L'été est là. Les degrés s'envolent sur le thermomètre – tout comme les restrictions Covid dans la plupart des pays du monde. De nombreux Suisses sont dans les starting-blocks pour partir au soleil. Que de réjouissances! Mais c'est compter sans les conséquences à moyen et long terme de la pandémie...
Un voyage en avion sera-t-il synonyme de grosse galère pour la troisième année consécutive? C'est ce que prédit Philippe Strässle, le représentant des droits des passagers aériens, et directeur du portail Airhelp Suisse: «Il faut s'attendre à ce que tout ne se passe pas sans heurts cette année. Les signes avant-coureurs sont là.»
En cause: le manque de personnel à la suite des licenciements Covid, qui se traduisent aujourd'hui par un retard sur la demande en matière d'embauche.
Cela vaut pour les compagnies aériennes, mais aussi pour le personnel au sol. «Les trois grands aéroports de Suisse sont tous plus ou moins touchés de la même manière», explique Philippe Strässle. «À Zurich, Genève et Bâle, j'ai moi-même déjà eu de mauvaises expériences cette année.» Du côté de Genève notamment, on s'attend à ce que la situation soit tendue tout l'été.
«J'envisage de rentrer chez moi»
Le Zurichois Fabio Blasi peut lui aussi témoigner d'un voyage laborieux. Vendredi, il a pris un vol KLM de Zurich à Amsterdam, d'où il a poursuivi sa route vers la Norvège. Pas de gros retards. L'homme est bien arrivé à destination... Mais on ne peut pas en dire autant de ses bagages: «Depuis, je vais tous les jours à l'aéroport pour demander ma valise. Mais la compagnie aérienne ne peut même pas me dire où elle se trouve.»
Quatre jours plus tard, Fabio Blasi n'a toujours pas de nouvelles. «Je voulais faire de la randonnée et d'autres belles choses, mais les chaussures de rando sont dans les bagages. Là, j'avoue que j'envisage de reprendre l'avion pour rentrer chez moi. Les vacances sont foutues. Je ne peux pas en profiter dans ces conditions.»
Amsterdam: des files d'attente jusque dans la rue
Mais les situation les plus tumultueuses surviennent naturellement davantage dans les grands aéroports européens. Un exemple en tête de liste: Amsterdam. Les passagers au départ de l'aéroport néerlandais d'Amsterdam-Schiphol vivent depuis des semaines un énorme chaos. Les files d'attente à l'entrée sont parfois si longues qu'elles commencent des centaines de mètres avant le bâtiment de l'aéroport.
Cela signifie des heures d'attente. Certains voyageurs ratent leur vol. Les responsables ont finalement tiré la sonnette d'alarme, et décrété une réduction du nombre de passagers autorisés à voyager via l'aéroport. En conséquence, de nombreux vols sont annulés. D'innombrables rêves de vacances s'envolent.
Londres: de gargantuesques montagnes de bagages
L'immense aéroport londonien d'Heathrow est lui aussi proche de l'effondrement. Des photos et des vidéos montrant des montagnes de bagages, de plusieurs mètres de haut, trônant dans le bâtiment de l'aéroport, font actuellement le tour des réseaux sociaux.
Un problème avec le système de bagages est à l'origine de cette situation, qui sévit depuis vendredi dernier, a indiqué l'aéroport dans une déclaration officielle. Une partie des passagers a dû décoller sans ses bagages. L'aéroport déclare cependant travailler en étroite collaboration avec les compagnies aériennes et les passagers concernés, qui devraient retrouver leurs valises perdues dans les deux jours.
Il faut cependant regarder le problème en face: le directeur de Heathrow prévient que les passagers aériens de Grande-Bretagne et d'Europe doivent s'attendre à des perturbations pendant encore au moins 18 mois. C'est le temps qu'il faudra, selon lui, à l'ensemble du secteur pour rétablir ses capacités au niveau d'avant la pandémie.
Berlin: des temps d'attente records
L'Allemagne n'est pas épargnée. L'ancien rédacteur en chef de «Bild», Kai Diekmann, a tweeté lundi depuis l'aéroport de Berlin-Brandenburg qu'il avait déjà vécu beaucoup de choses. Mais «le niveau du chaos de ce matin est impressionnant». Selon lui, les postes de contrôles de la sécurité n'étaient que partiellement occupés, et le temps d'attente à ces bornes s'élevait à minimum une heure.
Dans d'autres aéroports allemands aussi, il faut avoir les nerfs solides. À Hambourg, par exemple, les rapports font état d'une gestion des bagages catastrophique. De nombreuses valises s'entassent dans le hall des arrivées. À Düsseldorf, de nombreux vols ont dû être annulés ces derniers jours, en raison du manque de personnel.
Bruxelles: une grève en prime
Lundi, 70'000 passagers sont restés bloqués à l'aéroport de Bruxelles. La raison en était cette fois une journée de grève nationale des syndicats, à laquelle le personnel de sécurité de l'infrastructure a pris part.
Une porte-parole de l'aéroport a appelé les passagers à ne pas se rendre sur les lieux: tous les départs de la journée ont été annulés.
Swiss: 100 vols d'été annulés
La compagnie aérienne Swiss a également dû réagir au manque cruel de main-d'oeuvre, en supprimant une centaine de vols cet été. Au total, 30'000 passagers sont concernés par ces annulations des modifications de vol – dont près de 10'000 sont en fait de pures suppressions.
La compagnie aérienne britannique à bas prix EasyJet a également annoncé des suppressions de vols récemment. La raison invoquée dans son cas est le manque de personnel dans les aéroports, a-t-on appris.
Les grandes compagnies en première ligne
Selon notre expert en voyages Philippe Strässle, les licenciements Covid ont impacté plus fortement les grands aéroports comme ceux d'Amsterdam, de Paris ou de Londres: «Mais Zurich n'est malheureusement pas épargné.» Selon lui, les aéroports à faible trafic sont probablement ceux qui peuvent encore le mieux amortir le choc: «Je pense par exemple à Berne-Belp, ou à Altenrhein.»
Mais l'aéroport de Zurich déclare, malgré tout, envisager la période des vacances d'été. Sa porte-parole, Bettina Kunz, affirme: «Nous sommes préparés à la période estivale.» Il y a «en principe» suffisamment de personnel en service: «Dans ce contexte, le fait que nous n'ayons pratiquement pas dû licencier de personnel pendant la pandémie, grâce au chômage partiel, est un avantage.»
«La situation du personnel reste tendue»
Selon sa porte-parole, Manuela Witzig, l'Euroairport de Bâle «ne connaît pas non plus actuellement de pénurie aiguë en personnel». Malgré tout, «la situation dans le secteur du tourisme reste tendue. Le nombre de passagers est parfois plus important que les ressources à disposition.» L'on s'attend à l'Euroairport à «des processus qui fonctionnent, pour une exploitation estivale très exigeante, même s'il faut s'attendre à des temps d'attente aux heures de pointe», déclare la porte-parole.
Afin d'éviter autant que possible les complications, Philippe Strässle recommande vivement d'effectuer le self-check-in à la maison, et d'imprimer si possible soi-même l'étiquette de bagages à l'aéroport. «Il faut aussi absolument prévoir plus de temps. Si ce n'est pas nécessaire, tant mieux. Mais il faut absolument arriver à l'aéroport une heure plus tôt que d'habitude. Surtout le vendredi ou le samedi, lorsque le nombre de passagers est particulièrement important.»