Fédérations aux prises avec la justice
Quel méchant virus a frappé le sport français avant les JO de 2024?

Les fédérations françaises de football et de rugby, ainsi que la ligue de handball sont secouées par une série d'affaires et de scandales. À la veille des Jeux Olympiques d'été de 2024, le pays voit ses principaux dirigeants sportifs s'enfoncer dans les scandales.
Publié: 27.01.2023 à 10:05 heures
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Dernière mise à jour: 17.02.2023 à 19:01 heures
Président de la Ligue nationale de handball, l'ancien gardien de l'équipe de France Bruno Martini a écopé mercredi 25 janvier d'un an de prison avec sursis pour corruption de mineur et détention d'images pédopornographiques. Il a plaidé coupable.
Photo: AFP
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Richard WerlyJournaliste Blick

La France du sport professionnel est malade. Gravement malade. A Paris, où chaque semaine s’ouvre sur un nouveau scandale impliquant le dirigeant d’une fédération sportive de premier plan, l’inquiétude est de rigueur à un peu plus d’un an des Jeux olympiques d’été qui seront accueillis dans la capitale française. Dernier rebondissement: la démission tant attendue ce vendredi 27 janvier du président de la Fédération française de Rugby Bernard Laporte.

Vertus du sport

Le 26 juillet 2024, la cérémonie d’ouverture des JO, éloge mondial aux vertus du sport, se déroulera sur la Seine, en plein cœur de Paris. Mais dans les coulisses du sport business, tout tangue dans l’Hexagone. Noël Le Graet, président de la très puissante Fédération française de football, est accusé de harcèlement. Bernard Laporte, président de la Fédération française de rugby, vient d’être placé en garde à vue et sa démission a été annoncée ce vendredi 27 janvier par la ministre des Sports Amélie Oudéa-Castera. Et Bruno Martini, président de la Ligue nationale de handball, vient d’écoper ce mercredi 25 janvier d’une peine d’un an de prison avec sursis pour «corruption de mineur et détention d’images pédopornographiques», après avoir plaidé coupable.

En façade, une insolente santé

Foot, rugby, handball. Sur ces trois fronts, la France sportive devrait afficher une insolente santé. Au Qatar, les Bleus ont failli décrocher le Graal d’une seconde Coupe du monde consécutive, après une finale de légende perdue contre l’Argentine. Coté rugby, le XV de France a fait carton plein en 2022 avec un Grand Chelem au tournoi des six nations, avant que la Coupe du monde du ballon ovale débarque dans l’Hexagone du 8 septembre au 28 octobre prochain. Et coté handball, le scandale pédophile de Bruno Martini intervient au moment où la France vient d’éliminer l’Allemagne en quarts de finale du Championnat du monde!

Où est le problème? La réponse est simple. Elle tient en trois mots: Abus de pouvoir. Et elle se résume à une faiblesse: une gouvernance désuète, où le poids des personnalités l’a longtemps emporté sur la transparence. Dans un pays dominé par la puissance publique, où l’Etat est omniprésent, les fédérations sportives se sont transformées en forteresses, dominées par des barons qui règnent sans partage.

Dans le monde du foot, le Breton Noël Le Graet, 82 ans, avait su museler les fédérations départementales. Chez les rugbymen, l’ancien joueur et entraîneur Bernard Laporte, 58 ans, avaient passé un pacte avec l’un des entrepreneurs les plus influents du ballon ovale: le milliardaire des échafaudages Mohed Altrad, actionnaire principal du club de Montpellier. A la ligue de handball, Bruno Martini, colosse de 1,95 mètre, tenait ses opposants à distance, avec en bandoulière son titre de champion du monde en 1995.

Distribution de faveurs

Tous les trois ont su distribuer les faveurs, «renvoyer les ascenseurs», marginaliser leurs adversaires. «Le monde du sport possède les deux leviers qui impressionnent les politiques: l’argent et l’audience populaire. Ils ont trop longtemps obtenu une sorte d’immunité et d’impunité», jugeait mercredi à France Info Vincent Chaudel, un économiste du sport.

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Une autre affaire avait défrayé la chronique du sport français voici deux ans: celle de la Fédération des sports de glace, dont le président historique Didier Gailhaguet avait finalement dû démissionner face aux accusations de violences sexuelles. Peut-on généraliser? Les affaires se ressemblent-elles? La réponse est malheureusement oui. Dans chaque cas, la surveillance des pouvoirs publics a longtemps fait défaut. Les scrutins indirects qui élisent les dirigeants des fédérations nationales sont verrouillés et parfois truqués. Ce n’est pas un hasard si la Fédération française de rugby a initié un référendum pour remplacer Bernard Laporte. Mercredi, les clubs ont finalement voté non à 51% contre le candidat de ce dernier. Un score serré, malgré sa démission qui est intervenue ce jeudi: «Les allégeances ne disparaissent pas du jour au lendemain. Dans le sport, la fidélité est très importante, alors…», juge un journaliste de «L’Équipe».

L’Etat français empêché

Le problème est que l’Etat français ne parvient pas non plus à faire le ménage au sein de la préparation des Jeux olympiques. Depuis des mois, le Comité national olympique et sportif (CNOSF) se déchire. Sa présidente, Brigitte Henriques, élue en juin 2021, a été épinglée par un audit interne sur certaines dépenses pour environ 4000 euros. Comment en sortir? Impossible de parier sur l’intervention publique, car les fédérations concernées se retrouveraient alors mises au ban de leurs instances internationales. La clé, estiment tous les connaisseurs du sport business, c’est le renouvellement des cadres. Rompre avec la génération de dirigeant qui a émergé dans les années 2000. Promouvoir des cadres qui ont pleinement compris la révolution #metoo.

Le sport français est malade. A ce stade, et compte tenu de la pression des événements comme la Coupe du monde de Rugby et les JO 2024, la chirurgie s’impose dans les ressources humaines pour extirper les tumeurs qui ont proliféré.

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