Dimanche de deuil à Notre-Dame de Paris. Le commandant en chef de sa résurrection est mort. Mais la bataille continue et elle doit impérativement être gagnée d’ici à la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques d’été à Paris, le 26 juillet 2024.
Jean-Louis Georgelin, disparu en montagne dans les Pyrénées ce vendredi à l’âge de 74 ans, était bien plus qu’un ancien chef d’État-Major de l’armée française. Il était l’homme d’une mission souvent présumée impossible: redonner vie et splendeur à la plus célèbre cathédrale de France et du monde, rongée par les flammes du pire incendie de son histoire, les 15 et 16 avril 2019.
Un officier supérieur très respecté, catholique convaincu
Dans d’autres circonstances, le décès de cet officier supérieur très respecté, catholique convaincu, aurait surtout attiré les condoléances de ses pairs. Rien de tel dans le cas de Jean-Louis Georgelin, devenu depuis sa nomination par Emmanuel Macron, fin avril 2019, comme principal responsable des travaux de rénovation et de restauration de l’édifice français le plus connu dans le monde avec la tour Eiffel et le musée du Louvre.
Car c’est une course la montre qui se joue depuis lors. Le 26 juillet 2024, les bateaux et les péniches sur lesquels évolueront les athlètes de tous les pays passeront au pied de Notre-Dame. C’est en effet sur la Seine que la cérémonie d’ouverture des JO aura lieu. Or comment justifier, d’ici-là, que les principaux travaux ne soient pas achevés, même si la date officielle de réouverture de ce lieu saint de l’Église catholique est le 8 décembre 2024. Un jour choisi parce qu’il revêt un caractère religieux: il s’agit de la fête de l’Immaculée-Conception.
Revoir en vidéo l’incendie de Notre-Dame le 15 avril 2019
Il ne se laissait pas impressionner
«Avec la mort du général Georgelin, Notre-Dame de Paris perd celui qui, chaque jour, pierre après pierre, depuis quatre ans, restaurait sa beauté blessée, pour rendre à la France l’héritage de ses bâtisseurs», a affirmé dans un communiqué le président français Emmanuel Macron. Vrai. Expérimenté, vétéran de plusieurs théâtres d’opérations militaires et d’opérations extérieures en Côte d’Ivoire, en Afghanistan, dans les Balkans ou au Liban, cet officier s’était empressé avec succès, dès 2019, d’imposer une discipline de fer à tous les ministres concernés par la reconstruction.
Il supervisait les commandes de matériels et leur acheminement. Il avait notamment donné son aval à l’achat de poutres de chênes dans le Jura suisse, pour la réfection de la charpente dévorée par les flammes. Il avait aussi réussi à imposer sa loi à la mairie de Paris, dont la gestion municipale est très décriée à l’approche des Jeux olympiques. «Il avait eu les larmes aux yeux quand les voûtes du transept de Notre-Dame avaient été posées, l’hiver dernier, si grande était l’émotion, a poursuivi Emmanuel Macron. Il avait empoigné sa mission de reconstruction avec son ardeur de toujours, sans se laisser intimider ni par les 42’000 m² de voûte et de murs à restaurer, ni par les 1200 chênes destinés à la nouvelle charpente, ni par les délais serrés.»
Une trame pour de futurs récits
Notre-Dame et le Général: à coup sûr, le décès de cet officier devenu le commandant en chef de la résurrection de l’une des plus célèbres cathédrales du monde va fournir une trame pour de futurs récits, dans la foulée du fameux «Notre-Dame de Paris» de Victor Hugo, publié pour la première fois en mars 1831.
D’un côté, une très vieille dame de pierre et de bois, dont la construction dura de 1163 à 1345. De l’autre, un homme pétri de valeurs catholiques et républicaines, qui sut par exemple peser de toute son influence pour obtenir la reproduction à l’identique de la fameuse flèche conçue par l’architecte Viollet-Le Duc et inaugurée en 1859.
Une fois encore, Notre-Dame aura survécu au pire, sous les regards de la planète entière. 842 millions d’euros de dons ont été récoltés auprès du public pour sa restauration. Le Général Jean-Louis Georgelin en était à la fois le gardien et le garant. Notre-Dame de Paris l’avait adopté.