La situation en Ukraine
Kiev appelle l'Occident à soutenir le «bouclier» ukrainien

Samedi à Munich, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a présenté son pays comme le «bouclier de l'Europe» face à la menace d'une invasion russe. Moscou a procédé de son côté à une démonstration de force en effectuant des tirs d'essai de missiles hypersoniques.
Publié: 19.02.2022 à 21:27 heures
Deux soldats ukrainiens ont été tués samedi et quatre autres blessés.
Photo: Anadolu Agency via Getty Images

«Depuis huit ans, l'Ukraine a été un bouclier. Depuis huit ans, l'Ukraine retient l'une des plus grandes armées au monde qui est massée à nos frontières et pas à celles» de l'UE, a lancé le dirigeant ukrainien depuis la Conférence sur la sécurité de Munich en Allemagne.

«L'Ukraine a reçu des garanties de sécurité lorsqu'elle a renoncé à ses armes nucléaires, le troisième potentiel mondial, a-t-il déclaré Nous n'avons pas d'armes. Ni de sécurité. Mais nous avons le droit d'exiger que cesse la politique d'apaisement et de demander des garanties de sécurité et de paix», a-t-il déclaré. Moscou est accusé par Washington et Kiev d'avoir massé 150'000 soldats aux frontières orientales ukrainiennes.

«Nous apprécions toute aide, mais tout le monde doit comprendre: ce ne sont pas des contributions de charité que l'Ukraine doit demander. C'est votre contribution à la sécurité de l'Europe et du monde», a-t-il dit.

Volodymyr Zelensky désire une rencontre avec Poutine

Le Kremlin continue de nier toute intention d'attaquer l'Ukraine voisine, pays pro-occidental que le Kremlin veut faire revenir dans sa sphère d'influence.

Mais Moscou conditionne la désescalade à des «garanties» pour sa sécurité, comme le retrait d'Europe de l'Est de l'infrastructure militaire de l'Otan et l'assurance que l'Ukraine n'adhèrera jamais à l'Alliance atlantique, des demandes inacceptables pour les Occidentaux.

Depuis Munich, Volodymyr Zelensky a pourtant réaffirmé son souhait que Kiev entre dans l'Otan, réclamant un calendrier «clair et réalisable» d'une adhésion. Il a également proposé une rencontre à Vladimir Poutine, proposition qu'il lui avait déjà faite en 2021 mais qui était restée lettre morte. "Je ne sais pas ce que le président russe veut, voilà pourquoi je propose qu'on se rencontre», a-t-il déclaré à la Conférence sur la sécurité de Munich.

Tirs de missiles hypersoniques

Les tensions, qui allaient crescendo depuis deux mois, sont désormais à leur comble. Washington se dit convaincu d'une invasion imminente de l'Ukraine par Moscou, et les incidents armés se multiplient entre Kiev et les séparatistes pro-russes dans l'est de l'Ukraine.

Les séparatistes, qui accusent Kiev de vouloir les attaquer, ont annoncé samedi une «mobilisation générale» des hommes en état de combattre, après avoir ordonné la veille l'évacuation de civils vers la Russie voisine.

S'ajoutant à cela, le président Vladimir Poutine a supervisé personnellement samedi des exercices «stratégiques» avec des tirs de missiles «hypersoniques», de nouvelles armes que le chef du Kremlin a précédemment qualifiées «d'invincibles» et pouvant porter des charges nucléaires.

Vladimir Poutine est apparu au côté de son homologue bélarusse Alexandre Loukachenko lors d'une réunion par visioconférence avec ses généraux coordonnant les tirs. Selon le Kremlin, ces derniers se sont déroulés avec succès et ont impliqué des bombardiers Tu-95 et des sous-marins.

Joe Biden convaincu d'une invasion imminente

Vendredi soir, le président américain Joe Biden s'est déclaré «convaincu» que Vladimir Poutine avait décidé d'envahir l'Ukraine, et que la multiplication des heurts visait à créer une «fausse justification» pour lancer une offensive dans «la semaine», voire les jours à venir.

Mais il a laissé la porte ouverte au dialogue. Tant qu'une invasion ne s'est pas produite, «la diplomatie est toujours une possibilité», a-t-il estimé. Dans ce sens, une rencontre entre le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken et son homologue russe Sergueï Lavrov est prévue pour le 24 février.

Deux morts et plusieurs blessés

Deux soldats ukrainiens ont été tués samedi dans une nouvelle flambée de violence sur la ligne de front avec les séparatistes pro-russes dans l'est de l'Ukraine, selon un nouveau bilan de l'armée ukrainienne.

Il s'agit des premiers décès parmi les militaires ukrainiens depuis plus d'un mois. Quatre soldats ont par ailleurs été blessés et hospitalisés, a indiqué l'armée dans un communiqué, accusant les séparatistes d'avoir commis 70 violations de la trêve censée être en vigueur.

Moscou a soutenu samedi qu'un tir ukrainien était tombé en territoire russe, près de la frontière ukrainienne, sans faire de victimes. Des informations démenties par Kiev.

Les observateurs de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) ont affirmé samedi avoir constaté une «augmentation spectaculaire» des violations du cessez-le-feu, au plus haut depuis juillet 2020.

La région russe de Rostov, frontalière de l'Ukraine, a déclaré l'état d'urgence pour faire face à un possible afflux de réfugiés en provenance des zones séparatistes. Près de 20'000 personnes ont déjà quitté ces régions, selon les responsables locaux pro-russes.

Aide humanitaire européenne

L'Union européenne (UE) a par ailleurs annoncé samedi qu'elle coordonnait l'acheminement d'aide humanitaire à l'Ukraine, en contribuant à la livraison par avion de fournitures médicales et de matériels de protection demandés par Kiev.

Cette aide, fournie par des États membres, «vise à soutenir les efforts de préparation de l'Ukraine à tous les scénarios possibles», a indiqué la Commission européenne dans un communiqué.

L'aide comprend des masques médicaux jetables, des gants stériles, des générateurs électriques, des antibiotiques et des désinfectants fournis par la Slovénie, l'Irlande, la Roumanie et l'Autriche.

La France et l'Allemagne rapatrient leurs ressortissants

La France a recommandé samedi à tous ses ressortissants de quitter l'Ukraine. Elle appelle ceux se trouvant dans les zones les plus exposées de l'est du pays à s'en éloigner «sans délai».

«Il est recommandé à tous les ressortissants français dont le séjour en Ukraine n'a pas de motif impérieux de quitter le pays», souligne la diplomatie française dans ses conseils aux voyageurs actualisés samedi. Ceux se trouvant «dans les oblasts de Kharkov, Lougansk et Donetsk» ainsi que dans la région de Dnipro sont «appelés «quitter sans délai ces zones», ajoute-t-elle.

L'Allemagne a également appelé samedi ses ressortissants à quitter «urgemment» l'Ukraine. «Nous mettons en garde contre tout déplacement en Ukraine», indique un communiqué publié par le ministère des Affaires étrangères, qui «exhorte de manière urgente les ressortissants allemands» qui s'y trouvent à «quitter sans délai le pays».

La compagnie aérienne allemande Lufthansa a annoncé la suspension de ses vols vers les villes ukrainiennes de Kiev et Odessa à partir de lundi et jusqu'à la fin du mois. La compagnie Swiss a aussi annoncé suspendre temporairement ses vols vers l'Ukraine dès lundi.


(ATS)

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