«L'Europe a besoin de l'Italie»
L'UE déclare vouloir coopérer avec le gouvernement de Meloni

L'UE, très circonspecte dans un premier temps face à l'arrivée au pouvoir de l'extrême droite en Italie, s'est dite prête à «coopérer» avec le gouvernement eurosceptique de Giorgia Meloni. Celle-ci a prêté serment samedi et doit prendre ses fonctions dimanche.
Publié: 22.10.2022 à 14:33 heures
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Dernière mise à jour: 22.10.2022 à 22:55 heures
Giorgia Meloni a réussi à «dédiaboliser» son parti post-fasciste Fratelli d'Italia pour accéder au pouvoir.
Photo: Andrew Medichini

«Félicitations à Giorgia Meloni pour sa nomination comme Première ministre, la première femme à obtenir ce poste», a tweeté la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen. «Je compte sur une coopération constructive avec le nouveau gouvernement, face aux défis que nous devons relever ensemble».

Elle s'est réjouie sur Twitter d'avoir eu "bon premier coup de fil" avec la dirigeante italienne en ajoutant: «Nous allons travailler ensemble pour répondre aux défis critiques du moment, de l'Ukraine à l'énergie.»

Idem de la part du président du Conseil européen Charles Michel et de la présidente du Parlement européen Roberta Metsola. Mme Meloni a remercié les dirigeants européens, se disant «prête et impatiente de travailler ensemble».

En soirée samedi seulement, Berlin a réagi. Le chancelier allemand Olaf Scholz a félicité Giorgia Meloni. «Je me réjouis de continuer à travailler étroitement ensemble avec l'Italie, dans l'UE, l'Otan et le G7», a déclaré sur twitter le dirigeant allemand, qui a également remercié Mario Draghi pour «la bonne coopération germano-italienne» ces dernières années. Aucun commentaire en revanche du côté de Paris et Madrid.

Orban et Le Pen félicitent Meloni

Le très conservateur Premier ministre hongrois, Viktor Orban, bête noire de Bruxelles, a été l’un des premiers dirigeants européens à féliciter Giorgia Meloni, saluant «un grand jour pour la droite européenne».

L’extrême droite européenne était aussi à la fête: «Partout en Europe, les patriotes arrivent au pouvoir et avec eux, cette Europe des nations que nous appelons de nos voeux», s’est réjouie en France Marine Le Pen.

Sous les ors du palais romain du Quirinal, Giorgia Meloni et ses 24 ministres – dont seulement six femmes – ont «juré de respecter la Constitution et les lois» devant le président Sergio Mattarella.

«Voici l’équipe gouvernementale qui, avec fierté et sens des responsabilités, servira l’Italie. Maintenant, au travail», a ensuite affirmé la nouvelle Première ministre dans un tweet accompagné de la photo officielle du gouvernement. Étaient également présents à la cérémonie les proches de Giorgia Meloni, notamment son compagnon, le journaliste Andrea Giambruno, et leur fille Ginevra âgée de six ans.

Arrivée au pouvoir un siècle après Mussolini

La Romaine de 45 ans, qui a remporté une victoire historique aux législatives italiennes du 25 septembre, a réussi à «dédiaboliser» son parti post-fasciste Fratelli d’Italia pour accéder au pouvoir exactement un siècle après le dictateur fasciste Benito Mussolini, dont elle fut une admiratrice.

La passation de pouvoir entre Mario Draghi et Giorgia Meloni se tiendra dimanche à 10h30 au palais Chigi, siège du gouvernement, et sera suivie du premier conseil des ministres.

Elle dispose avec ses partenaires de coalition, le dirigeant populiste de la Ligue antimigrants, Matteo Salvini et le chef déclinant de Forza Italia, Silvio Berlusconi, de la majorité absolue tant à la Chambre des députés qu’au Sénat.

Un gouvernement pour rassurer Bruxelles

La composition du nouveau gouvernement reflète le désir de rassurer les partenaires de Rome, inquiets face à l’arrivée au pouvoir en Italie, pays fondateur de l’Europe, du chef de gouvernement le plus à droite et le plus eurosceptique depuis 1946.

Avant les élections, Ursula von der Leyen avait d’ailleurs suscité un tollé en Italie en évoquant «les instruments» à la disposition de Bruxelles pour sanctionner d’éventuelles atteintes aux principes démocratiques de l’UE en cas de victoire de l’extrême droite.

La nomination aux Affaires étrangères, avec le titre de vice-Premier ministre, de l’ex-président du Parlement européen Antonio Tajani, membre de Forza Italia, et celle de Giancarlo Giorgetti, un représentant de l’aile modérée de la Ligue, déjà ministre dans le gouvernement sortant de Mario Draghi, à l’Economie, devraient rassurer Bruxelles.

Tensions au sein de la coalition

Au moment où la troisième économie de la zone euro affronte, comme ses voisins, une situation économique difficile due à la crise énergétique et à l’inflation, la tâche de la nouvelle Première ministre s’annonce ardue, d’autant qu’elle devra veiller à l’unité de sa coalition qui montre déjà des fissures.

Tant Matteo Salvini que Silvio Berlusconi renâclent à accepter l’autorité de Giorgia Meloni, dont le parti a remporté 26% des voix aux élections, contre seulement 8% pour Forza Italia et 9% pour la Ligue.

Les médias se sont fait l’écho des multiples passes d’armes entre les trois dirigeants sur la répartition des postes au Parlement et au sein du gouvernement.

Elle-même atlantiste et favorable au soutien à l’Ukraine face à la Russie, Giorgia Meloni a dû affronter cette semaine les propos polémiques de Silvio Berlusconi, qui a affirmé avoir «renoué» avec Vladimir Poutine et imputé à Kiev la responsabilité de la guerre.

Des déclarations du plus mauvais effet qui ont obligé la Romaine à rectifier le tir mercredi en affirmant que l’Italie fait «pleinement partie et la tête haute» de l’Europe et de l’Otan.

Le droit à l'avortement pas menacé

Oratrice de talent, cette chrétienne conservatrice hostile aux droits LGBT a cependant promis de ne pas toucher à la loi autorisant l’avortement.

Son gouvernement devra avant tout se concentrer sur les nombreux défis, essentiellement économiques, qui l’attendent, à commencer par l’inflation et une dette colossale représentant 150% du produit intérieur brut (PIB), le ratio le plus élevé de la zone euro après la Grèce.

(ATS)

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