Lorsque la guerre a éclaté en Ukraine, Elena Moskvitina a pris ses deux enfants sous le bras et a fui. Son but: arriver jusqu’à la frontière roumaine pour ensuite réfléchir à un plan. C’est dans un centre provisoire pour réfugiés que la jeune maman a été abordée par des hommes qui se sont présentés comme des bénévoles. Ils lui ont demandé où elle comptait passer la nuit.
Le lendemain, les hommes sont revenus pour la convaincre de les suivre jusqu’en Suisse. «Ils ont insisté, arguant qu’ils l’emmèneraient en camionnette avec d'autres femmes», note la télévision britannique BBC, qui a recueilli le témoignage d’Elena.
Après avoir toisé Elena et sa fille, ils ont voulu en savoir plus sur le fils de la jeune femme. Cette dernière leur a alors demandé de lui montrer leurs papiers afin de s’assurer qu’il s’agissaient bien de bénévoles. C’est là que les doutes d’Elena se sont confirmés: les hommes se sont mis en colère, apparemment indignés qu’on leur demande des preuves de leur identité et qu'on doute de leurs bonnes intentions.
Pour tenter de les calmer, Elena leur a promis de se joindre à eux une fois les autres femmes arrivées. Manifestement satisfaits, les hommes sont partis, convaincus qu’ils emmèneraient Elena et ses deux bambins. Après leur départ, Elena a attrapé sa fille et son fils et s’en est allée, en espérant que ces inconnus perdraient sa trace.
Les stratégies des trafiquants
De nombreuses autres femmes ont raconté des expériences similaires à la BBC. Après les premiers jours chaotiques qui ont suivi le début de la guerre, la situation d’accueil aux frontières a été heureusement mieux encadrée. Les individus douteux – munis de pancartes en carton sur lesquels ils inscrivaient des destinations alléchantes – se sont faits plus discrets.
Ils n'ont pour autant pas disparu. À défaut d’arpenter les camps de réfugiés en arborant des panneaux promettant l’eldorado, certains individus malveillants se font désormais passer pour des bénévoles.
Des enfants qui voyagent seuls
«Pour les prédateurs et les trafiquants d’êtres humains, la guerre en Ukraine n’est pas une tragédie, mais une opportunité. Les femmes et les enfants sont ciblés», avait averti le secrétaire général de l’ONU António Guterres sur Twitter.
En temps de paix, les réseaux de traite d'êtres humains sont déjà notoirement actifs en Ukraine et dans les pays voisins. Aujourd’hui, ils profitent de la guerre et de la détresse des gens pour faire leur sale besogne.
La situation est particulièrement précaire dans le cadre de la guerre en Ukraine, notamment en raison de l’interdiction faite aux hommes de moins de 60 ans de quitter le pays. Femmes et enfants voyagent généralement seuls et tombent ainsi encore plus facilement entre les griffes de trafiquants.
Comme le rapporte la BBC les organisations de défense des droits de l’homme sont surtout inquiètes pour les enfants qui voyagent seuls. A noter que des processus d’enregistrement lacunaires en Pologne et dans d’autres régions frontalières – en particulier au début de la guerre – ont conduit à la disparition d’enfants.
En Suisse, le problème est connu. C’est pourquoi l’Organisation suisse d’aide aux réfugiés exige un extrait de casier judiciaire des personnes qui accueillent des personnes en fuite.
(Adaptation: Valentina San Martin)