C’est peut-être le calme avant la tempête. Le moment où l’on croit l’ordre public revenu, alors qu’il reste très fragile et menacé au quotidien dans des grandes parties du territoire français. Ce calme, les 45'000 policiers et gendarmes déployés dans Paris pour les JO et les Jeux paralympiques l’observent avec méthode. Ils savent qu’ils sont aussi, durant cette période, la vitrine de la France en liesse sportive. Mais après? Quel pays vont-ils retrouver?
La police française était en colère avant les Jeux. Elle risque fort de le redevenir très vite, sitôt les congés et vacances de ses agents éclusés, puisqu'aucun congés n’ont pu être pris cet été, en raison de la parenthèse olympique parisienne. Côté pile, un succès incontestable, puisque le déploiement massif de forces de l’ordre a permis d’éviter tout problème majeur dans la capitale française, y compris lors des deux cérémonies d’ouverture très risquées, sur la Seine et sur les Champs-Élysées.
Côté face: une avalanche de nouvelles sombres, à commencer par la mort d’un motard de la gendarmerie nationale percuté par un chauffard en état d’ébriété, multirécidiviste, lundi soir 26 août à Mougins, dans l’arrière-pays niçois. À Nîmes (Gard) quelques jours plus tôt, c’est le commissariat flambant neuf d’un quartier connu pour le trafic de stupéfiants qui a été incendié. Bref, Paris a été mis sous clefs pendant un mois. Mais dans le reste de la France, les incivilités parfois mortelles se poursuivent.
Atouts à faire valoir
La colère de la police est d’autant plus programmée que celle-ci, désormais, a de sérieux atouts à faire valoir. Pendant les jeux à paris, la population française et étrangère a loué les services des forces de l’ordre. Leur disponibilité, voire leur participation à quelques événements festifs ont fait le tour des réseaux sociaux. Finie, l’image du flic français violent qui tabasse avant de vous interroger, comme beaucoup de jeunes de banlieue l’affirment. Il faut se souvenir qu’il y a un an, le 27 juin 2023, la mort d’un jeune de Nanterre (Hauts-de-Seine) tué par un tir policier lors d’un contrôle avait déclenché des émeutes dramatiques. Onze jours d’affrontements, plus d’un millier de personnes blessées, dont 782 agents des forces de l’ordre. Quelque 16'400 sinistres ont été déclarés aux assureurs pour un montant total de 793 millions d’euros. Et plus de 3500 bâtiments abîmés ou endommagés.
Ce qui a changé depuis? Rien. L’affaire de Mougins démontre au contraire que les cas de récidives et de refus d’obtempérer (plus de 23 000 en France en 2023) demeurent une plaie dans un pays réputé pour ses incivilités. Or c’est cette réalité que les policiers et gendarmes mobilisés à Paris depuis la mi-juillet vont retrouver dès la fin des Jeux paralympiques le 8 septembre. Quel changement! Beaucoup d’unités de policiers montées de province ont pu renouer, dans la capitale, avec la population, et avoir le sentiment de refaire un travail policier de proximité. Mais pendant ce temps-là, les quartiers difficiles demeurent aux mains des trafiquants et des caïds. Pire: le risque est que ces derniers aient profité de la parenthèse olympique pour se remettre des dommages causés par les «opérations place nette XXL», ces descentes de police massives organisées au printemps.
Apporter des réponses
L’intermède gouvernemental français attise aussi les revendications dans le monde policier. Plusieurs syndicalistes se sont engagés en politique, notamment dans les rangs du Rassemblement national (droite nationale populiste). L’actuel ministre de l’Intérieur démissionnaire, Gérald Darmanin, est donné partant lorsque surviendra le remaniement gouvernemental attendu, après la nomination d’un nouveau premier ministre. Que se passera-t-il alors? Le jeune premier ministre sortant, Gabriel Attal, 35 ans, avait fait du rétablissement de l’autorité sa priorité. Dès la fin des JO, c’est ce refrain que les policiers et gendarmes vont entonner. Et cette fois, il faudra leur apporter des réponses.