Municipales en Turquie
Erdogan à la reconquête d'Istanbul

Les Turcs élisent dimanche leurs maires, un scrutin clé pour le président Recep Tayyip Erdogan, déterminé à reconquérir Istanbul, la capitale économique du pays, passée aux mains de l'opposition en 2019.
Publié: 31.03.2024 à 14:29 heures
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Dernière mise à jour: 31.03.2024 à 17:00 heures
Le président turc Recep Tayyip Erdogan veut reconquérir Istanbul.
Photo: Francisco Seco

Devant les bureaux de vote d'Ankara, d'Istanbul et de Diyarbakir (sud-est), les électeurs se présentent depuis le petit matin sans excès d'enthousiasme, en ce troisième dimanche du mois du ramadan, ont constaté les correspondants de l'AFP.

«Chacun s'inquiète de son quotidien, la crise engloutit les classes moyennes», soupire Güler Kaya, 43 ans, qui dit avoir renoncé à tout loisir. «Si Erdogan l'emporte, ce sera encore pire», prédit cette Stambouliote.

«Il y a un besoin d'équilibre au moins au niveau local contre le gouvernement», juge Serhan Solak, 56 ans, un habitant d'Ankara soutenant le maire sortant d'opposition (CHP), Mansur Yavas. Si le chef de l'Etat n'est pas candidat à ces élections locales, son ombre plane sur les urnes, où plus de 61 millions d'électeurs sont appelés à se rendre.

Les bureaux de vote des 81 provinces du pays ont fermé leurs portes entre 16h00 et 17H00 (15h00 et 16h00 en Suisse), et les premiers résultats partiels sont attendus en début de soirée.

Le début d'une «nouvelle ère»?

À 70 ans, dont vingt-et-un au pouvoir, M. Erdogan a jeté toute sa stature d'homme d'Etat dans la campagne, labourant son pays de 85 millions d'habitants aux côtés des candidats de son Parti de la justice et du développement (AKP, islamo-conservateur).«Cette élection marquera le début d'une nouvelle ère pour notre pays», a affirmé le président après avoir voté à Istanbul à la mi-journée.

Le chef de l'Etat, qui dispose d'un temps d'antenne illimité, s'est particulièrement investi dans la bataille d'Istanbul, dont il fut maire dans les années 90 avant de conquérir le pouvoir, pour soutenir son candidat, un ancien ministre peu charismatique, Murat Kurum.

Il s'agit de reprendre la principale ville du pays au maire sortant (CHP) Ekrem Imamoglu, qui la lui avait ravie en 2019 à l'issue d'un âpre scrutin, lui infligeant son pire revers électoral. Les sondages créditent M. Imamoglu d'une courte avance.

«J'espère qu'Istanbul et la Turquie se réveilleront (lundi) par un beau matin de printemps», a lancé ce dernier après s'être rendu aux urnes en famille. S'il est reconduit, l'ambitieux édile, que M. Erdogan dépeint en «maire à temps partiel» dévoré par ses ambitions nationales, marquera des points pour la présidentielle de 2028.

L'opposition avance en ordre dispersé

Pour les observateurs, la participation, traditionnellement élevée, jouera un rôle déterminant notamment à Istanbul, où une mobilisation moindre pourrait nuire à M. Imamoglu. Dans la matinée, des affrontements en marge du vote dans la province à majorité kurde de Diyarbakir (sud-est) ont fait un mort et douze blessés, selon les autorités.

Contrairement aux municipales de 2019, l'opposition est cette année divisée, plombée par sa défaite à la présidentielle l'an dernier. Le parti pro-kurde DEM, troisième force au parlement, fait cavalier seul au risque de favoriser le parti au pouvoir, lui-même menacé par endroits par la poussée du parti islamiste Yeniden Refah.

Le CHP, principale force de l'opposition, veut pourtant croire en ses chances: «Nous allons remporter une grande victoire demain, qui ne sera la défaite de personne», a assuré samedi le président du parti, Özgür Özel, déambulant dans Izmir, ville de l'ouest du pays qui devrait rester acquise à l'opposition, tout comme Ankara.

Imamoglu peut gagner plus que l'élection

Les sondages prédisent une issue plus serrée à Antalya, la quatrième ville du pays, elle aussi aux mains de l'opposition. Dans un pays confronté à 67% d'inflation sur douze mois et au dévissage de sa monnaie (passée de 19 à 32 livres pour un dollar en un an), l'opposition espère que des électeurs voudront donner un avertissement au gouvernement.

«Si Imamoglu parvient à se maintenir, il aura gagné sa bataille au sein de l'opposition pour s'imposer» comme chef de file pour la prochaine présidentielle, note Bayram Balci, chercheur au Centre d'études et de recherches internationales (Ceri)-Sciences Po à Paris.

Mais à l'inverse, «s'il arrive à regagner Istanbul et Ankara, Erdogan y verra un encouragement à modifier la Constitution pour se représenter en 2028» et briguer un quatrième mandat, relève-t-il.

Les bureaux de vote fermeront à 17h00 (16h00 en Suisse) dans l'ouest et les premiers résultats partiels sont attendus en fin de journée.

(ATS)

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