L'AfD de Weidel impose son rythme
L'extrême droite allemande met les héritiers de Merkel à genoux

Le ton monte dans la politique allemande: le succès de l'AfD oblige les autres partis à corriger le tir. Pour les experts, il s'agit de céder face au populisme qui a le vent en poupe.
Publié: 05:18 heures
L'AfD et sa leader, Alice Weidel, impose ses thèmes et son rythme avant les élections anticipées de février. Ses concurrents tentent de s'adapter.
Photo: IMAGO/Revierfoto
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Guido Felder

La candidate de l'AfD à la chancellerie Alice Weidel est en pleine ascension. Non seulement Elon Musk, l'homme le plus riche du monde, fait de la publicité pour elle, mais les sondages sont également de son côté: selon dawum.de, son AfD a atteint la barre des 20%, tandis que la CDU/CSU, l'union du centre droit, est tombée à 30 points.

Le succès de l'AfD oblige les autres partis à corriger le tir. Ainsi, la CDU/CSU qui, sous l'égide de la chancelière Angela Merkel durant ses 16 ans à la tête du gouvernement, s'était engagée sur la voie du social, adopte aujourd'hui une position plus dure avant les élections du 23 février. Son programme ressemble de plus en plus à celui de l'AfD. Mais dans quelle mesure cette stratégie peut-elle être efficace?

Le chef actuel de la CDU Friedrich Merz, qui devrait devenir le nouveau chancelier, a choisi des mots radicaux: l'Allemagne a besoin d'un «changement politique fondamental». Il visait ainsi non seulement le précédent gouvernement du chancelier SPD Olaf Scholz, mais aussi la politique de sa collègue de parti, Angela Merkel, qui a été chancelière de 2005 à 2021.

A la dure

Sous l'égide d'Angela Merkel, environ 1,1 million de personnes étaient entrées en Allemagne depuis la crise des réfugiés de 2015. L'Union actuelle veut durcir massivement la politique d'asile menée jusqu'à présent et mettre l'accueil en suspens. 

Alors qu'Angela Merkel misait sur un vaste filet social, la CDU/CSU prévoit désormais de supprimer le revenu de citoyenneté et de distribuer l'aide sociale de manière restrictive sous la devise «encourager et exiger». De même, contrairement à l'ancienne chancelière qui a initié l'abandon de l'énergie nucléaire, la CDU/CSU maintient aujourd'hui l'option des centrales nucléaires afin de garantir une «politique énergétique qui fonctionne».

Enfin, Friedrich Merz ne veut pas seulement lutter contre l'extrémisme de droite, mais aussi explicitement contre l'extrémisme de gauche, et fermer les mosquées dans lesquelles on prêche la haine.

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«L'original est plus authentique et meilleur»

Un post de l'ancienne ministre de l'Agriculture de la CDU Julia Klöckner montre à quel point le parti de centre droit s'est déjà rapprochée de l'AfD. Dans ce message, elle assurait à ses électeurs être une «alternative démocratique» à l'AfD. A la suite des critiques massives, elle a rapidement supprimé le message.

Pour Wolfgang Schroeder, politologue à l'université de Kassel, en Allemagne, il est clair que «le programme de l'Union est en partie une reprise de positions de l'AfD». Il estime toutefois que cette adaptation est en partie naïve, imprudente et inefficace. «Les électeurs orientés vers l'AfD sentent que l'original est plus authentique et meilleur», analyse le politologue allemand.

Wolfgang Schroeder qualifie le changement d'orientation de la CDU de «soumission» au populisme ambiant. «La CDU court le risque de perdre son autonomie et sa propre capacité à justifier ses choix.»

«Réagir pour ne pas sombrer»

Jürgen W. Falter, professeur de recherche électorale à l'université de Mayence, en Allemagne, parle lui aussi d'une adaptation de certaines positions. Toutefois, à l'exception de la gauche, un tel changement d'orientation serait effectué par tous les partis. «Les partis, même ceux de l'éventail démocratique et modéré, ont reconnu qu'on ne peut pas ignorer pendant de nombreuses années des choses qui préoccupent les citoyens», explique l'universitaire.

Selon lui, l'adaptation de la direction «du point de vue de la recherche électorale, est la seule réaction raisonnable des partis, de l'extrême gauche jusqu'à la droite», pour ne pas laisser l'AfD continuer à progresser. «Les partis réagissent pour ne pas sombrer lors des élections», constate le chercheur.

Et que dit la cheffe de l'AfD, Alice Weidel? Elle qualifie la CDU de «parti imposteur» qui «recopie notre merveilleux programme électoral bleu». Lors du congrès du parti les 11 et 12 janvier, elle a donc appelé les Allemands à voter «pour l'original», et non pas pour une copie.

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