Dans un récit confus et souvent contradictoire, Romain V. a tenté d'expliquer mercredi pourquoi il s'était rendu six fois à Mazan pour agresser sexuellement Gisèle Pelicot, réfutant tout «viol» à son encontre, malgré des vidéos accablantes. Devant la cour criminelle de Vaucluse, cet homme de 63 ans, actuellement détenu, a alternativement justifié sa présence entre décembre 2019 et 2020 par «peur» de Dominique Pelicot, par sa volonté de chercher «du lien social», ou en prétendant avoir agi comme «un zombie autoguidé».
«Je ne me pose aucune question, comme un zombie autoguidé. Je ne comprends même pas comment il (Dominique Pelicot, NLDR) a pu faire pour me faire venir six fois», a-t-il expliqué, suscitant la stupeur de la cour et notamment de son président, Roger Arata. L'accusé s'est-il soucié a un seul moment de requérir le consentement de la victime, demande le magistrat ?
«J'ai eu l'autorisation du mari», répond Romain V., reprenant un argument déjà avancé par plusieurs de cette cinquantaine d'homme jugés à Avignon pour avoir violé Gisèle Pelicot, à l'invitation de son mari, qui l'assommait d'anxiolytiques. Une dizaine d'autres, jamais identifiés, ne seront jamais jugés.
Quatre vidéos accablantes
«Je pensais qu'elle était en semi-réveil, fatiguée. On a des somnolences. Moi, avec mon traitement, j'ai des somnolences», a affirmé Romain V., faisant référence à sa santé précaire. Séropositif depuis 2004, il est sous traitement mais dit «ne pas être contagieux», ce que confirme l'OMS à ce sujet. A aucune reprise cependant il n'a porté de préservatif.
«Vous avez eu le même ressenti à chaque fois? Sérieusement?», l'a relancé, incrédule, M. Arata. «Oui oui», a simplement répondu l'accusé. Pour contredire ces justifications aléatoires, la partie civile a demandé la diffusion devant la cour de quatre vidéos parmi les centaines retrouvées sur le disque dur de Dominique Pelicot, où étaient méticuleusement référencés les actes commis.
Sur celles-ci, accablantes, on voit notamment Romain V. embrasser longuement Gisèle Pelicot, lui enfonçant sa langue dans sa bouche, sans aucune réaction de sa part, excepté des ronflements prononcés. Dans une autre, on le voit la pénétrer de face, alors qu'elle est totalement inerte, sur le lit conjugal. Les ronflements redoublent.
«Je n'avais pas l'intention de violer madame»
Sur la troisième, il pratique des pénétrations digitales en souriant, faisant des gestes à la caméra tenue par Dominique Pelicot, alors qu'il a pourtant dit devant la cour ne pas avoir su qu'il était filmé, tout en chuchotant pour ne pas la réveiller. Sur la dernière, il pratique une fellation forcée sur Gisèle Pelicot qui, toujours ronflante, se met à suffoquer. «A la vue de ces faits, vous pouvez prononcer ce que vous avez fait? Avez-vous violée madame Pelicot?», lui demande, à plusieurs reprises, un des avocats de Gisèle Pelicot, Stéphane Babonneau.
«Non», et «je n'en sais rien», lui répond l'accusé. «Je m'excuse pour les faits qui me sont reprochés. Je regrette tout ce qu'il s'est passé. Je n'avais pas l'intention de violer madame. J'ai des regrets, beaucoup», poursuit-il. Gisèle Pelicot n'écoute même pas ses paroles, préférant parler à sa psychologue assise à ses côtés. Poursuivi pour viols aggravés, il risque 20 ans de réclusion criminelle, comme la plupart des 51 accusés de ce procès hors norme.