Donald Trump se croit imbattable. Après tout, quelle meilleure cible pour l’ancien président que Kamala Harris, cette procureure devenue sénateur, puis vice-présidente des États-Unis, sans vraiment connaître et défendre l’Amérique profonde dont il prétend être le bouclier? Pour le débat télévisé qui aura lieu dans la nuit de ce mardi 10 septembre, l’ex-magnat de l’immobilier New Yorkais a affûté ses armes verbales. Il va tout faire pour déstabiliser son adversaire et démontrer qu’elle n’est pas capable de rendre au pays sa grandeur économique. Mais attention, Trump est son pire ennemi. La preuve.
Trump peut toujours déraper
Le meilleur exemple de ses dérapages récents est intervenu lorsque l’ancien président a, le 31 juillet, tenté d’expliquer que Kamala Harris n’était pas vraiment noire, devant des journalistes afro-américains. Il était clair que Donald Trump n’était pas à son aise. Il s’est laissé emporter, à la limite de la provocation raciste. Or l’ancien président a besoin aussi d’une partie du vote de la communauté noire, et des autres communautés d’immigration récente, comme les Américains d’origine mexicaine. Il ne peut pas prétendre vouloir présider les États-Unis au service des seuls électeurs blancs du Midwest. À l’inverse, Kamala Harris, magistrate et procureure, attend ses dérapages pour le clouer au pilori et démontrer qu’il n’est pas digne de revenir à la Maison-Blanche.
Trump peut bredouiller
Attention: Donald Trump a perdu l’avantage de l’âge qu’il avait sur le président sortant Joe Biden. Lors de leur débat télévisé du 28 juin, qui vit Biden s’effondrer à force de bredouiller et de ne pas trouver ses mots, l’ex-chef de l’État n’a rien eu à faire. Il a poussé dans les cordes son adversaire et celui-ci s’est mis KO tout seul. Imaginez maintenant que Trump hésite à son tour, ou se trompe dans une formulation. Il sera immédiatement renvoyé à son état civil: celui d’un homme d’affaires sans scrupule, né le 14 juin 1946 à New York. Un septuagénaire endurci. Pas vraiment le profil pour incarner l’avenir dans un monde pris d’assaut par les jeunes générations, les nouvelles technologies et l’intelligence artificielle.
Trump est un «félon»
La justice a toujours été, pour Trump, une arme qu’il a utilisée contre ses adversaires, en particulier dans les affaires. Son parcours de promoteur immobilier est jonché de procès remportés par ses avocats payés à prix d’or. Lesquels, dans certains cas, ont fini par le trahir comme cela a été le cas pour Michael Cohen, devenu son pire ennemi lors du procès qui l’a opposé à l’ex-actrice porno Stormy Daniels, à l’issue duquel l’ancien président a été reconnu coupable sur toute la ligne, pour avoir payé son accusatrice afin de la faire taire. «Félon»: c’est le terme que Kamala Harris a souvent utilisé pour désigner Trump, dont la peine dans le procès Stormy Daniels sera seulement rendue publique après l’élection présidentielle du 5 novembre
Trump incarne le passé
C’est l’argument que Kamala Harris va marteler. Donald Trump incarne les années d’une Amérique révolue. Il mènerait le pays dans le mur, car toutes ses propositions sont réactionnaires. Gare toutefois, parce que beaucoup d’électeurs américains rêvent de l’Amérique d’hier, elle qui était redoutée et respectée dans le monde. Reste une évidence: les femmes et les jeunes sont deux catégories d’électeurs assez largement acquises à la candidate démocrate. Cette portion de l’électorat a besoin d’une autre vision que la promesse MAGA (Make America Great Again). Elle redoute aussi l’imprévisibilité de Donald Trump, et ce que sa politique signifiera en termes de renoncement à certaines libertés publiques.
Trump peut passer pour un dictateur
L’ancien président aime la provocation. Il en raffole. Sauf qu’il dit aussi ce qu’il pense, notamment sur le renvoi forcé des immigrés, l’un des grands thèmes de la campagne, quitte à se comporter temporairement comme un dictateur. Sa formule est connue. Il l’a dit en janvier 2024: il se comportera en dictateur au moins une journée, le temps de prendre des décisions pour déporter les immigrés illégaux, et quasiment leur déclarer la guerre. La promesse qu’il répète sans cesse, en plus des annonces économiques sur la lutte contre les importations, est celle de l’expulsion «des millions» d’étrangers arrivés sur le territoire américain ces dernières années. Mais les Américains veulent-ils vraiment courir le risque d’élire un président tenté à ce point par la manière forte?