«Ils n'ont pas de cœur»
Après le mort de son mari à Gaza, une ex-otage israélienne ne décolère pas contre son gouvernement

Cette ex-otage israélienne de 79 ans est remplie de colère et de rancœur envers son gouvernement. Et ce, après la mort de son mari dans la bande de Gaza. Mais pas seulement. Pour elle, Israël n'a pas de cœur.
Publié: 10.06.2024 à 17:33 heures
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Dernière mise à jour: 10.06.2024 à 17:55 heures
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Yoram Metzger est mort à Gaza le 3 juin dernier.
Photo: DUKAS
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AFP Agence France-Presse

Une semaine après l'annonce officielle de la mort de son mari captif à Gaza, Tami Metzger, ex-otage du Hamas ne décolère pas contre le gouvernement israélien. «Si le gouvernement avait arrêté la guerre», dit-elle, son mari Yoram, serait encore en vie. «Je suis en colère, ils n'ont pas de cœur», ajoute-t-elle à propos des dirigeants israéliens.

L'armée israélienne avait annoncé la semaine dernière la mort de quatre otages israéliens retenus depuis le 7 octobre par le Hamas à Gaza dont Yoram Metzger, 80 ans.

«Personne ne nous a parlé»

Quand Tami Metzger reçoit dimanche l'AFP dans sa maison de Kiryat Gat, dans le sud d'Israël, la colère froide de cette femme de 79 ans tranche avec l'euphorie qui avait accompagné l'annonce, la veille, de la libération de quatre otages aux mains du Hamas lors d'une opération au centre de la bande de Gaza, qui a coûté la vie à plus de 200 Palestiniens.

Si elle aussi a partagé la joie de tout un pays, elle ne dissimule pas sa rancœur à l'égard du Premier ministre, Benjamin Netanyahu, «qui a vite couru pour parler aux ex-otages». «Quand nous sommes sortis, pas un mot, personne ne nous a parlé», déplore-t-elle. Elle fait référence au moment où elle-même, alors otage à Gaza, a été libérée à la faveur d'une trêve d'une semaine entre Israël et le Hamas fin novembre.

On va faire «tomber le gouvernement»

Samedi soir, Netanyahu est allé rencontrer à l'hôpital les otages libérés et a multiplié les déclarations pour saluer leur retour et féliciter les forces de sécurité pour cette opération. Le même soir, Ayala Metzger, sa belle fille, une des figures de la contestation anti-gouvernement a manifesté à Tel-Aviv, comme toutes les semaines, pour exiger un accord de libération des otages et «faire tomber le gouvernement».

Le 7 octobre, Tami Metzger a été enlevée avec son mari au kibboutz Nir Oz lors de l'attaque inédite du Hamas dans le sud d'Israël qui a entraîné la mort de 1194 personnes, en majorité des civils, d'après un décompte de l'AFP s'appuyant sur des données israéliennes.

Ce jour-là, 251 personnes ont été enlevées et emmenées dans la bande de Gaza. Ils sont toujours 116 otages à y être retenus dont 41 sont considérés morts, d'après l'armée israélienne. L'offensive militaire israélienne sur Gaza menée en représailles a tué plus de 37100 Palestiniens, en majorité des civils, selon des données du ministère de la Santé du gouvernement du Hamas pour Gaza.

Son mari tentait de faire sourire

Interrogée sur sa captivité, Tami Metzger raconte avec force détails son enlèvement par des Palestiniens non armés: «Un Gazaoui a ouvert (la salle de bains) et m'en a sortie. Il m'a demandé de l'argent, mais je n'avais pas d'argent (...), il m'a attrapé par les bras et m'a tiré dehors.» Emmenée sur une moto par deux hommes, puis jetée à l'arrière d'un pick-up le visage en sang, la septuagénaire est poussée dans un tunnel souterrain et forcée de marcher pendant des kilomètres, se souvient-elle.

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«Il me criait 'pars, les enfants t'attendent', je n'avais pas d'autre choix que de partir et je ne l'ai plus jamais revu»
Tami Metzger, ex-otage de 79 ans
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Pendant plus de 50 jours, elle vit sous terre avec un groupe d'une dizaine d'autres otages parmi lesquels son mari. Arabisant, Yoram Metzger servait d'interprète avec leurs geôliers.

Un tiers de pita et un bout de fromage avec deux dattes le matin, du riz le soir, pas d'eau chaude pour se doucher, des soucis de santé pour elle et ses camarades de captivité, Tami Metzger raconte avec précision ses longues journées passées aux mains du mouvement islamiste palestinien.

Elle se souvient aussi, sourire aux lèvres, des tentatives de son mari pour détendre l'atmosphère, en faisant des blagues. Interrogé sur ce qu'elle a ressenti pendant cette période, Tami Metzger reste pudique et ne dévoile pas ses sentiments.

Mort le 3 juin dernier

Quand elle est libérée le 28 novembre, elle n'a pas le temps de vraiment dire au revoir à son mari. «Ils ne m'ont pas autorisé à (...) le toucher, ni lui parler», se souvient-elle. «Lui me criait 'pars, les enfants t'attendent', je n'avais pas d'autre choix que de partir et je ne l'ai plus jamais revu.»

Le 3 juin, quand l'armée lui annonce la mort de son mari, ainsi que celle de trois autres otages, elle n'est pas surprise. En décembre, le Hamas avait diffusé une vidéo montrant son mari et deux otages originaires du kibboutz de Nir Oz, en vie, demandant leur libération.

«Quand j'ai vu cette vidéo, j'ai compris qu'il n'y avait pas d'espoir», dit Tami Metzger, faisant allusion à l'état des trois hommes, visiblement épuisés. Entourée de ses trois fils et six petits-enfants, cette grand-mère se souvient avec nostalgie de sa vie paisible avant le 7 octobre mais, résignée, conclut par un triste: «C'est comme ça.»

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