Un ex-tout puissant sénateur américain, le démocrate Robert Menendez qui s'était rapproché du républicain Donald Trump, a été condamné mercredi à New York à 11 ans de prison dans une vaste affaire de corruption en lien avec l'Egypte et le Qatar.
Les supplications en pleurs devant le tribunal fédéral pénal de Manhattan de cet ex-redoutable président de la commission des Affaires étrangères du Sénat, n'ont rien changé à la lourde sentence prononcée par le juge Sidney Stein, selon une journaliste de l'AFP.
Déjà reconnu coupable en juillet de corruption, le parlementaire du New Jersey, chez qui avaient été retrouvés un demi-million de dollars en liasses de billets et 150'000 dollars en lingots d'or, avait démissionné du Sénat en août et annoncé qu'il ne briguerait pas de nouveau mandat sous l'étiquette «indépendant».
«Vous vous êtes perdus»
«A un moment de votre parcours (...) vous vous êtes perdu», a tonné le juge Stein. En le condamnant à 11 années de réclusion criminelle pour des faits de corruption, le magistrat a tempêté contre «Bob» Menendez, autrefois tout puissant parlementaire du Congrès, à l'aile droite du Parti démocrate.
«Travailler pour le bien commun est devenu, pour vous, travailler pour votre propre intérêt», a déclaré le juge. Ce vieux routier de la politique, qui devrait se retrouver derrière les barreaux, n'a pas été immédiatement incarcéré et a dénoncé une «chasse aux sorcières».
«Le président (Donald) Trump a raison. La procédure judiciaire est politique et corrompue jusqu'à la moelle. J'espère que le président Trump va nettoyer le cloaque et rétablir l'intégrité du système», a lancé celui qui a fait toute sa carrière chez les démocrates des ex-présidents Joe Biden et Barack Obama, mais qui s'est rapproché du président républicain, de 2017 à 2021, et de nouveau depuis le 20 janvier.
Trafic d'influence en faveur du Caire
Da fait, Robert Menendez avait déjà été jugé pour corruption en 2015, mais son procès avait été annulé en 2017, faute d'un verdict unanime des jurés. Et en 2018, le ministère de la Justice – sous le premier mandat Trump – avait demandé à un juge d'abandonner toutes les poursuites contre lui.
Le 16 juillet dernier, la justice fédérale, sous l'administration Biden, l'a jugé coupable de 16 chefs d'accusation de corruption, tels que complot en vue de commettre des actes de corruption, complot pour agir comme agent d'un gouvernement étranger et entrave à la justice. Agé de 71 ans, il a favorisé trois hommes d'affaires du New Jersey en échange d'argent et de cadeaux et a usé de son influence politique au profit de l'Egypte et du Qatar.
Il a été jugé ainsi coupable de trafic d'influence en faveur du Caire, allié militaire de Washington, lorsqu'il faisait la pluie et le beau temps de la politique étrangère au Sénat. Condamné aussi pour avoir «protégé et enrichi» trois hommes d'affaires du New Jersey, frontalier de New York, où vivent neuf millions d'habitants, dont une importante diaspora du Moyen-Orient.
«Niveaux choquants de corruption» dénoncés
Devraient aller aussi en prison les hommes d'affaires Wael Hana et Fred Daibes. Le troisième, José Uribe, avait plaidé coupable sur une partie des poursuites et a collaboré avec la justice.
Lors du procès, le ministère public avait dénoncé «des niveaux choquants de corruption, des centaines de milliers de dollars de pots-de-vin, dont de l'or, du liquide et une Mercedes-Benz». Sa procureure Danielle Sassoon a enfoncé le clou mercredi en fustigeant un «abus de pouvoir scandaleux au plus haut niveau».
Clémence demandée en vain
Robert Menendez, qui avait déjà interjeté appel de son jugement, a demandé la clémence de la justice, produisant des lettres de soutien comme celle d'un proche, Donald Scarinci, qui a écrit se sentir «inspiré par Bob, avec l'espoir de changer le monde». «Je vais vous demander votre mansuétude, pas pour moi, mais pour Anthony», son fils souffrant d'autisme, a supplié en larmes l'ancien élu septuagénaire.
Son épouse Nadine Arslanian Menendez, sur laquelle les avocats de son mari ont tenté de faire porter le chapeau, est jugée séparément, mais elle est soignée d'un cancer du sein. Robert Menendez a été une figure aux Etats-Unis et à l'étranger pendant des décennies. Il est considéré comme un faucon en diplomatie, contre Cuba dont ses parents sont originaires, et contre le Venezuela et la Chine. Il est en revanche un soutien indéfectible d'Israël.