Pendant plus d’un an et demi, la guerre en Ukraine a fait la une des journaux du monde entier et dominé la politique étrangère des grandes puissances mondiales. Mais l’attaque du Hamas en Israël et la menace d’une escalade dans la bande de Gaza ont changé la donne. Le conflit en Ukraine est désormais relégué en second plan.
L’attaque du mouvement islamiste et nationaliste palestinien du 7 octobre a été qualifiée de «cadeau du Hamas à Vladimir Poutine», qui fêtait son anniversaire ce jour-là.
Comme le confirme une analyse de Google Trends, le conflit au Proche-Orient a dès lors considérablement détourné l’attention de l’Ukraine. En Russie, on s’en réjouirait déjà.
L’Ukraine déplore la lassitude de ses alliés
Bruxelles et Washington assurent Kiev de leur solidarité et de leur soutien indéfectibles. En Russie, on se moque désormais du fait que «le cauchemar de Zelensky et de ses complices se réalise», commente par exemple le journal «Komsomolskaïa Pravda». L’Occident oublierait-il déjà l’Ukraine?
Selon l’auteur de l’article dans le quotidien russe, le conflit au Proche-Orient est opportun pour Washington: «Les Etats-Unis disposent désormais d’une excuse très commode pour remettre cette 'Ukraine défaillante' à l’Union européenne, en faisant comme si les Etats-Unis n’avaient plus rien à voir avec cette affaire.» L’Occident ne quittera pas l’Ukraine «brutalement, mais progressivement», selon le commentateur.
Le ministre ukrainien des Finances Serhiy Marchenko arrive, à contrecœur, à la même conclusion. Par rapport au mois d’avril, Kiev doit redoubler d’efforts pour obtenir des promesses d’aide, a-t-il rapporté à l’agence de presse Reuters: «Je vois beaucoup de fatigue, je vois beaucoup de faiblesse chez nos partenaires, ils voudraient oublier la guerre, mais la guerre est toujours en cours, à grande échelle.» Il y a deux raisons principales à cela, d’après lui. Premièrement, «un glissement géopolitique et le contexte politique interne dans différents pays». Deuxièmement, les discussions seraient éclipsées par le conflit entre Israël et le Hamas.
Une période défavorable pour Kiev
Pour l’Ukraine – dont la contre-offensive qui dure depuis plusieurs mois ne porte que partiellement ses fruits – la crise israélienne arrive à un mauvais moment. Kiev a besoin de davantage d’armes et d’argent. «La patience de ses alliés est mise à l’épreuve», analyse le «Washington Post», car le conflit se prolonge. Sur le plan de la politique intérieure, la situation risque d’être compliquée pour le président Volodymyr Zelensky.
Washington réaffirme qu’il n’y a pas de contradiction entre l’aide pour l’Ukraine et celle pour Israël. «Nous pouvons faire les deux et nous ferons les deux», a soutenu la semaine dernière le secrétaire américain à la Défense Lloyd Austin devant les médias à Bruxelles.
Deux guerres en même temps?
Les Etats-Unis, qui ont déploré des pénuries de munitions à plusieurs reprises au cours de la guerre en Ukraine, ont déjà commencé à livrer des munitions et des équipements militaires à Israël, du matériel dont l’Ukraine pourrait également avoir besoin de toute urgence.
De plus, les Etats-Unis ont cessé tout soutien militaire à Kiev au moins jusqu’à la mi-novembre, une concession aux conservateurs pour éviter un shutdown, c’est-à-dire la fermeture des services de l’Etat américain en l’absence d’un accord des partis sur le budget du pays.
Le monde entier a actuellement les yeux rivés sur Israël et la bande de Gaza. Pour le président ukrainien, il ne reste plus qu’à en appeler à la persévérance de la population ukrainienne.
Depuis le 7 octobre, les visiteurs étrangers de haut rang sont moins nombreux à Kiev. Dans son discours du dimanche soir adressé au peuple, Volodymyr Zelensky s’est répété encore une fois: «L’Ukraine sait comment être forte. Et nous tiendrons bon. Nous devons résister et gagner. Et nous le ferons.»