Il crève l'écran
Denzel Washington, Macbeth qui transcende l'âge et la couleur

Depuis sa naissance voici quatre siècles sous la plume de Shakespeare, jamais Macbeth n'aura été incarné par quelqu'un de la trempe de Denzel Washington.
Publié: 14.01.2022 à 07:53 heures
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L'acteur Denzel Washington lors de la présentation de "The Tragedy of Macbeth", le 16 décembre 2021 à Los Angeles
Photo: Lisa O'Connor

L'acteur aux deux Oscars, considéré comme l'un des plus grands de son temps, a reçu pour son rôle dans «The Tragedy of Macbeth», qui sort vendredi sur Apple TV+, des nominations pour la plupart des prix cinématographiques à venir.

Il a 67 ans et la Lady Macbeth qui lui donne la réplique est Frances McDormand, 64 ans, ce qui peut sembler un peu vieux pour produire un héritier à leur royaume. «Ils sont fatigués, ils sont plus âgés», dit à l'AFP Denzel Washington, expliquant que le temps qui s'échappe joue un rôle prépondérant dans cette version, les poussant vers le mal et la folie.

«Ils sont comme ça: +Notre temps est venu. C'est notre dû. Donnez-le nous!», poursuit-il. «A situation extrême, mesures extrêmes. Et l'horloge tourne».

L'acteur, qui affronte épée au poing des ennemis à deux reprises durant le film, aurait-il interprété ce personnage différemment voici vingt ou trente ans ?

«J'aurais probablement été plus physique. Sans être limité par l'état dans lequel mes genoux se trouvent à ce moment de ma vie!», sourit-il.

Et bien sûr, Denzel Washington est noir, tout comme Corey Hawkins, 33 ans, qui joue son ennemi juré Macduff. Bien que totalement anachronique pour une histoire censée se dérouler au XIe siècle en Ecosse, ce détail est tout sauf nouveau pour une adaptation de Macbeth. Orson Welles avait par exemple mis en scène en 1936 une version de la pièce dans laquelle tous les protagonistes étaient noirs.

«On ne devrait même plus avoir à mentionner la diversité»

«De toute évidence, nous sommes divers et je pense que c'est une excellente chose», a déclaré Denzel Washington lors d'une table-ronde avec la presse. «A mon humble avis, on ne devrait même plus en être au point où il faut mentionner la diversité comme quelque chose de spécial», relève-t-il.

«Ces jeunes gens - noirs, blancs, bleus, verts, peu importe - sont hautement talentueux et qualifiés, c'est pour ça qu'ils sont là», insiste l'acteur.

«Je ne peux pas changer cette peau. Je ne peux pas changer ces cheveux. Je ne peux pas changer ça. Mais ce que je peux faire, c'est être excellent là où les gens ne m'attendaient pas», renchérit Corey Hawkins. «On ne pensait pas en termes de noirs et de blancs», assure-t-il.

«Un œil neuf»

Le réalisateur Joel Coen a choisi de tourner son film en noir et blanc, avec un format d'image presque carré qui était utilisé vers la fin du cinéma muet et des bruitages minimalistes qui lui donnent la saveur des débuts d'Hollywood.

A plusieurs reprises, «Macbeth» a été adapté sur grand écran, y compris par des réalisateurs de légende comme Orson Welles, Akira Kurosawa ("Le Château de l'Araignée") ou Roman Polanski.

Denzel Washington jure n'avoir jamais vu aucune de ces versions et même les avoir délibérément fuies, pour éviter d'avoir à se dire «zut, comment diable vais-je pouvoir être meilleur que ça ?»

«Je ne voulais pas que ça affecte ce que j'allais en sortir, donc j'arrivais avec un œil neuf et mon imagination», explique l'acteur, dont le Macbeth débute tout en douceur et subtilités avant de verser dans la rage, l'ambition puis la folie.

Denzel Washington n'en est pourtant pas à son premier Shakespeare: il a joué «Jules César» à Broadway et figuré dans le film «Beaucoup de bruit pour rien» de Kenneth Branagh.

Corey Hawkins espère que les enfants issus de minorité auront à leur tour envie de se frotter à Shakespeare après avoir vu son aîné et les autres acteurs noirs du film. «Ça pourrait piquer leur curiosité», dit-il.

Car «oui, les personnes noires aiment Shakespeare. Nous aimons probablement Shakespeare sans même le savoir parce qu'il y a plein de références à Shakespeare dans les chansons et la culture que nous aimons», souligne-t-il.

«Il nous appartient autant qu'aux autres», lance Corey Hawkins.

(AFP)

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