Lors d'un Conseil de défense lundi soir à Paris, le troisième en six jours, le président Emmanuel Macron a affirmé voir «de nets progrès dans le rétablissement de l'ordre». Il a toutefois annoncé que «pour un temps» des personnels militaires seraient mobilisés pour «protéger les bâtiments publics» dans l'archipel.
Aucune issue à la crise sécuritaire et politique que vit le territoire français du Pacifique sud (270'000 habitants) ne se dessine dans l'immédiat, après six morts et une semaine d'émeutes en réaction à une réforme du corps électoral contestée par les indépendantistes.
«Encore du chemin»
Le Premier ministre français Gabriel Attal a de son côté prévenu lundi «qu'il reste encore du chemin avant le retour à la normale». «Les forces de sécurité intérieure continuent d'arriver en nombre sur place grâce au pont aérien que nous avons mis en place. Nous progressons», a-t-il écrit sur X.
De la gauche à l'extrême droite en passant par la majorité, les voix se font chaque jour plus nombreuses pour réclamer un report du projet de loi constitutionnelle lié à la réforme, qui doit être adopté en Congrès avant fin juin.
Quatre présidents d'exécutifs d'outre-mer (Réunion, Guadeloupe, Martinique et Guyane française) réclament même son «retrait immédiat», afin d'«éviter une guerre civile».
La maire macroniste de Nouméa, Sonia Lagarde, a appelé lundi le chef de l'Etat à surseoir à cette réforme, accusée par les indépendantistes de «minoriser encore plus le peuple autochtone kanak» en élargissant le corps électoral des scrutins provinciaux.
Situation «précaire»
Sur le terrain, les résultats du déploiement massif de forces de l'ordre se font attendre, alors que les pénuries se multiplient.
Lundi matin, les barrages érigés par des indépendantistes semblaient plus nombreux et plus imposants encore, comme entre les quartiers de Montagne coupée et Montravel à Nouméa, où deux étages de voitures calcinées barrent désormais les rues. Des hommes, aux visages dissimulés derrière des foulards et équipés de barres de fer, y occupaient la route.
Signe des difficultés à reprendre la situation en main, l'aéroport international restera fermé aux vols commerciaux au moins jusqu'à jeudi 09h00, malgré les demandes répétées de l'Australie et la Nouvelle-Zélande de pouvoir évacuer leurs ressortissants.
«La situation reste précaire, même si elle s'améliore», a déclaré la porte-parole du ministère français de l'Intérieur, Camille Chaize, sur BFMTV après une nouvelle nuit de violences et dégradations.
Aéroport inaccessible
Malgré une opération lancée dimanche avec 600 gendarmes, la route menant de Nouméa à son aéroport, bloquée à de nombreux endroits par des militants indépendantistes, n'est toujours pas accessible aux habitants. Peu après le passage des gendarmes, une grande partie des «76 barrages neutralisés» avaient aussitôt été réinstallés par les indépendantistes.
La plupart sont «filtrants» et laissent passer pompiers ou ambulances, soutient dans un communiqué lundi la Cellule de coordination des actions de terrain (CCAT), collectif indépendantiste accusé par les autorités d'attiser les violences mais qui affirme rester «dans une démarche pacifique».
Conséquences «catastrophiques»
Depuis le début lundi dernier d'une vague de violences inédite dans l'archipel en quarante ans, six personnes ont été tuées: un Caldoche (Calédonien d'origine européenne), trois Kanak et deux gendarmes dont les dépouilles ont été ramenées lundi par un avion militaire sur une base aérienne près de Marseille.
Dans la nuit de dimanche à lundi, des détonations importantes ont été entendues dans Nouméa, notamment de grenades de désencerclement, utilisées par les forces de l'ordre pour disperser les émeutiers.
De manière générale, les voies de communication restent bloquées là où les émeutiers – estimés entre 3000 et 5000 – ont installé leurs barrages, et l'archipel vit au rythme du couvre-feu nocturne et sous état d'urgence.