lendemain matin, près du bateau.

La police a clos l'enquête

Pour Fitze et l'équipage, c'était le choc. «Avec le temps, nous avons réalisé que c'était un miracle que cinq d'entre nous aient survécu», explique le capitaine. Le constructeur de bateaux féroïen de 75 ans était, lui aussi, triste d'apprendre la nouvelle. Mais l'équipage s'est montré rassurant: «Ton bateau a sauvé la vie de cinq d'entre nous.»

La police norvégienne a estimé que personne ne pouvait être porté pour responsable de cet «accident tragique». «Les conditions météorologiques s'étaient rapidement et radicalement détériorées», a-t-elle précisé. L'enquête a été close.

«Ma place est en mer»

Malgré cette tragédie, Andy Fitze souhaite poursuivre le voyage, notamment en mémoire de Karla Dana. «Nous sommes peut-être prêts à prendre des risques, mais nous ne sommes pas fatigués de vivre. Nous allons tirer les leçons de cette expérience et continuer à améliorer les mesures de sécurité», assure le Suisse. 

Andy Fitze a déjà dirigé plus de 20 expéditions et est devenu en 2023 membre du «Club des explorateurs», qui réunit des aventuriers et des explorateurs du monde entier. Karla Dana faisait aussi partie de ce club, dont font également partie le célèbre astronaute américain Neil Armstrong et trois membres de la famille d'aventuriers suisses Piccard. Pour conclure, Fitze déclare: «La place d'un voilier n'est pas au port, mais en mer. Et il en va de même pour moi.»

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