La fille du Premier ministre français François Bayrou a déclaré au site d'investigation Mediapart que son père avait bien rencontré en 1998 le juge chargé d'enquêter sur un viol à l'école catholique de Bétharram, établissement au coeur d'accusations de violences et pédocriminalité.
Bayrou avait d'abord nié cette rencontre, avant de changer de version. «Il ne s'en souvient pas, je pense, mais je suis là le soir où il rentre de chez le juge Mirande, on est là tous seuls tous les deux et il me dit 'ne le répète surtout pas, j'ai juré d'être dans le secret de l'instruction'», a déclaré Hélène Perlant mercredi soir.
«Il est en prison, qu'il y reste»
Interrogé l'an dernier dans la presse sur cet épisode, rapporté par l'ex-juge Christian Mirande, François Bayrou l'avait d'abord nié. Mais le Premier ministre, mis sous pression politique dans cette affaire, a changé de version depuis, évoquant une rencontre fortuite avec l'ancien magistrat, domicilié comme lui à Bordères près de Pau (sud-ouest), lors de laquelle ils auraient eu une conversation informelle sur l'affaire de viol impliquant un religieux de Bétharram, le père Carricart.
«C'est mon voisin depuis cinquante ans dans mon village. Il s'agit d'une amitié de longue date, avant même qu'il ne soit magistrat. Est-ce que nous avons pu parler de cette affaire? Sans doute, oui», déclarait ainsi Bayrou le 18 février à l'Assemblée nationale, la chambre basse du Parlement français. «Christian Mirande est un juge d'une absolue intégrité et il n'a jamais communiqué le moindre élément du dossier: nous avons pu parler de l'ambiance, de l'établissement, jamais du dossier», avait ajouté le chef du gouvernement.
Selon Hélène Perlant, elle et son père ont pourtant parlé, ce soir-là, des accusations visant le père Carricart, qui avait été mis en examen pour viol et placé en détention provisoire. «Est-ce que tu crois possible ça?», lui a-t-il demandé. «On est resté là. Je lui ai dit 'écoute...'. Et il m'a dit: 'il est en prison, qu'il y reste'», a relaté la fille devant la caméra de Mediapart.
«Donc il vous a confirmé avoir parlé au juge Mirande?», l'a relancée le journaliste. «Avoir juré au juge Mirande de ne pas trahir le secret de l'instruction, le fait que le juge Mirande avait parlé», a répondu la fille de François Bayrou. Le chef du gouvernement doit être entendu sous serment, le 14 mai, par la commission d'enquête parlementaire née du scandale, devant laquelle l'ex-juge Mirande a déjà témoigné le 10 avril.